Procès MediasetCondamné en appel, Silvio Berlusconi n'ira pourtant pas en prison
La Cour d'Appel de Milan a confirmé une peine de prison d'un an et une interdiction d'exercice de toute fonction publique contre Silvio Berlusconi, pour fraude fiscale dans l'affaire Mediaset. L'exécution de la sentence reste cependant peu probable.

Silvio Berlusconi, condamné pour fraude fiscale dans le procès Mediaset.
La Cour «déclare inadmissible le recours en appel» des accusés dont l'ex-Premier ministre et «confirme la peine prononcée le 26 octobre 2012» en première instance, a indiqué la présidente.
A l'automne dernier, le tribunal de Milan avait prononcé une peine de quatre ans, réduite immédiatement à un an en vertu d'une amnistie, et avait interdit au Cavaliere d'exercer une fonction publique pendant cinq ans.
L'un de ses avocats, Niccolo Ghedini, a aussitôt critiqué une sentence dictée par des «préjugés» des magistrats de Milan à l'encontre de l'ex-chef de gouvernement.
Les proches de M. Berlusconi sont immédiatement montés au créneau pour dénoncer, comme Renato Schifani, chef de file de son parti, le Peuple de la liberté (PDL), au Sénat, «une persécution judiciaire contre un dirigeant qui a recueilli (aux dernières élections législatives de fin février, ndlr) les suffrages de 10 millions d'électeurs».
Sur la même ligne de dénonciation de juges «politisés», son homologue à la Chambre Renato Brunetta a estimé que «par chance la grande majorité des citoyens comprennent qu'une partie de la magistrature n'a aucune crédibilité».
Recours en cassation
L'application de la sentence est suspendue à un probable recours en Cassation des avocats du Cavaliere, âgé de 76 ans. Elle dépend aussi d'un verdict attendu de la Cour constitutionnelle concernant un conflit entre la présidence du Conseil et le tribunal de Milan.
Ce dernier avait refusé en mars 2010 d'excuser l'absence de M. Berlusconi, justifiée alors par un conseil des ministres alors qu'il était Premier ministre. La Cour devrait prendre sa décision en juin et au cas où elle donnerait raison au Cavaliere, la procédure serait annulée.
M. Ghedini a reproché aux juges d'appel de Milan de n'avoir pas voulu attendre cette décision, mais s'est dit confiant dans le jugement de Cassation et dans la décision finale de la Cour constitutionnelle.
Prescription
Selon les médias, de toutes façons, les accusations de fraude fiscale à l'encontre de M. Berlusconi seront prescrites entre la fin 2013 et début 2014.
Tout cela rend donc hautement improbable une mise derrière les barreaux de M. Berlusconi, d'autant que ce dernier serait de toute façon dispensé d'exécuter cette peine en raison de son âge.
Dans ce procès, Silvio Berlusconi était accusé d'avoir artificiellement «gonflé» le prix des droits de diffusion de films, achetés via des sociétés écrans lui appartenant, au moment de leur revente à son empire audiovisuel Mediaset.
Le groupe aurait ainsi constitué des caisses noires à l'étranger et réduit ses bénéfices en Italie pour payer moins d'impôts. Le manque à gagner pour le fisc italien a été évalué à 7 millions d'euros.
Dans son réquisitoire le 1er mars dernier, la procureure Laura Bertolé avait rejeté l'argument du Cavaliere, qui avait dit s'être retiré de la gestion de son groupe de médias. A l'inverse, M. Berlusconi s'est toujours dit «totalement étranger aux faits» qui lui ont été reprochés.
Avance de 10 millions au fisc
La Cour d'appel a par ailleurs confirmé l'acquittement du président de Mediaset Fedele Confalonieri et de deux autres personnes, ainsi que la condamnation à trois ans de réclusion contre le producteur américain Frank Agrama.
Celui-ci ainsi que M. Berlusconi et deux autres personnes condamnées devront verser solidairement 10 millions d'euros d'avance au fisc et régler les frais judiciaires.
M. Berlusconi est par ailleurs poursuivi dans l'affaire du «Rubygate», dans laquelle il est accusé notamment d'avoir rémunéré une mineure marocaine surnommée Ruby, de son vrai nom Karima El Mahroug, en échange de prestations sexuelles entre janvier et mai 2010. La prochaine audience dans ce procès a été fixée à lundi.
La saga judiciaire de Berlusconi
Silvio Berlusconi, contre lequel la Cour d'Appel a confirmé une peine de prison pour fraude fiscale, a eu de nombreux démêlés judiciaires depuis son entrée dans la vie politique en 1994. Mais il n'a jamais été condamné de manière définitive.
- 1995 : faux en bilan. Accusé d'avoir financé avec une caisse noire l'achat du joueur de football Gianluigi Lentini pour son club, le Milan AC, il bénéficie de la prescription en novembre 2002, grâce à une loi dépénalisant la falsification de bilan, votée par sa majorité au Parlement.
- 1995 : accusé de fraude fiscale dans l'acquisition d'une luxueuse villa, à Macherio, près de Milan, il bénéficie de la prescription.
- 1995 : accusé de faux en bilan au moment de l'acquisition de la société cinématographique Medusa, Silvio Berlusconi est condamné à 16 mois de prison en première instance en décembre 1997. Il est acquitté en appel en février 2000, décision confirmée en cassation en octobre 2001.
- 1995 : accusé de financement illégal du Parti socialiste italien (PSI) à travers une société off-shore, la All Iberian, il est condamné en première instance à 28 mois de prison en juillet 1998. Acquitté pour prescription en appel en octobre 1999, confirmé en cassation en 2000.
- 1996: accusé de faux en bilan dans un autre volet de l'affaire All Iberian, il est acquitté en septembre 2005.
- 1998 : accusé de corruption de juges pour empêcher l'achat de la société de produits agroalimentaires publique SME en 1985 par l'industriel Carlo De Benedetti. Silvio Berlusconi est définitivement acquitté par la Cour de cassation en octobre 2007.
- 26 octobre 2012 : accusé de fraude fiscale dans l'affaire Mediaset, nom de son empire audiovisuel, il est condamné à quatre ans de prison pour fraude fiscale, peine immédiatement ramenée de facto à un grâce à une amnistie. Il est également condamné à cinq d'interdiction d'exercer toute fonction publique.
- 8 mai 2013: la Cour d'Appel confirme intégralement la peine prononcée dans l'affaire Mediaset. Le Cavaliere a encore la possibilité d'aller en Cassation, une procédure suspensive de la peine en Italie.
Silvio Berlusconi est par ailleurs poursuivi dans une autre affaire:
- Rubygate (prostitution de mineure et abus de pouvoir). Il est accusé d'avoir rémunéré Ruby, de son vrai nom Karima El Mahroug, mineure marocaine, en échange de prestations sexuelles entre janvier et mai 2010.
Il lui est aussi reproché d'avoir fait pression sur la police de Milan afin de la faire libérer après son interpellation pour un vol fin mai 2010. Après maints reports, la prochaine audience dans ce procès a été fixée au 13 mai prochain.