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PolémiqueAdolescents poussés à se dénuder sur le Net

Une boutique lausannoise pour adolescents, spécialisée dans les dessous, encourage ses clients à poster des images d'eux sur les réseaux sociaux. Une campagne qui dérange.

Sandra Imsand
par
Sandra Imsand
Dans ce magasin du centre de Lausanne, une maman a été choquée de voir dans les cabines d'essayage (ci-dessous) un message encourageant les clients à se prendre en photos et à les partager sur les réseaux sociaux.

Dans ce magasin du centre de Lausanne, une maman a été choquée de voir dans les cabines d'essayage (ci-dessous) un message encourageant les clients à se prendre en photos et à les partager sur les réseaux sociaux.

Jean-Guy Python

«Au début je me suis demandé si c'était un gag.» Cette maman lausannoise de 36 ans n'en revient toujours pas. Alors qu'elle accompagnait sa fille de 12 ans pour l'achat d'un nouveau maillot de bain dans un magasin du centre de Lausanne, elle a constaté que les miroirs des cabines d'essayage étaient ornés de messages qui encouragent les clients à poster des clichés d'eux dans leurs nouvelles tenues sur le réseau social de photos Instagram.

Une initiative qui l'a choquée. «Cette boutique s'adresse à une clientèle d'adolescents et vend principalement des sous-vêtements et des maillots de bain. Proposer ainsi à des mineurs de se prendre en photo dans les cabines, c'est vraiment dérangeant et problématique. La cabine d'essayage a une connotation sexuelle. Si le message avait été inscrit sur le ticket de caisse, l'effet n'aurait pas été le même!» Un avis que partage Marianne Affolter, porte-parole de Pro Juventute: «La cabine est un lieu intime, prendre une photo dans cet endroit a une signification particulière.»

En Italie, à la centrale de Tezenis, chaîne dont fait partie la boutique en question, on s'étonne de cette réaction. «Cette campagne ne demande pas de se montrer en sous-vêtements, mais en tenue complète», déclare-t-on du côté du groupe Calzedonia. La marque se défend d'ailleurs de ne proposer que des sous-vêtements ou des maillots de bain dans les points de vente. «Ces catégories ne représentent que 42% de notre volume de vente. La majorité se compose de pulls, de vêtements légers, de pyjamas et d'accessoires.»

Commentaires outrés

Encourager le partage d'images sur les réseaux sociaux serait une pratique courante des chaînes de vêtements. Jusqu'à présent, aucune plainte n'était arrivée aux oreilles du siège. La gérante de la boutique lausannoise affirme, elle aussi, ne pas avoir eu de remarques depuis la pose de ces adhésifs sur les miroirs, voilà plus d'un an.

La maman lausannoise a posté le cliché des cabines sur les réseaux sociaux, suscitant de nombreux commentaires outrés ou choqués. «Beaucoup de personnes m'ont dit qu'après avoir vu cette photo elles avaient eu une discussion avec leur enfant, afin de leur expliquer les risques de se mettre en scène sur Internet.» Une initiative que salue Pro Juventute. «Il est important que les parents restent vigilants et signalent ce genre de choses à leur entourage. Il faut aussi que les enfants aient un regard critique et comprennent la portée de leurs gestes», explique Marianne Affolter. Malheureusement, au vu des centaines d'images d'adolescentes en dessous postées sur le compte Instagram de la marque, ce n'est de loin pas le cas.

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