FootballAffligeant, pas inquiétant
La Suisse a été battue par le Qatar ce mercredi. Une défaite qui doit beaucoup à un état d'esprit défaillant.
- par
- Tim Guillemin
- Lugano

Vladimir Petkovic a perdu contre un «petit». Ce n'était jamais arrivé au «Mister» depuis qu'il est arrivé à la tête de l'équipe de Suisse et ce constat en dit long sur l'ampleur de la débâcle de ce mercredi à Lugano. Il ne faut pas s'y tromper: même si le Qatar a battu la Chine et l'Equateur ces derniers mois, la sélection de Felix Sanchez Bas n'a rien d'exceptionnel. Sauf qu'elle a battu la Suisse à la régulière, se créant les meilleures occasions du match et gagnant la majorité des duels.
Il faut fustiger l'état d'esprit de cette équipe de Suisse, qui n'avait pas envie de jouer ce match, en tout cas ses leaders, Granit Xhaka en tête. Le capitaine de la Nati a livré une performance à la limite de la suffisance, voire même de l'autre côté de la frontière, et il est juste de le lui reprocher. Mais il ne faut pas trop en faire sur lui, non plus. Le match dans lequel il est attendu est celui de dimanche face à la Belgique et, pour l'heure, il a toujours répondu présent depuis la fin de la Coupe du monde. Maintenant qu'il est le chef de cette équipe, il assume ce rôle, en tout cas pour l'instant. Il n'est pas question de lui tirer dessus après une prestation certes honteuse, mais en amical, en oubliant ce qu'il a fait de bien lors des derniers matches officiels face à la Belgique, justement, et à l'Islande. Le problème, avec Granit Xhaka, c'est qu'il choisit un peu trop ses matches et que cela s'est beaucoup trop vu ce mercredi. A lui de réussir une grande performance dimanche pour faire oublier cette humiliation dimanche. Alors, tout sera pardonné et oublié.
Ce constat vaut d'ailleurs pour le reste de l'équipe. Tous ont quelque chose à se faire pardonner, mais au-delà de cet aspect, il faut bien se pencher aussi sur la volonté d'ouverture, le nouveau credo de Vladimir Petkovic après la Coupe du monde. Et là, avec les blessés et les absents, ainsi que la retraite plus ou moins forcée d'éléments expérimentés, la Suisse a démontré contre son gré ce mercredi qu'elle ne disposait pas d'un réservoir assez large pour se permettre de prendre le Qatar à la légère. Ce constat vaut aussi pour le sélectionneur. Lui aussi avait déjà la tête à la Belgique et s'est sans doute dit que ça passerait «comme ça» contre le Qatar, vu que cela a toujours été depuis le début de son mandat.
La pièce manquante du puzzle?
Mais lorsque les leaders ne sont pas concernés, que plusieurs cadres sont absents et qu'en plus, on laisse Xherdan Shaqiri, par exemple, sur le banc en première période, alors le constat est cruel: la Suisse manque de qualité individuelle pour faire plier le 96e au classement FIFA. Faire débuter Loris Benito, Christian Fassnacht et Léo Lacroix, avec tout le respect que l'on a pour ces trois joueurs, était peut-être un peu trop audacieux.
On ne parle pas là de leurs performances respectives, mais bien de tout ce qu'engendre une première titularisation, en termes de stress et d'automatismes. Vladimir Petkovic a peut-être un peu sous-estimé cette question, comme certains de ses joueurs ont probablement sous-estimé le Qatar.
Au final, cela donne cette défaite humiliante et affligeante, mais pas forcément inquiétante. Car la Suisse, au complet, a prouvé, dernièrement, qu'elle savait rivaliser avec les plus grands. Dimanche face à la Belgique, le stade sera plein, l'enjeu sera là, Granit Xhaka va courir partout. L'état d'esprit sera bon, on en prend le pari. S'il ne l'est pas, et que la Suisse s'incline sans combattre face aux Diables Rouges, cette semaine devra être le point de départ de nombreuses questions. Pour les éviter, mieux vaut livrer une belle performance. En espérant que tout le monde en soit bien conscient et que ce revers contre le Qatar serve au moins à insuffler un sentiment de révolte, celui qui avait peut-être manqué lors des dernières confrontations face à des "gros".
Et si elle était là, justement, la pièce manquante du puzzle, celle qui a toujours empêché la Suisse de Vladimir Petkovic de battre plus fort qu'elle? Ce serait piquant, quand même, que l'exploit attendu depuis des années arrive la même semaine qu'une défaite face au petit, celle dont la Suisse pensait à tort s'être définitivement débarrassée...