ÉditorialEn Valais, les chasseurs ont déjà gagné
À une semaine de l’issue de la campagne sur la loi sur la chasse, les nemrods valaisans ont rejoint les sommets pour tirer des milliers de bêtes. Le résultat du vote valaisan ne fait aucun doute.
- par
- Eric Felley

Le chamois paie chaque année le plus lourd tribut à la chasse en Valais. Le Service de la chasse estime à 20 000 le nombre de chamois dans les Alpes valaisannes.
Cette année, le premier jour de l’automne coïncide avec l’ouverture de la chasse en Valais. Quelque 2700 chasseurs – dont le conseiller d’État Christophe Darbellay - vont sillonner leur coin de prédilection et faire de la «régulation» de la faune. L’année dernière, environ 1500 chevreuils, 2000 cerfs, 2600 chamois, 350 bouquetins, 170 tétras-lyres ou encore 65 lagopèdes sont tombés sous les balles des fusils valaisans.
Tout est dans le vocabulaire, de nos jours les chasseurs ne tuent plus, ils régulent ou prélèvent des animaux pour le bien de la biodiversité et la sauvegarde des forêts protectrices. Cette reprise de la chasse coïncide surtout avec la dernière semaine de campagne au sujet de la loi sur la chasse et de la protection des espèces. À cette occasion les chasseurs ont adopté largement le vocabulaire de leurs adversaires et même la couleur verte des écologistes pour leurs affiches.
Il est parfois difficile de distinguer entre les deux camps, lesquels sont finalement les meilleurs amis de la nature et les vrais défenseurs de la biodiversité. Cette dernière diminue d’année en année, pas forcément à cause de la chasse, mais partout où l’homme étend son empreinte et dérange la vie sauvage. Cet été, à cause de l’épidémie et de l’impossibilité de voyager, cette nature a été surtout mise sous pression par les randonneurs, pique-niqueurs, vététistes et autres trailers accourus en nombre en montagne.
Durant la campagne, on a vu beaucoup de moutons égorgés
Il ne fait aucun doute que la loi sur la chasse sera plébiscitée dans le canton, peut-être à 80% des votants(e)s. La campagne a toutefois été émaillée par des révélations sur le braconnage du lynx par un garde-faune ou sur une autorisation contestée de tir du loup par le Tribunal cantonal valaisan. Mais on a vu surtout beaucoup de moutons mutilés et égorgés. À certains endroits, le loup a joué le jeu de ses adversaires à son corps défendant.
Malgré les polémiques, l’assurance des autorités valaisannes ne vacille guère face aux arguments de certains biologistes. La «malveillance» des médias hors canton ne saurait non plus ébranler leurs convictions. Pour les protecteurs de la nature, la tâche est rude, car leur opposition finit souvent par renforcer la cause adverse. C’est un jeu subtil qui se joue ici. En société, il est difficile d’afficher son opposition à cette loi.
Il reste que sur le plan suisse, la loi sur la chasse risque d’être refusée. Une nouvelle fois, comme avec la Lex Weber ou l’aménagement du territoire, ce résultat viendrait nourrir le particularisme valaisan d’une nouvelle injustice. Mais cela permettra de garder un thème très porteur. Le loup est devenu un animal politique, dont plus personne ne pourrait se passer. C’est pour cela qu’il faudrait continuer à le protéger…