JusticeBNP Paribas mise en examen pour ses prêts en francs
Une filiale de la banque BNP Paribas est mise en examen par la justice française pour pratique commerciale trompeuse pour ses prêts toxiques en francs suisses.

Une filiale de BNP Paribas a été mise en examen pour pratique commerciale trompeuse pour ses prêts immobiliers Helvet Immo, accordés en francs suisses à 4655 clients qui devaient rembourser en euros, a annoncé la banque française qui confirme une information de Libération.
La forte baisse de l'euro par rapport au franc suisse a mis en difficulté les emprunteurs. Certains ont porté plainte, estimant ne pas avoir été correctement informés par la banque sur ce produit financier, proposé entre mars 2008 et décembre 2009 par BNP Paribas Personal Finance.
La semaine dernière, BNP Paribas a déjà été convoquée le 28 septembre en correctionnelle pour un autre de ses produits financiers, «BNP Garantie Jet 3».
Acquisitions immobilières
Après les premières plaintes déposées fin 2011, une juge d'instruction avait été désignée en avril 2013 pour enquêter sur ces produits dédiés au financement d'acquisitions immobilières destinées à la location dans le cadre de dispositifs de défiscalisation.
«Dès 2010, nous nous sommes organisés pour répondre aux questions de nos clients liés à la crise de l'euro et le cas échant pour trouver des solutions au cas par cas», a réagi BNP Paribas PF qui explique avoir trouvé une solution avec plus d'un client sur deux. Après avoir traité 2771 dossiers, la banque explique souhaiter poursuivre ses efforts au cas par cas.
«Depuis deux ans, j'ai versé au dossier d'instruction une série de preuves qui accablent la BNP Paribas. La mise en examen de la BNP pour les victimes constitue un tournant très important et confirme l'existence d'éléments mettant en cause la responsabilité pénale de la banque», a de son côté réagi l'avocat de quelque 550 plaignants, Charles Constantin-Vallet.
Selon lui, ses clients avaient contracté des prêts équivalant à l'origine à des sommes d'environ 150000 euros.
Taux d'intérêts avantageux
Parmi les avantages supposés du produit, les taux d'intérêts avantageux en Suisse. Mais avec la crise de l'euro, les capitaux à rembourser ont flambé à mesure que la monnaie unique s'est dépréciée par rapport au franc suisse. Une situation susceptible de s'aggraver avec l'abandon par la Banque nationale suisse (BNS) à la mi-janvier du taux plancher de conversion du franc suisse.
Les plaignants accusent la banque d'avoir minimisé les risques liés au taux de change dans ses opérations de démarchage, passées par des intermédiaires financiers, en insistant notamment sur la sécurité du franc suisse. La banque se défend en affirmant que ce risque était explicite dans les offres de prêts et qu'à l'époque la crise de l'euro était imprévisible.
Selon une source proche de l'enquête, les documents utilisés par les commerciaux «mettaient l'accent sur les points forts du produit»: réputation de valeur refuge de la monnaie suisse, taux d'intérêt bas, mensualité fixe, option de sortie quinquennale, et relevaient une parité stable entre euro et franc suisse, un argument pertinent en 2008 mais qui devait s'avérer fragile.
«L'enquête a démontré que ces documents commerciaux présentaient des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur et portant sur les caractéristiques essentielles du bien susceptibles de caractériser une pratique commerciale trompeuse», a ajouté cette source.
Informations aux clients
Lors de l'enquête, BNP Paribas Personal Finance a de son côté rappelé que «l'impact de l'évolution du taux de change était clairement signalé aux pages 1 et 5 de l'offre de prêt» et rappelé au moment de l'acceptation du contrat, rapporte une source proche du dossier.
«Toutefois, les emprunteurs n'ont eu connaissance de ces importantes informations qu'en dernier ressort, une fois que la décision d'acquérir le bien immobilier était prise», rétorque la source proche de l'enquête. Et «plusieurs intermédiaires ont reconnu a posteriori que l'offre de crédit pouvait être inintelligible», insiste-t-elle. Selon cette source, «sur la base d'arguments déséquilibrés développés dans l'argumentaire de vente», BNP PF est soupçonné d'avoir «trompé les intermédiaires qui, par répercussion, ont trompé les clients».