FRANCEDes milliers d'oiseaux marins meurent d'épuisement
Les ornithologues font état d'une hécatombe «considérable», principalement imputable à l'épuisement des oiseaux après une succession de tempêtes.
Plusieurs milliers d'oiseaux marins morts ont été trouvés ces derniers jours sur le littoral atlantique, une hécatombe «considérable» selon des centres de soins, imputable principalement à l'épuisement des oiseaux après une succession de tempêtes, et marginalement, à la pollution de probables dégazages.
Sur les plages, des Pyrénées-Atlantiques à la Bretagne, un minimum de 5000 oiseaux morts ont été recensés, selon les données et estimations provisoires lundi de la LPO, a expliqué Nicolas Gendre, ornithologue à la Ligue de protection des oiseaux (LPO) de Charente-Maritime.
Les macareux moines les plus touchés
«Le phénomène avait commencé il y a une quinzaine de jours, mais a connu une montée en puissance ces derniers jours et ce week-end», a souligné Olivier le Gall, président de la LPO d'Aquitaine.
Le chiffre a enflé avec les données fournies par des bénévoles ou promeneurs ce week-end. Les macareux moines (fratercula artica) sont l'espèce la plus touchée, représentant au moins 50% des cadavres recensés selon les départements.
Ensuite viennent les guillemots, puis, en moindre quantité, des fous de Bassan, des petits pingouins Torda, des mouettes tridactyles.
«C'est salaud, mais c'est classique»
«C'est une quantité considérable, on est débordé, mais par un phénomène de mortalité presque naturelle, seulement cette fois il est visible» à cause des tempêtes amenant ces cadavres sur les plages, selon Jérôme Pensu, responsable du Centre de sauvegarde des Landes, où environ un millier d'oiseaux morts ont été signalés.
Partout les LPO estiment que la tempête est la cause principale des morts, même si quelques oiseaux ont été mazoutés, ou achevés par des boulettes, «presque un épiphénomène. A chaque tempête il y a toujours des gens qui en profitent pour dégazer au large. C'est salaud, mais c'est assez classique», a estimé Jérome Pensu.
Boulettes d'hydrocarbures
Plusieurs communes du littoral français touché par la pollution (Loire-Atlantique, Vendée, Morbihan) ont déposé plainte ou s'apprêtaient à la faire après l'arrivée de boulettes d'hydrocarbures sur leurs plages, privilégiant l'hypothèse d'un dégazage.
Lundi soir, le ministre de l'Ecologie, Philippe Martin, a dit que les communes les plus touchées pourraient être aidées financièrement même si le plan Polmar n'a pas été déclenché. Concernant, l'origine de la pollution, Philippe Martin a précisé attendre les résultats des analyses menées par le Centre de documentation et d'expérimentation sur les pollutions en mer (Cedre), espérés mardi au plus tard.
La maire du Croisic (Loire-Atlantique), Michèle Quellard, a porté plainte dès vendredi après l'arrivée de ces boulettes. Le même phénomène a été signalé dans les départements voisins du Morbihan et de la Vendée.Selon la préfecture du Morbihan, «les hydrocarbures recouvrent environ 3% du littoral, plages, galets et rochers concernés».
Nettoyage à la charge des communes
Ce fioul devant être manipulé avec un équipement approprié, plusieurs mairies ont interdit l'accès à leurs plages souillées. Le plan Polmar n'ayant pas été déclenché, le nettoyage des plages reste donc à la charge des communes.
A Saint-Brévin-les-Pins (Loire-Atlantique), commune qui devait aussi porter plainte, la trentaine de nettoyeurs estimaient devoir être à l'œuvre toute la semaine.
Mort d'épuisement ou de faim
Sur les plages, le nombre de cadavres d'oiseaux a néanmoins marqué les esprits, s'agissant surtout du «perroquet de mer», le macareux, qui habituellement hiverne bien au large. «Ce sont des oiseaux assez robustes, faits pour vivre au large, mais vu la succession des tempêtes et de la houle, ils sont plus qu'affaiblis, ne peuvent plus pêcher facilement pour se nourrir, dérivent, meurent épuisés ou de faim», a dit Matthieu Sannier, de la LPO-Gironde.
Dimanche, dans les Landes, un seul bénévole a ainsi ramassé plus de 120 oiseaux sur trois plages sur une frange de 10 km, Vieux-Boucau, Messanges et Moliets: 71 macareux, 54 guillemots, deux pingouins et une mouette pygmée, selon le centre de soins Hegalaldia d'Ustaritz (Pyrénées-Atlantiques).
Pratiquement plus de muscles
Le long du littoral atlantique, environ 350 oiseaux récupérés vivants étaient traités en centres de soins, a souligné Nicolas Gendre, mais «beaucoup meurent, sont trop affaiblis, avec pratiquement plus de muscles sur le bréchet», la crête sternale où s'insèrent les puissants muscles pectoraux nécessaires au vol.
A Nantes par exemple, sur 300 oiseaux amenés au Centre Oniris, seuls cinq ont pu être soignés, a dit lundi Michael Potard, coordinateur LPO-Pays de la Loire.