Vaud: Entre 4 ans et 5 ans requis contre les quatre abuseurs de Gaëlle

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VaudEntre 4 ans et 5 ans requis contre les quatre abuseurs de Gaëlle

Le procureur a requis mercredi des peines évidemment ferme contre les quatre agresseurs de la jeune Valaisanne, retrouvée morte dans le lac à Vevey il y a un an. Verdict en fin de journée.

Evelyne Emeri
par
Evelyne Emeri
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Le corps sans vie de Gaëlle flottait non loin de la berge du Quai Ernest-Ansermet à Vevey (VD), près de la Buvette des bains publics. Il a été aperçu par une promeneuse le samedi 10 mars 2018 au matin, le lendemain de la soirée passée avec les quatre migrants.

Le corps sans vie de Gaëlle flottait non loin de la berge du Quai Ernest-Ansermet à Vevey (VD), près de la Buvette des bains publics. Il a été aperçu par une promeneuse le samedi 10 mars 2018 au matin, le lendemain de la soirée passée avec les quatre migrants.

Sébastien Anex/DR
Le procès des quatre coprévenus s'est tenu le 26 et le 27 mars 2019. Ici, l'avocat de la famille de Gaëlle, Me Astyanax Peca, peu avant l'ouverture des débats de première instance, à Renens.

Le procès des quatre coprévenus s'est tenu le 26 et le 27 mars 2019. Ici, l'avocat de la famille de Gaëlle, Me Astyanax Peca, peu avant l'ouverture des débats de première instance, à Renens.

Sébastien Anex
Le procureur Stephan Johner soutient que les quatre abuseurs de la jeune femme savent très bien ce qu'il s'est passé et quels ont été ses derniers instants avant de basculer dans le lac: «Ils préfèrent taire la vérité plutôt que de soulager sa famille.»

Le procureur Stephan Johner soutient que les quatre abuseurs de la jeune femme savent très bien ce qu'il s'est passé et quels ont été ses derniers instants avant de basculer dans le lac: «Ils préfèrent taire la vérité plutôt que de soulager sa famille.»

Jean-Guy Python

On s'attendait à un réquisitoire massue. On l'a eu. Le procureur Stephan Johner, particulièrement remonté contre les quatre coprévenus qui le baladent depuis plus d'un an, allant de contradictions en contradictions, n'a pas mâché ses mots. Mardi, durant la première journée du procès, les migrants maghrébins ont tout essayé pour se dédouaner et se charger mutuellement – se disculper aussi –. Avec deux objectifs clairs. D'une part, prouver que Gaëlle, 27 ans, était en pleine possession de ses moyens au moment des faits et bénéficiait de son plein discernement; d'autre part, et par-dessus tout, qu'elle était consentante lors des relations sexuelles avec le groupe de requérants d'asile de l'Établissement vaudois d'accueil des migrants (EVAM), demandeuse et allumeuse.

«La vérité restera entre eux et leur conscience»

Le Ministère public a, lui, une toute appréciation. Il reproche aux quatre coaccusés d'avoir abusé lâchement de la jeune femme l'un après l'autre et de l'avoir abandonnée seule au bord du lac, alors qu'elle était en surdose d'alcool et de médicaments et sous l'influence de cannabis. Son corps sans vie a été retrouvé le samedi 10 mars 2018 dans les eaux glacées du Léman, au lendemain de la soirée passée avec les requérants de l'EVAM, près de la Buvette des bains publics à Vevey. «J'ai une conviction: ils savent très bien ce qui s'est passé. La vérité restera entre eux et leur conscience. Est-ce des meurtriers? Non. Des menteurs? C'est certain. Un suicide? Sa psychologue, vue le jour même, l'avait trouvée motivée. Un accident? Cela signifie qu'elle était dans un état tellement misérable qu'elle n'a pas été capable de s'accrocher aux rochers. Elle n'a pas une seule lésion qui indique qu'elle se serait blessée en chutant», note le procureur Johner.

«Honte à vous, Messieurs!»

Plus loin: «Honte à vous, Messieurs! Gaëlle n'est jamais restée seule. Ils seraient partis dix minutes au moment fatidique. C'est là leur lâcheté suprême. Ce n'était pas le but qu'elle décède. Mais quand elle passe à l'eau, ils ont peur. Dès 19h, elle est extrêmement alcoolisée. Elle a déjà ingurgité ses médicaments (ndlr. anxiolytiques en dose thérapeutique et antidépresseurs dans la fourchette toxique). La vidéosurveillance nous montre des images tristes et pathétiques. Qui peut croire qu'on peut passer sur une fille dans cet état-là, même aguicheuse? Personne. Aujourd'hui, ils ne peuvent plus nier. Il y a l'ADN, sauf pour x (ndlr. l'Algérien de 29 ans considéré comme le meneur). X est plus malin, il sait mieux se servir d'un préservatif. Il a rameuté tout le monde. Il a eu de la drogue gratuite en offrant du sexe, la jetant en pâture. C'est abject. Est-ce une faute morale ou une infraction pénale? Elle avait 2 pour mille dans le sang et l'urine...»

«Tirer un coup, c'était ça qui comptait»

«Gaëlle est seule, pas bien, elle se scarifie, son ex vient de l'éconduire. Tous ont compris qu'elle était complètement bourrée. Le seul à offrir un témoignage neutre parce qu'il a refusé de coucher avec elle, c'est le copain kosovar (ndlr. qui n'est pas renvoyé) qui a été là le moins longtemps. Il raconte qu'elle était très ivre, qu'elle avait l'air au bout de sa vie et qu'elle disait «fucking live». Qu'elle était triste, mal, soûle, hyperdroguée. Elle avait besoin de contacts humains, poursuit le représentant du Parquet vaudois, Mais tout le monde s'en fiche de Gaëlle, c'est l'objet. On la laisse par terre. Tirer un coup, c'était ça qui comptait. Leur culpabilité est très lourde. Ils n'ont eu aucun respect. Ils savent et ils ne feront pas ce cadeau aux parents de dire ce qu'il s'est vraiment passé. Leur courage s'arrête à baiser. Je n'aurai aucune clémence. Il n'y a rien à décharge.»

Commission en commun retenue

Le procureur Johner a ainsi requis des peines allant de 4 à 5 ans de prison ferme selon les degrés de culpabilité et les antécédents respectifs des coprévenus (4 ans, 4 ans et demi et deux fois 5 ans). Pour actes d'ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement ou de résistance et, en aggravation, pour atteinte à l'intégrité sexuelle commise en commun (ndlr. tournante). Il renonce, en revanche, à l'omission de prêter secours, ne disposant d'aucune preuve tangible face au mutisme des accusés sur les derniers instants de Gaëlle. Il retient encore l'instigation à actes d'ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement ou de résistance à l'encontre du leader de la bande. Et demande le maintien en détention des quatre agresseurs.

evelyne.emeri@lematin.ch

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