Football: À YB, les premiers signes de la (petite) révolution Wicky

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FootballÀ YB, les premiers signes de la (petite) révolution Wicky

Pour la première fois dirigés par l’entraîneur valaisan, les Bernois se sont dévoilés sous un nouveau visage lors du succès 4-0 contre Zurich ce week-end. Avec notamment un milieu en losange.

Valentin Schnorhk
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Valentin Schnorhk

Une fois, mais pas deux? Après avoir perdu son titre de champion de Suisse la saison passée, Young Boys ne semble pas avoir la modestie de redevenir un simple challenger cette année. Compréhensible. Le club bernois a passé l’été à renforcer son effectif avec de jolis noms (Itten, Ugrinic, Rüegg, Rrudhani), comme pour donner du sens à ses intentions. Jusqu’au gros coup de poing sur la table de samedi, pour la réception du nouveau tenant du titre Zurich. Un succès 4-0, qui place déjà la saison dans un nouveau cadre.

Raphaël Wicky a su mener à bien ses idées pour sa première samedi.

Raphaël Wicky a su mener à bien ses idées pour sa première samedi.

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En termes d’effectif, personne ne semble capable de rivaliser avec la quantité et la qualité de YB. Rien de nouveau, a priori. Ce qui l’est, en revanche, c’est l’entraîneur qui tentera de mener à bien ces ambitions. Raphaël Wicky doit réussir là où David Wagner a échoué. Et le Valaisan semble avoir choisi de le faire en rompant avec le style des dernières années. Là où son prédécesseur s’était plutôt inscrit dans la continuité. Premier regard sur le Young Boys de Wicky.


La rupture par le losange

La première révolution de l’ancien milieu international est géométrique. Devenu presque identitaire, le traditionnel 4-4-2 (ou 4-2-2-2) est donc pour l’instant abandonné au profit d’un schéma qui appelle une animation différente. Il n’est plus si rare en Super League (Saint-Gall en a fait son classique, Lucerne l’a adopté à merveille au printemps dernier et même Sion s’y est essayé ce week-end), mais il suggère une certaine maîtrise et tolère peu d’approximations.

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Le positionnement de Fassnacht et Sierro: en 1re période, les deux relayeurs ont tendance à se placer sur la largeur, laissant beaucoup d’espace à l’intérieur du jeu.

Le positionnement de Fassnacht et Sierro: en 1re période, les deux relayeurs ont tendance à se placer sur la largeur, laissant beaucoup d’espace à l’intérieur du jeu.

Leurs appels (ici Sierro) sont régulièrement dirigés vers l’extérieur.

Leurs appels (ici Sierro) sont régulièrement dirigés vers l’extérieur.

Même si les qualités de Fassnacht à droite lui permettent d’amener du danger (ici à l’amorce d’une grosse situation bernoise), celui-ci vient essentiellement de passes longues.

Même si les qualités de Fassnacht à droite lui permettent d’amener du danger (ici à l’amorce d’une grosse situation bernoise), celui-ci vient essentiellement de passes longues.

Samedi, YB a été proche de l’apprendre à ses dépens. En première mi-temps, plusieurs de ses pertes de balle ont révélé la friabilité de son entrejeu et surtout de sa défense centrale Lustenberger-Zesiger. À quoi l’imputer? Peut-être à sa structure avec ballon, et notamment au positionnement et aux déplacements de ses deux milieux relayeurs: Christian Fassnacht à droite, Vincent Sierro à gauche.

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Les décrochages de Fabian Rieder: avec le délaissement de l’axe des relayeurs, Fabian Rieder se retrouve à descendre très bas pour permettre au jeu de progresser. Il est ici à hauteur du milieu défensif Niasse.

Les décrochages de Fabian Rieder: avec le délaissement de l’axe des relayeurs, Fabian Rieder se retrouve à descendre très bas pour permettre au jeu de progresser. Il est ici à hauteur du milieu défensif Niasse.

Il n’hésite pas à demander des ballons à Von Ballmoos.

Il n’hésite pas à demander des ballons à Von Ballmoos.

En 1re mi-temps, c’est presque uniquement parce que ses déplacements entre les lignes sont bons que le jeu bernois parvient à avancer à l’intérieur.

