Suisse-UE - Erasmus: Berne explique miser sur le 2e milliard de cohésion

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Suisse-UEErasmus: Berne explique miser sur le 2e milliard de cohésion

Le Conseil fédéral a répondu négativement à une motion lui demandant de soumettre un projet sur la participation de la Suisse au programme européen d’échange d’étudiants.

Christine Talos
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Christine Talos
Dans quelles conditions les étudiants suisses auront-ils accès aux classes de l’UE?

Dans quelles conditions les étudiants suisses auront-ils accès aux classes de l’UE?

AFP

On le sait: le sort d’Erasmus +, le programme d’échanges entre étudiants suisses et européens, est étroitement lié aux relations tumultueuses entre la Suisse et Bruxelles. Classée comme «État tiers» depuis la rupture des négociations sur l’accord institutionnel en mai dernier, la Suisse ne peut profiter désormais que partiellement du système. Au grand dam de nombreux parlementaires. Du coup, la commission de politique extérieure du National a déposé le 30 août une motion demandant que Berne prépare un message de financement d’ici à la session d’hiver. Le Conseil fédéral vient d’y répondre par la négative.

Dans son texte approuvé par des élus de tous bords sauf de l’UDC, la commission rappelle pourtant que le Parlement s’est prononcé à plusieurs reprises en faveur d’une telle participation. «D’une grande importance pour les jeunes générations, elle est également inscrite au programme de la législature 2019 à 2023», rappelle-t-elle. Bien que le Conseil fédéral affirme vouloir permettre à la Suisse de participer, dans les meilleurs délais, au programme Erasmus+, il n’en a pas encore fait la preuve par les actes, estime-t-elle.

Même si, pour la Suisse, les coûts d’une nouvelle association à Erasmus+ sont plus élevés qu’avant, la commission souligne que cela permettrait à notre pays d’offrir à nouveau aux jeunes générations une perspective de participation à part entière aux programmes d’échange et de former des talents étrangers dans ses hautes écoles. En outre, l’UE y trouverait aussi son compte puisqu’elle pourrait compter sur le cofinancement solidaire de la Suisse, «ce qui contribuerait à établir un climat de confiance et de bonne volonté après l’interruption unilatérale des négociations sur l’accord-cadre institutionnel par le Conseil fédéral».

Berne mise sur le milliard de cohésion

Dans sa réponse, le Conseil fédéral dit partager l’objectif visé par la motion, mais la rejette. Si le projet a pris du retard, ce n’est pas sa faute, explique-t-il, mais cela découle de la situation qui règne actuellement entre la Suisse et Bruxelles. «L’UE n’a toujours pas adopté de mandat de négociation à ce sujet et considère l’association de la Suisse à Erasmus+ dans le cadre des relations globales entre les deux parties», souligne Berne. De ce fait, «elle n’est pas disposée à entamer des entretiens exploratoires pour clarifier les points clés d’une association à Erasmus+», écrit-il.

Le Conseil fédéral explique surtout qu’il mise sur le déblocage de la 2e contribution de la Suisse à l’UE – qui doit verser 1,3 milliard de francs sur dix ans pour réduire les inégalités entre les pays de l’UE. «Si ce n’est pas en soi une garantie d’association à Erasmus+ et à d’autres programmes bloqués, c’est cependant une condition nécessaire qui peut aussi avoir un effet positif sur le contexte général», souligne-t-il.

Pour rappel, les deux Chambres doivent débattre de cette 2e contribution le même jour, soit le 30 septembre, avant-dernier jour de la session d’automne. Mi-septembre, le Conseil des États avait refusé par 30 voix contre 14 une motion d’ordre de Carlo Sommaruga (PS/GE) qui voulait avancer la discussion à la première ou à la 2e semaine de session. «L’importance de l’enjeu mérite un débat parlementaire urgent et complet. Il ne sera pas possible d’éliminer les éventuelles divergences entre les deux Chambres en maintenant le débat en fin de session», avait plaidé le Genevois. L’objet n’est pas urgent et peut être réglé en toute tranquillité durant la session d’hiver, avait répondu Thomas Hefti (PLR/GL), vice-président du bureau du Conseil des États.

Depuis 2014 dans la tourmente

Après le «oui» populaire en février 2014 à l’initiative contre l’immigration de masse, Bruxelles avait suspendu les négociations sur la participation helvétique à Erasmus+. Berne avait réagi en mettant en œuvre ses propres programmes d’encouragement compatibles avec ceux de l’UE. En novembre 2017, le Parlement avait chargé le Conseil fédéral de reprendre rapidement les négociations avec l’UE.

Classée désormais «Etat tiers», la Suisse ne peut profiter aujourd’hui que partiellement du système, Un système dans lequel elle a dépensé 247 millions de francs de 2014 à 2020, et prévu au budget près de 200 millions pour 2021-2024.

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