Ski alpinDeux «Streif» au menu de Kitzbühel
Le scénario n’est pas nouveau mais ne s’était plus produit depuis 2004: deux descentes sont planifiées sur la terrible descente tyrolienne, vendredi et samedi (11h30). Beat Feuz, «Poulidor» de la Streif, rêve d’enfin soulever un chamois doré.
- par
- Sylvain Bolt, Kitzbühel

Beat Feuz s’élancera sur une Streif moins verglacée que les saisons précédentes. Et il aura droit à deux tentatives pour cette édition 2021 disputée à huis clos.
Cette saison, les slalomeuses ont disputé deux épreuves à Levi (Finlande) et les slalomeurs à Flachau (Autriche). Les hommes ont eu leur double dose de géant à Santa Caterina (Italie) et à Adelboden. Tandis que les femmes ont disputé deux géants à Courchevel et deux descentes à Val d’Isère. Ces doubles rations ont été imposées par le contexte sanitaire, qui a forcé la FIS à minimiser autant que possible le mélange de spécialistes de disciplines différentes dans une même station.
Le malheur des uns faisant le bonheur des autres, Kitzbühel a profité à sa manière de l’annulation des épreuves du Lauberhorn le week-end passé pour récupérer la descente de Wengen, contre un slalom qu’elle a dû céder à la station autrichienne de Flachau. Vendredi (11h30) et samedi (11h30), deux descentes auront lieu sur la mythique Streif de Kitzbühel.

L’aire d’arrivée de Kitzbühel sera inhabituellement calme cette année.
Ce n’est pas une première, mais ce n’était plus arrivé depuis 2004 (victoire de Lasse Kjus puis de Stephan Eberharter). Pirmin Zurbriggen (1985) et Franz Heinzer (1992) ont eux doublement brillé sur la piste autrichienne. Plus proche de nous, c’est Didier Cuche qui s’était imposé lors d’une descente raccourcie disputée en deux manches en 1998, avant de terminer deuxième le lendemain derrière l’Italien Kristian Ghedina.
Une descente de vendredi au rabais?
«On en a discuté avec mes coéquipiers en arrivant à Kitzbühel. Est-ce que le vainqueur de la première descente ici sera le vainqueur de Wengen?» s’est marré Beat Feuz en conférence de presse après son premier entraînement sur la Streif. Pour lui pas de doute: pour être considéré comme vainqueur de la Mecque de la descente, le lauréat de vendredi doit pouvoir inscrire son nom sur les célèbres télécabines.
Ce sera le cas et le vainqueur de la première descente aura droit aux mêmes privilèges, si on excepte un prize money sensiblement revu à la baisse (56’160 francs pour le vainqueur de vendredi contre 87’480 pour le lauréat de la «vraie» descente de samedi). Même le vainqueur du super-G de dimanche empoche un pactole plus copieux (64’800) que l’acte I sur la Streif de vendredi.
«Avoir deux tentatives ne change pas grand-chose car ici, tu ne peux pas skier trois fois pareil sur certains passages clés»
À l’aise d’entrée lors du premier entraînement (quatrième) mais un peu moins lors du deuxième essai (quatorzième), Beat Feuz va bénéficier d’une double chance de briser une série (quatre fois deuxième) sur le serpentin gelé autrichien, que les chutes de neige du début de semaine accompagnées par la chaleur de ces derniers jours ont rendu moins terrifiant selon les skieurs.
«Avoir deux tentatives ne change pas grand-chose car ici, tu ne peux pas skier trois fois pareil sur certains passages clés, a expliqué le Bernois. Tu arrives chaque fois différemment dans le virage, avec une vitesse différente, ce qui influence la prochaine courbe. Il ne faut pas tout risquer sur le schuss final comme je l’ai fait en 2017 en chutant dans la traverse, mais pas trop contrôler non plus son ski comme je l’ai fait l’année passée. Vendredi et samedi, la Streif sera moins glacée que l’hiver dernier en raison de la chaleur. Le ski accroche bien la neige.»
Moins traumatisante physiquement
Le Français Matthieu Bailet, dixième jeudi du dernier entraînement, y voit là un avantage. «Pour les skieurs qui disputent trois épreuves en trois jours, cette neige accrocheuse est moins traumatisante physiquement que de la pure glace. Après, c’est notre job de savoir gérer. J’ai bouffé des mois de préparation physique tout ce printemps et tout cet été et encore ces dernières semaines, donc physiquement je suis prêt. Je n’arriverai pas fatigué dimanche, c’est certain.»
«Il n’y pas d’éventuelle tactique au départ, il faut tout donner dès vendredi, surtout sur une piste comme la Streif.»
Pour le «rookie» Marco Odermatt, qui va s’élancer pour la deuxième fois seulement sur la terrible descente (24e en 2019), la répétition de l’effort s’avère bénéfique. «C’est toujours plus facile quand on a déjà skié sur un tracé, car c’est totalement différent des images de la télévision, a relevé le skieur de Nidwald. Le fait de disputer deux épreuves identiques sur une même piste permet de prendre des repères lors du premier essai et de se lâcher au deuxième».
Odermatt parle en connaissance de cause, lui qui s’était classé troisième du géant de Santa Caterina avant de s’y imposer lors de la deuxième tentative. Pas question pourtant pour «Odi» de calculer lors de la première descente: «non, il n’y pas d’éventuelle tactique au départ, il faut tout donner dès vendredi, surtout sur une piste comme la Streif. Il faudra bien récupérer vendredi soir, même si ce tracé est moins exigeant physiquement que Bormio par exemple.»