Commentaire: Elon Musk, le dérapage de trop

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CommentaireElon Musk, le dérapage de trop

Trop de pouvoir, trop d’argent, trop isolé et sens moral aux fraises, le patron de Twitter s’est définitivement déshonoré à nos yeux. 

par
Jean-Charles Canet
Elon Musk lourdement protégé mais sans garde-fou sur Twitter.

Elon Musk lourdement protégé mais sans garde-fou sur Twitter.

Getty Images via AFP

On l’a dit, l’échange entre Elon Musk et un employé islandais lourdement handicapé et viré de Twitter sans qu’il en ait été informé était surréaliste. Un certain Haraldur Thorleifsson a publiquement demandé sur Twitter dernièrement s’il avait été licencié ou non du réseau social en se basant sur le seul fait qu’il ne parvenait plus accéder à son compte professionnel.

Affirmant n’avoir pu obtenir des «ressources humaines» ni confirmation ni infirmation, il a posé publiquement  la question à Elon Musk en espérant que, par effet d’amplification, le grand patron daigne lui répondre sur la ligne divine, Twitter toujours. 

Ce dernier l’a fait de la pire des manières, en confirmant non seulement qu’il faisait partie du convoi des charrettes constitué depuis sa prise de pouvoir à la tête du réseau social, mais encore en accusant explicitement et sans fondements Haraldur d’être un feignant qui s’abrite derrière son handicap pour lustrer son poil dans la main et donc, implicitement, qu’il mérite d’autant plus d‘être remercié. Grave erreur, Haraldur n’est pas de la race des agneaux que l’on sacrifie avec une telle légèreté.

Car Mr. Thorleifsson est un ex-entrepreneur indépendant qui avait vendu sa firme de design réputée à Twitter, tout en rejoignant en tant qu’employé le groupe acheteur. Un homme sans soucis financiers qui a préféré voir son gain en capital transformé en revenu salarial, afin qu’il soit plus lourdement taxé. Un citoyen modèle en quelque sorte, aimant, altruiste, généreux, prophète en son pays, élu personnalité de l’année en 2022 par les quatre principaux médias islandais. Un homme qui mérite son salaire. Une supputation, certes, mais qu’Elon Musk a été contraint de valider.  

Rétropédalage donc. Elon Musk a effacé le tweet immonde dans lequel il avançait les plus graves supputations mais aussi a présenté des excuses embarrassées. Embarrassées dans le sens «Mon petit Halli. Désolé, j’ai été mal informé, le poste est considéré comme étant toujours le tien, viens donc boire un verre à la maison». On ne sait pas encore si «Halli» acceptera une offre qu’il peut refuser. Il semble avoir adopté la tactique de laisser Elon baigner dans son jus, en prenant tout le temps nécessaire pour prendre sa décision. Juste retour des choses.

Tout simplement inexcusable

Avec ce dérapage qui n’est ni le premier ni le dernier, on en prend le pari, Elon Musk a pris une méchante baffe. Entièrement responsable de sa bévue. Il est tout simplement inexcusable. Il ne mérite sans doute pas le titre de «pire être humain de l’année» décerné par Ethan Zuckerman, un célèbre activiste technophile américain, car une seule  place et trop de prétendants. Il mérite néanmoins d’être considéré comme un homme dangereux, trop riche, trop puissant et doté d’un sens moral gravement déficient.

Alors que les cercles concentriques poursuivent leur course, Musk a repris ses babils business as usual sur son compte Twitter oscillants entre autocongratulation, pensées hermétiques et exercices feints d’autodérision. Naguère, on trouvait cela amusant à défaut de sympathique.      

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