Football: Commentaire: Gianni Infantino en veut toujours plus

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FootballCommentaire: Gianni Infantino en veut toujours plus

Réélu, le président de la FIFA n'entend pas changer de stratégie. Ce sera toujours l'argent d'abord

par
Patrick Oberli
Gianni Infantino est à éa tête de la FIFA depuis 2016.

Gianni Infantino est à éa tête de la FIFA depuis 2016.

AFP

Gianni Infantino qui reste sans voix: ce n'est pas courant. Pourtant hier à Paris, juste après sa réélection par acclamations, le président suisse de la FIFA a eu besoin d'un verre d'eau pour parvenir à remercier sa garde rapprochée. C'était la séquence émotion du 69e Congrès de la FIFA qui s'est tenu juste avant l'ouverture de la Coupe du monde féminine, qui se déroulera elle dès vendredi en France.

Pour le reste, Gianni Infantino a surtout tiré les fruits d'une puissance financière retrouvée, ce qui, mieux que n'importe quel argument, fait le bonheur de la très grande majorité des associations nationales. Le Haut-Valaisan avait fait beaucoup de promesses en 2016, lorsqu'il a été élu. En cherchant hors les marchés historiques du football, il a réussi à les tenir en attirant de nouveaux sponsors qui ont plus que compensé ceux qui s'étaient retirés, lassés par les scandales de corruption.

Promotion de nouvelles compétitions

L'Europe de l'Est, l'Asie avec la locomotive chinoise, les pays du Golfe y ont vu une opportunité pour compléter leurs investissements dans les grands clubs européens et déplacer petit à petit la géopolitique du football. Quand les intérêts convergent, c'est plus facile.

Juste après son élection, Gianni Infantino n'a pas caché qu'il allait poursuivre dans cette voie. Il a bien compris que le football est un précurseur dans le phénomène de mondialisation et la conquête de nouveaux marchés. Il sait aussi mieux que quiconque que son «produit» permet de légitimer par les sentiments – la passion du jeu, l'éducation, des valeurs de partage – une course purement économique. Plus le football a d'adeptes, plus la FIFA et les autres entités qui la composent, peuvent le vendre cher. Du coup, rien n'arrêtera sa course en avant vers la création et la promotion de nouvelles compétitions.

Révolution du marché des transferts

Dans l'immédiat, le Suisse compte essentiellement sur le potentiel du football féminin et sur son bébé, une Coupe du monde des clubs tous les quatre ans, dont l'édition pilote se déroulera en 2021. Une stratégie qui plaît dans le monde du football, car elle est synonyme de moyens accrus jusqu'aux Barbades ou à Guam. Gianni Infantino le sait et il la mènera jusqu'au bout, quitte à passer en force.

Reste que si elle lui permet d'envisager un second mandat plus tranquille, le Suisse ne devrait pas se cacher derrière ses montagnes d'argent. Le football aligne les problèmes, plus compliqués à résoudre que de convaincre des sponsors assoiffés de légitimité. Mais dans ces domaines, le président se révèle plus discret. Mercredi, il a bien promis une révolution du marché des transferts, sordide système qui avilit tous les joueurs, sauf les stars, et qui remplit les poches de nombreux profiteurs.

Discrétion sur le dopage

Une promesse qu'il l'avait déjà faite il y a trois ans, sans que de réels progrès ne soient réalisés. Mais ce n'est pas tout: les chantiers sont aussi énormes, par exemple, dans les manipulations de compétition ou la lutte contre le dopage, sujets sur lesquels les dirigeants du football cultivent la discrétion.

À Paris, Gianni Infantino s'est encore réjoui d'une «crédibilité retrouvée», du fait que la FIFA n'était plus «toxique» et que l'institution ne soit plus un synonyme de «corruption». Un discours qui a assurément plu à une assemblée de convaincus. Mais qui peut apparaître comme un déni de réalité.

Le passé est encore présent

Il n'y a qu'à observer ce qui se passe dans les Confédérations pour voir que le passé est encore présent: suspension récente d'un haut dirigeant qui s'était rempli les poches en Océanie, trafic d'influences et pressions dans des élections en Asie, accusation de corruption du président en Afrique.

Certes ce n'est pas directement la FIFA. Mais c'est justement pour avoir oublié que «les étages du dessous étaient de sa responsabilité» que la FIFA de l'ère Blatter est tombée.

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