BerneDroit de visite: une sanction pénale pour les parents récalcitrants
Le Conseil national a accepté une motion visant à sanctionner pénalement le parent qui ne respecte pas le droit de visite.
- par
- Eric Felley

Dans la plupart des cas, ce sont les pères qui se retrouvent impuissants à faire valoir leur droit de visite face à leur ancien conjoint.
«Le droit pénal protège le parent qui a la garde de l’enfant. À l’inverse, le droit pénal ne protège nullement le parent qui bénéficie uniquement d’un droit aux relations personnelles, communément appelé droit de visite.
Cette situation crée une inégalité de traitement grossière entre les deux parents divorcés». C’est sur ce constat que le conseiller national Philippe Nantermod (PLR/VS) a défendu mardi au Conseil national sa motion visant à rétablir l’équilibre des forces entre parents divorcés. Contre l’avis du Conseil fédéral et de la gauche, elle a été acceptée par 100 voix à 78.
«Le but de la motion n’est pas d’envoyer les parents en prison, a-t-il bien précisé, ni de les faire poursuivre par un procureur. Mais les cas malheureusement connus et documentés d’aliénation parentale, de refus de collaboration sont aussi la conséquence de l’absence systémique du concours de l’autorité pour le respect du droit de visite. Le parent gardien ne doit pas pouvoir le violer sciemment et impunément».
L’entrave fautive à l’exercice du droit de visite doit être punie
La notion de l’intérêt de l’enfant est au centre de ce débat. Dans sa motion, le Valaisan a rappelé que le droit à des relations personnelles avec le parent, gardien ou non, est un droit fondamental de l’enfant: «Au même titre que l’enlèvement de mineur par le parent non gardien est poursuivi pénalement, l’entrave fautive à l’exercice du droit de visite doit être punie».
Pour le Conseil fédéral et la cheffe du Département de justice et police Karin Keller Sutter, l’introduction d’une menace pénale fait craindre que «la sanction infligée à l’un des parents affecte indirectement l’enfant. Le droit en vigueur permet déjà d’imposer le respect de règles concrètes et de fixer, exceptionnellement, une peine en cas de violation de celles-ci». Elle a cité en exemple le cas où le détenteur de l’autorité parentale se voit contraint de remettre l’enfant à l’autre parent à un moment et à un lieu précis «avec la menace d’une amende en cas de refus». Pour le Conseil fédéral: «Pénaliser l’empêchement d’exercer le droit de visite ne peut guère servir le bien de l’enfant, et pourrait même se révéler contre-productif.»
Satisfaction chez les défenseurs de la condition paternelle
Mais le Conseil national ne l’a pas suivie. Il veut envoyer un signal aux parents récalcitrants qui profitent de l’autorité parentale pour empêcher l’autre parent de voir ses enfants. Pour Julien Dura, porte-parole du Mouvement de la condition paternelle Vaud, cette décision était très attendue: «L’autorité parentale conjointe est entrée en vigueur en 2014, mais nous constatons que dans bien des cas, les décisions concernant la garde de l’enfant ne sont pas respectées et le parent non gardien est impuissant pour agir. Comme le parent gardien est la plupart du temps la mère, ce sont les pères qui pâtissent de cette situation. L’adoption d’une sanction pénale en cas de non-respect du droit aux relations personnelles remet les parents sur un pied d’égalité. Mais il faudra que les magistrats l’appliquent».
La motion parle du principe d’une sanction pénale, sans définir à ce stade quelles sont les peines prévues. Le Conseil des États doit encore se prononcer.