ImpôtsFini les déductions fiscales pour les banques amendées
Le Conseil fédéral a transmis au Parlement un projet visant à empêcher les entreprises de déduire les sanctions financières à caractère pénal.

Les banques ne devraient plus pouvoir payer moins d'impôts parce qu'elles se sont fait pincer par la justice.
La collectivité n'a pas à payer les pots cassés des amendes infligées par les Etats-Unis aux banques ayant encouragé l'évasion fiscale, s'étaient fâchés les parlementaires. La seule amende de 2,5 milliards infligée à Credit Suisse pourrait entraîner un trou de 800 millions de francs, avait-on avancé à l'époque.
Droit plus clair
Il s'agit de rendre plus claire une législation dont l'interprétation était sujette à controverse. Actuellement, seules les amendes fiscales, qui ne peuvent pas être déduites de l'assiette de l'impôt, font l'objet d'une disposition expresse.
Avec le projet soumis au Parlement, mais contesté notamment par le PLR et l'UDC, les entreprises ne pourront plus déduire des impôts les sanctions financières à caractère pénal, à savoir les amendes, les peines pécuniaires et les sanctions administratives de nature financières.
Les opposants basent leur critique en mettant en avant le principe de l'imposition selon la capacité économique et de la neutralité du droit fiscal.
Les sanctions visant à réduire le bénéfice qui n'ont pas de caractère pénal continueront quant à elles de pouvoir être déduites. Cela correspond à la doctrine actuelle ainsi qu'à la jurisprudence du Tribunal fédéral, que ce dernier vient de confirmer en septembre.
Corruption
Les commissions occultes versées à des particuliers ne pourront en revanche plus être considérées comme des charges justifiées par l'usage commercial et déduites de l'impôt. Il s'agit de s'adapter à un récent tour de vis.
Le versement de commissions occultes à des particuliers constitue en effet depuis le 1er juillet une infraction poursuivie d'office, à l'exception des cas peu graves. Le Parlement en a décidé ainsi dans la révision du code pénal visant à davantage combattre la corruption.
Frais de procès
Le Conseil fédéral a revu sa copie à l'aune des résultats de la consultation. Il a ainsi renoncé à empêcher la déduction des frais de procès dans le cadre d'une procédure pénale qui a abouti à une condamnation. Le gouvernement reconnaît que la mise en oeuvre de cette règle pose certaines difficultés pratiques.
Les entreprises disposant de leur propre service juridique pourraient par exemple contourner l'interdiction en comptabilisant les frais de défense dans les charges de personnel.
D'une manière générale, toute personne a droit à une procédure équitable et donc de prendre des mesures pour se défendre, avait-on objecté lors de la procédure de consultation. Les entreprises acquittées, qui pourraient déduire les frais, ne seraient pas traitées à pied d'égalité avec celles qui sont condamnées.
Malgré l'abandon de l'interdiction, les frais de procès ne seront pas déductibles dans tous les cas, prévient le gouvernement. Ceux qui n'ont pas de lien avec l'activité commerciale ou qui n'ont pas été engagés de bonne foi ne pourront pas être déduits.
Dépenses préparatoires
Le Conseil fédéral tient en revanche, malgré les critiques notamment des cantons, à interdire la déductibilité des autres dépenses qui permettent la commission d'infractions ou en constituent la contrepartie convenue, comme la location de locaux commerciaux. Il estime que les difficultés d'exécution peuvent être réduites.
Selon lui, la situation se présente cependant de la même manière que pour les commissions occultes. Et il ne serait pas cohérent d'admettre par exemple la déduction d'une opération de financement du terrorisme et de la refuser pour de l'argent versé à des agents publics ou à des particuliers en vue de les corrompre.
Vu que la nouvelle législation ne vise qu'à clarifier le droit concernant les amendes, le Conseil fédéral ne s'attend pas à des conséquences pour les finances publiques. Ces dernières ne devraient pas être importantes pour ce qui est des commissions occultes ou des dépenses préparatoires.
Côté économie, il faudra s'attendre pour certaines entreprises à une hausse de la charge fiscale. Mais les actes illicites sont eux aussi nuisibles à l'économie dans son ensemble, note le gouvernement.
Enfin, il souligne que le projet diffuse une image d'équité: les entreprises condamnées ne verront plus leur peine allégée via les impôts. Cela devrait avoir un effet bénéfique sur le civisme des contribuables.