Canton de FribourgAffaire Marie Garnier: le procureur est bien récusé
Le Tribunal cantonal admet la demande de récusation faite par le procureur général Fabien Gasser, mais il remet la procédure dans les mains du Ministère public.

La conseillère d'Etat démissionnaire Marie Garnier.
Ce sera bel et bien un autre magistrat que Fabien Gasserqui mènera l'enquête pour établir s'il y a eu ou non violation du secret de fonction. Le journal «La Liberté», se référant à un arrêt daté du 20 février, a révélé mardi la décision rendue par le Tribunal cantonal.
Cet arrêt précise qu'il incombe désormais aux procureurs généraux adjoints de déterminer quel procureur du Ministère public reprendra la cause. Ce peut être soit un procureur général adjoint, soit un procureur ordinaire.
Ce n'est que si tous les procureurs devaient se trouver dans un cas de récusation qu'il appartiendrait au Conseil de la magistrature de nommer un procureur ad hoc, explique le Tribunal cantonal.
Selon le journal Freiburger Nachrichten, le dossier pourrait quand même atterrir dans les mains d'un magistrat externe. Le Ministère public en a fait la demande auprès du Conseil de la magistrature, arguant que l'impartialité de tous les procureurs risque d'être remise en question vu leurs liens avec le procureur général.
Battage médiatique
Marie Garnier est soupçonnée d'avoir violé le secret de fonction en donnant aux médias des documents confidentiels au sujet des employés de la Préfecture de la Sarine. Le procureur Fabien Gasser a enquêté sur l'ensemble des éventuelles fuites survenues dans cette affaire.
Il a constaté que les conditions objectives d?une violation du secret de fonction par Marie Garnier sont réalisées. Pour pouvoir entendre la version des faits de l'intéressée, il a demandé au Grand Conseil de lever son immunité, ce qui fut chose faite en novembre. Mais avant même cette levée d'immunité, la ministre verte a démissionné. Et le lendemain de l'annonce de sa démission, le journal 20 minutes a révélé que Fabien Gasser entretenait une relation privée avec la vice-chancelière de l'Etat de Fribourg.
L'avocat de Marie Garnier, André Clerc, a alors clamé haut et fort que le procureur devait se récuser. Car son amie, en tant que vice-chancelière, a pu assister à des réunions du gouvernement au sujet de cette affaire, a-t-il argumenté.
Enquête correcte
Fabien Gasser a d'abord nié devoir se récuser, mais il a finalement jeté l'éponge. Il estimait ne plus avoir l'impartialité requise pour continuer son travail, depuis la parution de nombreux articles dans la presse touchant considérablement sa famille et ses proches.
Force est de constater que l'impartialité n'est plus garantie puisque l'affaire a pris une tournure de conflit personnel, commente le Tribunal cantonal. M. Gasser avait du ressentiment envers le clan Garnier, qu'il a soupçonné d'être à l'origine des fuites sur sa vie privée.
Le Tribunal valide ainsi le motif invoqué par le procureur général pour sa propre récusation. Par contre, la demande de récusation émanant de Marie Garnier est irrecevable, pour des raisons juridiques techniques.
Et même si elle avait été recevable, elle aurait dû être rejetée, dit le Tribunal cantonal. Marie Garnier et son avocat voulaient faire annuler les actes de procédure menés par Fabien Gasser sous prétexte qu'il était en état de récusation obligatoire dès le début.
Attaques peu crédibles
En réalité, le procureur n'est pas suspect d'avoir manqué d'impartialité dans son travail d'enquête initial, explique le Tribunal cantonal. C'est seulement après le déballage médiatique au sujet de sa liaison que son impartialité a cessé d'être garantie.
Du reste, la proximité de la vice-chancelière avec le Conseil d'Etat n'était de toute façon pas un argument convaincant pour demander la récusation du procureur, note encore le Tribunal.
Idem pour les allégations selon lesquelles le procureur aurait renoncé à ouvrir une procédure contre le président du Conseil d'Etat en raison de liens privilégiés entre eux: «On peine à voir une apparence de prévention au simple motif que des personnes ont travaillé ou effectué leur formation dans la même étude d'avocat.»