OuvertureBoom touristique à Cuba après le dégel avec les USA
Le rapprochement avec les Etats-Unis est à l'origine d'un boom touristique à Cuba, secteur qui a crû cette année quatre fois plus vite que le reste de l'économie.

Une ruelle de La Havane.
Le rapprochement avec les Etats-Unis est à l'origine d'un boom touristique à Cuba. Ce secteur flirte à nouveau avec les taux d'expansion des années 90.
«L'image internationale donnée par le rétablissement des relations (diplomatiques) avec la réouverture d'ambassades crée une perception propice pour visiter Cuba, non seulement pour les Américains, mais pour tous les pays», analyse le professeur José Luis Perello, de la Faculté de tourisme de l'université de La Havane.
Les chiffres officiels confirment son enthousiasme : le secteur a explosé de 15,9% au premier semestre par rapport à l'année précédente, quatre fois la croissance du reste de l'économie (4%).
Les visites d'Américains, facilitées sur décision du président Barack Obama, ont bondi de 50,1%, celles des Français de 28,5%, des Britanniques de 27,5% et des Allemands de 21,7%. Les Canadiens, premiers visiteurs étrangers de l'île, avec un tiers des trois millions de voyageurs enregistrés en 2014, ont été 13,2% de plus au premier semestre.
Boom des années 90
Fidel Castro a ouvert l'île de 11 millions d'habitants au tourisme au début des années 90, en pleine crise économique suite à l'effondrement de l'Union soviétique. Au cours de cette décennie, le secteur a augmenté de 15% par an. Mais après 2001, le rythme a ralenti, pour s'établire à environ 5% par an.
Pour les experts, les chiffres exceptionnels du premier semestre 2015 sont dus sans aucun doute possible au dégel avec les Etats-Unis, annoncé mi-décembre après plus d'un demi-siècle d'hostilité.
«Dans le nouveau contexte international que vit Cuba, le tourisme semble être le secteur qui bénéficiera des meilleurs impacts positifs. Ceux-ci se manifestent déjà cette année», déclare l'économiste cubain Pavel Vidal, de l'université de Cali, en Colombie.
«Ce secteur constituera un pôle d'attraction pour les investissements étrangers et les projets immobiliers, avec l'attente également que le prochain pas de la politique américaine sera la libéralisation totale des voyages» vers l'île, ajoute-t-il.
Les Etats-Unis et Cuba ont rétabli le 20 juillet des relations diplomatiques rompues en janvier 1961. Le 14 août, le secrétaire d'Etat américain, John Kerry, se rendra à La Havane pour hisser la bannière étoilée sur l'ambassade américaine.
Hôtels pleins
A La Havane et dans la station balnéaire de Varadero (à l'est de la capitale), les hôtels affichent complet depuis le début de l'année, du jamais vu.
Cet essor incite les chaînes hôtelières à investir, tandis que les compagnies aériennes et maritimes ont lancé les démarches pour opérer entre les Etats-Unis et l'île communiste, distante d'à peine 160 km de la Floride.
Cet engouement dynamise un secteur essentiel pour les rentrées de devises de ce pays où le tourisme a rapporté 2,6 milliards de dollars (2,55 milliards de francs) en 2014, dans le trio de tête des secteurs les plus rentables de l'économie cubaine, quasiment totalement étatisée.
La chaîne française du bâtiment Bouygues a commencé la rénovation de la «Manzana de Gomez» («Le pâté de maisons de Gomez») afin de transformer un bâtiment en ruine de la Vieille Havane en hôtel cinq étoiles, géré en partenariat par le groupe cubain Gaviota et l'Allemand Kempinski.
Avec 246 suites luxueuses, l'Hôtel Manzana devrait ouvrir ses portes fin 2016 et sera le plus cher de l'île. Bouygues va également construire sur le Malecon, la célèbre avenue en front de mer de La Havane, un Sofitel de 208 chambres de luxe, à côté d'un autre projet mené par des Espagnols.
Restaurants privés
Les «paladares», petits restaurants qui se sont multipliés depuis une timide ouverture à l'entreprise privée concédée par le gouvernement du président Raul Castro, profitent également de ce boom touristique. Et s'adaptent.
«Notre carte s'adapte au goût et à la qualité auxquels les Américains sont habitués», explique ainsi Carlos Marquez, patron et chef du paladar «San Cristobal», qui a servi de nombreux présidents ou encore la chanteuse Beyoncé.