SoinsBoom hospitalier chez les oiseaux
Pour faire face au nombre croissant de ses patients à plumes, la Station ornithologique de Sempach (LU) s'agrandit et se modernise. D'autres centres font de même.
- par
- Pascale Bieri
En général, les oiseaux couchés sur le dos, c'est mauvais signe. Mais pas là. Cette buse variable se trouve à l'hôpital, allongée sur une balance, avec la tête recouverte par un masque pour éviter qu'elle ne stresse, le temps d'un contrôle. «Elle a encore pris 100 grammes», se réjouit Vreni Mattmann, soigneuse animalière responsable du nouveau centre de soins de la Station ornithologique suisse de Sempach (LU).
Pour faire face au nombre croissant de ses patients à plumes, la fondation – qui retape les victimes du ciel depuis 1967 – vient d'inaugurer une structure plus grande et plus moderne, où tout est à taille d'oiseau: table de consultation; bandages, instruments médicaux… Et la buse est l'une des toutes premières à profiter de ces infrastructures flambant neuves.
D'ailleurs, si on l'interrogeait, elle pourrait parler d'avant et d'après, car c'est une «récidiviste». «Nous l'avions déjà soignée il y a deux ans, suite à un accident de la route. Elle s'était bien remise. Mais, récemment, quelqu'un l'a retrouvée au sol. Elle était faible, avec des spasmes, explique Sophie Jaquier, biologiste et porte-parole de la station. C'est l'une des très rares fois que nous voyons revenir un patient…» Bref, tout le monde croise les doigts pour que le rapace, identifié grâce à sa bague, puisse de nouveau voler une nouvelle fois. Et ça semble en bonne voie.
Pas de ségrégation
Aujourd'hui, la Station ornithologique accueille un millier d'oiseaux par an. «Il n'y a pas plus d'accidents, en revanche les gens se soucient davantage du sort des oiseaux. Quand ils en trouvent un au bord de la route ou dans les griffes d'un chat, ils savent qu'il y a des centres de soins et les apportent», relève Sophie Jaquier.
Ainsi, ces structures ornithologiques se sont multipliées en Suisse au cours des dernières années. On en compte désormais une septantaine. Et partout c'est la même effervescence. Avec des projets d'agrandissement et de modernisation, comme au Centre ornithologique de Genthod (GE), qui s'apprête à fêter ses 40 ans.
Quant aux patients, ils sont pris en charge, sans ségrégation. Depuis son ouverture, la Station de Sempach a vu passer 235 espèces, dont certaines très rares. Mais aussi les plus courantes, telles que des pigeons et des moineaux.
La preuve? «Actuellement, nous avons une corneille, qui a été retrouvée avec les plumes coupées. Elle était vraisemblablement maintenue illégalement en captivité et s'est échappée. Nous allons la garder plusieurs mois, le temps que ça repousse, afin de lui rendre sa liberté», explique Vreni Mattmann, en ajoutant: «Il n'y a aucune raison qu'elle n'ait pas droit à une nouvelle chance.»
Gare aux vitres et aux chats
Parmi les accidents les plus fréquents: les collisions contre des vitres et les mauvaises rencontres avec des chats. «Mais le gros de la saison, ce sont les «tombés du nid». Et là, ça commence», souligne Sophie Jaquier. Idem du côté de Genève. «Actuellement, nous faisons plus de cinq interventions par jour pour récupérer des jeunes, sans compter ceux que les gens nous apportent directement», ajoute Patrick Jacot, directeur du Centre de Genthod, qui accueille entre 1000 et 1200 patients à plumes par an.
En moyenne, 50% s'en sortent, dont certains après avoir dû subir des interventions chirurgicales. Car, quand il y a une possibilité de voir revoler un oiseau, on ne lésine pas sur les moyens.