En 1re mi-temps, c’est presque uniquement parce que ses déplacements entre les lignes sont bons que le jeu bernois parvient à avancer à l’intérieur.

Leur tendance à s’exporter sur la largeur a posé des problèmes avant la pause: une certaine difficulté à les trouver pour combiner sur des enchaînements courts, mais également un retard dans le repli après la perte de balle. Et la nécessité pour Fabian Rieder, aligné en numéro 10, de redescendre bas, voire très bas, aux côtés du milieu défensif Cheikh Niasse, pour permettre au jeu bernois de progresser. Si l’international M21 en est tout à fait capable, ce n’est pas forcément dans ce registre-là qu’il était attendu (mais plutôt plus haut, pour être actif dans le dernier tiers, par ses déplacements et son activité sans ballon).

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Un losange plus compact après la pause: très vite en 2e période, YB va sembler plus compact à l’intérieur du jeu. Les positionnements des relayeurs dans les demi-espaces contraignent les milieux zurichois à les garder à l’œil. Niasse peut donc être libre et Rieder reste plus haut, derrière le milieu.

Un losange plus compact après la pause: très vite en 2e période, YB va sembler plus compact à l’intérieur du jeu. Les positionnements des relayeurs dans les demi-espaces contraignent les milieux zurichois à les garder à l’œil. Niasse peut donc être libre et Rieder reste plus haut, derrière le milieu.

Cette densité favorise les relais et les déplacements courts. Garcia est ici touché à gauche, Sierro plonge en profondeur, permettant à Rieder d’être trouvé.

Cette densité favorise les relais et les déplacements courts. Garcia est ici touché à gauche, Sierro plonge en profondeur, permettant à Rieder d’être trouvé.

En enchaînant des passes courtes dans des espaces réduits, des lignes de passes s’ouvrent dans des zones dangereuses. Fassnacht est ainsi trouvé à l’entrée de la surface.

En enchaînant des passes courtes dans des espaces réduits, des lignes de passes s’ouvrent dans des zones dangereuses. Fassnacht est ainsi trouvé à l’entrée de la surface.

Coïncidence ou non, après la pause, Rieder a été bien moins sollicité (7 ballons reçus en deuxième période, sur un total de 29), et notamment dans son propre camp. Mais pas moins décisif. Notamment parce que Young Boys a semblé plus réfléchi dans son approche avec ballon. En misant précisément sur ce que le losange peut lui amener: la densité à l’intérieur du jeu, et donc la possibilité d’enchaîner les relais courts (et d’être suffisamment proche à la perte de balle pour la récupérer rapidement).

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Le 2-0, un exemple type: Le losange est formé dans le cœur du jeu. Zurich, passé en 4-2-3-1, est complètement fixé à l’intérieur.

Le 2-0, un exemple type: Le losange est formé dans le cœur du jeu. Zurich, passé en 4-2-3-1, est complètement fixé à l’intérieur.

Pour déstabiliser Zurich, YB mise sur des relais courts, ici entre Niasse et Fassnacht.

Pour déstabiliser Zurich, YB mise sur des relais courts, ici entre Niasse et Fassnacht.

Cela permet d’éliminer un adversaire, et de focaliser l’attention des Zurichois. Itten échappe ainsi au marquage en restant dans leur dos. Touché, il peut contrôler vers la surface et inscrire son premier but sous ses nouvelles couleurs.

Cela permet d’éliminer un adversaire, et de focaliser l’attention des Zurichois. Itten échappe ainsi au marquage en restant dans leur dos. Touché, il peut contrôler vers la surface et inscrire son premier but sous ses nouvelles couleurs.

Avec les milieux et les attaquants en zone axiale, échelonnés sur différentes lignes tout en étant mobiles, Zurich a été acculé et fixé dans l’axe. Les espaces se sont donc ouverts également sur les côtés. Le 2-0, inscrit par Cedric Itten, a notamment mis en exergue ce schéma. Il dénote d’un ajustement décisif dès la mi-temps du premier match: YB a non seulement été plus dangereux après la pause, mais à l’exception du penalty manqué par Antonio Marchesano à 0-0, il a beaucoup moins subi. Pas qu’un hasard.


