Travail: Et si votre patron était un robot?

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TravailEt si votre patron était un robot?

Un quart des employés jugent que l'intelligence artificielle est plus digne de confiance qu'un humain, selon une étude. Une illusion, affirment les spécialistes.

Fabien Feissli
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Fabien Feissli
Corbis

«Les gens perdent la foi dans la gestion humaine, et ce à juste titre. A qui aimeriez-vous faire confiance, un humain avec des préjugés et des opinions personnelles ou une intelligence artificielle (IA) rationnelle et équilibrée?» interroge Nikolas Badminton qui a mené une étude sur l'avenir du travail pour la société de consulting Intensions. Les résultats ont de quoi surprendre. 26% des 2300 adultes sondés au Canada préféreraient avoir un robot comme patron. Ce taux monte même à 33% chez les moins de 40 ans. A leurs yeux, une machine est davantage digne de confiance qu'un humain.

«Le problème, c'est que la notion d'intelligence artificielle est mal comprise. Les employés en attendent des miracles», réagit Jean-Daniel Dessimoz, responsable du laboratoire de robotique à la HEIG-VD. Si le spécialiste reconnaît un certain nombre d'avantages à la machine – logique, vitesse, mémoire –, il souligne que la réalité est infiniment plus complexe que ce qu'un algorithme peut modéliser.

«Quand on dit «Il agit comme un robot», on sous-entend bien un côté négatif et le manque de cœur», ajoute-t-il. Un point sur lequel abonde Olivier Glassey, sociologue des nouvelles technologies à l'UNIL. «La flexibilité du patron est souvent appréciée. Avec une machine, il n'y a aucune marge de négociation», affirme-t-il. Il rappelle également que, même si un robot est aux commandes, celui-ci a bel et bien dû être configuré par un humain.

Responsabilité en question

Le sociologue assure que l'enjeu est de plus en plus important. «Jusqu'à quel point peut-on déléguer la prise de décision? Et qui est responsable si celle-ci est mauvaise?» questionne-t-il. Par ailleurs, il souligne que l'humain passe déjà l'essentiel de son temps à obéir à des machines. «Nous devons répondre aux règles d'utilisation que nous imposent les distributeurs de billets ou les applications pour smartphone.»

De son côté, Boi Faltings, directeur du laboratoire d'intelligence artificielle de l'EPFL, met en avant des plates-formes informatiques comme Uber. «Elles sont en quelque sorte les patrons des gens qui y travaillent. On utilise un algorithme pour mettre en correspondance des tâches avec des chauffeurs», détaille-t-il. Et ce n'est pas plus mal pour ces derniers. «Ils disent souvent qu'ils sont plus heureux que quand ils travaillaient pour des patrons humains… donc peut-être que c'est effectivement un mieux.»

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