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JusticeDes biens de la fille du président ouzbek saisis en France

Gulnara Karimova, la fille du président ouzbek qui vivait à Genève, est poursuivie en France pour des faits de corruption. Une enquête a aussi été lancée en Suisse.

La justice française poursuit Goulnara Karimova, domiciliée en Suisse.

La justice française poursuit Goulnara Karimova, domiciliée en Suisse.

Archives, Keystone

Des biens immobiliers appartenant à la fille du président ouzbek, Goulnara Karimova, ou à son entourage, ont été saisis par la justice française, qui enquête depuis 2013 sur des faits de corruption, a appris mardi l'AFP de sources proches de l'enquête.

Après avoir été toute puissante dans l'ex-République soviétique, jusqu'à être considérée comme un possible successeur de son père Islam Karimov, Goulnara Karimova, 42 ans, est tombée en disgrâce. Elle a été assignée à résidence et la justice ouzbèke a engagé des poursuites à son encontre à l'automne dernier.

Un appartement parisien, une villa sur la Côte d'Azur et un château proche de la capitale française ont fait l'objet d'une saisie pénale, suite à une décision d'un juge qui enquête sur des faits présumés de «blanchiment en bande organisée» et de «corruption d'agent étranger», a-t-on précisé de même source. Ces biens avaient été acquis entre 2009 et 2011, pour un total d'environ 50 millions d'euros, par des sociétés civiles immobilières.

Enrichissement personnel

Des investigations ont montré que derrière ces sociétés se trouvent Goulnara et son compagnon, le chanteur pop Roustam Madumarov, a expliqué l'une des sources.

Les enquêteurs sont convaincus que ces fonds sont le fruit «de corruption intervenue dans le cadre de l'entrée sur le marché des télécoms ouzbèkes de sociétés de droit suédois, russe et néerlandais».

Ces pots-de-vin présumés, versés en échange de l'octroi de licences, auraient notamment transité par une société offshore à Gibraltar. Les enquêteurs estiment qu'ils ont «contribué à enrichir Mme Karimova à hauteur de 324 millions de dollars de décembre 2007 à novembre 2010», a détaillé l'une des sources.

Une partie de ces fonds semble avoir été utilisée pour acquérir le château de Groussay, à l'ouest de Paris, pour quelque 28 millions d'euros, une villa sur la Côte d'Azur pour 2,4 millions d'euros et un appartement dans le XVIe arrondissement parisien pour 20 millions d'euros, a expliqué l'une des sources.

L'acquisition de ce bien, en 2009, avait été précédée, deux ans plus tôt, d'une première cession pour 30 millions d'euros. La décote de quelque 10 millions d'euros intrigue les enquêteurs qui se demandent si elle ne dissimule pas du blanchiment.

Procédures en Suisse

Des procédures ont aussi été engagées en Suisse, en Suède et aux Pays-Bas. En Suisse, où elle a été la représentante de son pays auprès de l'ONU et où elle a acquis une villa à Genève, des fonds liés à Goulnara Karimova ont été bloqués.

En Suède, le parquet a accusé en mars l'opérateur local TeliaSonera d'avoir «soudoyé une partie de l'élite politique en Ouzbékistan» pour des marchés.

Avant de tomber en disgrâce fin 2013, Goulnara Karimova, diplômée de Harvard, avait lancé une ligne cosmétique et s'était essayée à la chanson. Son père dirige d'une main de fer l'Ouzbékistan depuis plus de vingt ans.

Sollicité par l'AFP, Me Eric Moutet, l'avocat de l'association anticorruption Sherpa, partie civile dans ce dossier, s'est félicité que "les actions judiciaires relatives aux biens mal acquis puissent prendre désormais un tour universel".

La justice française mène plusieurs autres enquêtes dites de "biens mal acquis", qui concernent le patrimoine en France de chefs d'Etat et de responsables d'Afrique ou du monde arabe.

(AFP)

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