Wicky «place» son pressing

L’autre nouveauté proéminente après le premier match disputé par Young Boys (qui ira à Liepaja en Lettonie en Conference League jeudi) cette saison, c’est la volonté de maintenir cette organisation en losange sans ballon. Et donc notamment au pressing.

Ces dernières années, en Super League, YB a toujours ou presque cherché à être intense sans ballon. Pas de changement dans l’esprit. Dans l’action, en revanche, l’approche est différente: elle était basée sur la débauche physique auparavant, avec les quatre joueurs offensifs qui chassaient les défenseurs adverses. Contre Zurich, elle était axée sur le positionnement de départ. Autrement dit, le pressing était «placé».

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Le pressing bernois, version I: sur les 6 mètres de Brecher, Young Boys met en place son losange, avec cinq joueurs très haut. Le milieu défensif (Niasse) et les défenseurs restent plus bas, en un contre un. Sur la première passe, l’attaquant le plus près (ici Elia) tente de fermer la ligne de passe vers l’extérieur et d’orienter son vis-à-vis vers l’intérieur.

Le pressing bernois, version I: sur les 6 mètres de Brecher, Young Boys met en place son losange, avec cinq joueurs très haut. Le milieu défensif (Niasse) et les défenseurs restent plus bas, en un contre un. Sur la première passe, l’attaquant le plus près (ici Elia) tente de fermer la ligne de passe vers l’extérieur et d’orienter son vis-à-vis vers l’intérieur.

Mais Kamberi parvient à trouver Boranijasevic, laissé volontairement seul. C’est le latéral gauche Garcia qui sort sur lui.

Mais Kamberi parvient à trouver Boranijasevic, laissé volontairement seul. C’est le latéral gauche Garcia qui sort sur lui.

Arrivé trop tard, Garcia ne peut empêcher la transmission en une touche vers Gnonto.

Arrivé trop tard, Garcia ne peut empêcher la transmission en une touche vers Gnonto.

À savoir, l’organisation en losange permettait de bloquer l’axe, laissant les côtés zurichois libres et les défenseurs bernois en un contre un. Un positionnement de départ intentionnel, qui doit – en théorie – permettre de répondre à toutes les sorties de balle adverse. En cas de ballon joué à l’intérieur, YB devait être en nombre pour le récupérer. Si la passe était longue, la présence physique des défenseurs bernois devait suffire à remporter les duels. Et si le ballon était joué sur l’aile? Alors un joueur devait se tenir prêt à sortir dessus. Mais qui?

C’est la question à laquelle YB a dû un moment répondre avant de véritablement piéger le FCZ. En première période, on aura notamment vu les latéraux sortir très haut, à l’instar de Garcia sur Boranijasevic. Un trop long effort, trop facilement éliminable. Et dès lors que le pressing bernois était éliminé, alors le danger se faisait plus que prégnant. Le risque a parfois été rattrapé de peu, en dernière ou en avant-dernière instance. Avant que certaines corrections soient décisives.

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Le piège est tendu: À force d’anticiper la passe vers le latéral, YB contraint Zurich à d’autres solutions. Kryeziu va donc essayer de passer par l’intérieur du jeu.

Le piège est tendu: À force d’anticiper la passe vers le latéral, YB contraint Zurich à d’autres solutions. Kryeziu va donc essayer de passer par l’intérieur du jeu.

Or, c’est précisément là où les Bernois sont en surnombre. La progression de Kryeziu est suivie intensément par Elia. Ce dernier commet la faute.

Or, c’est précisément là où les Bernois sont en surnombre. La progression de Kryeziu est suivie intensément par Elia. Ce dernier commet la faute.

Moins de 30 secondes plus tard, Kryeziu cherche Conde, toujours à l’intérieur où YB est bien présent.

Moins de 30 secondes plus tard, Kryeziu cherche Conde, toujours à l’intérieur où YB est bien présent.

Plus logiquement, ce sont les milieux relayeurs excentrés qui sont sortis sur les côtés, anticipant cette passe. Tellement que, après un certain temps, les relanceurs zurichois ont préféré passer dans l’axe. Là même où YB les attendait, prêts à refermer l’espace en un rien de temps. Le premier et le troisième but sont arrivés de séquences de ce genre.

Cela ressemble à une première victoire tactique pour Wicky. Et un point de départ très encourageant.

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