Votations du 30 novembreForfaits fiscaux: cantons pas logés à la même enseigne
Les bénéficiaires de forfaits fiscaux qui décident de partir n'entraînent pas forcément une chute des rentrées fiscales. Leurs départs peuvent être compensés par d'autres riches contribuables. Vaud, Valais et Genève auraient plus à perdre.

La campagne sur la votation relative à l'initiative «Halte aux privilèges fiscaux des millionnaires» bat son plein jusqu'au 30 novembre.
Dans certains cantons, les départs de bénéficiaires de forfaits fiscaux sont souvent remplacés par d'autres riches contribuables. C'est l'expérience des cantons et communes qui ont aboli cette pratique. Le peuple dira le 30 novembre s'il veut encore de ce système.
Cinq cantons - Zurich, Schaffhouse, Appenzell Rhodes-Extérieures, Bâle-Ville et Bâle-Campagne - ont abrogé l'impôt forfaitaire. Bâle-Campagne l'a fait au début de 2013. Sur les seize personnes au bénéfice d'un forfait fiscal, treize ont quitté le canton. Ces treize payaient l'équivalent de 1,4 million de francs d'impôts.
Pour Bâle-Campagne, l'imposition à la dépense réservée aux riches étrangers n'exerçant pas d'activité lucrative en Suisse n'était pas décisive, nuance le chef de l'administration fiscale cantonale, Peter Nefzger. Depuis, les personnes qui sont parties ont été remplacées par d'autres. Comme les taxations 2013 ne sont pas encore terminées, il n'est pas possible de comparer les rentrées de la situation d'avant et d'après.
Vaud, Valais et Genève inquiets
La situation est tout autre dans les cantons fortement dépendants des forfaits fiscaux. En 2012, 5634 personnes taxées à la dépense vivaient en Suisse, dont 1396 rien que dans le canton de Vaud.
Pour le ministre vaudois des finances Pascal Broulis, abolir ce système signifiera une perte de 1,3 milliard de francs pour la Suisse. A cela s'ajoute 200 millions de francs en moins pour la TVA et 60 millions en moins pour l'AVS.
Le canton de Vaud perdra 208 millions de francs. «En cas de oui à l'initiative «Halte aux privilèges fiscaux des millionnaires», la facture fiscale sera répartie sur ceux qui restent», avertit le ministre.
Communes pas épargnées
Le malaise est également perceptible en Valais, où vivent 1300 bénéficiaires du forfait fiscal, au Tessin qui en compte 877 et Genève qui en recense 710. Les Grisons, avec 268 personnes ayant recours à cette possibilité, seraient moins touchés, puisque les rentrées fiscales de cette catégorie ne représentent qu'une part de 2,5%.
Mais certaines communes comme St-Moritz tremblent. Dans cette ville, la part des riches étrangers représente un tiers des impôts. Pas sûr qu'en cas d'exode, ces personnes soient remplacées par d'autres. Il faudrait s'attendre à des conséquences sur l'économie et l'emploi.
Concurrence intercantonale réduite
Les cantons qui ont décidé de supprimer ces avantages ne voient pas d'un mauvais œil une abolition à l'échelle suisse. Cela aurait le mérite de réduire l'exode de riches étrangers vers d'autres cantons, plaide Kaspar Sutter secrétaire général du département des finances de Bâle-Ville. Ce canton, qui a supprimé cette possibilité au début de l'année, a perdu jusqu'à présent huit des 19 personnes qui étaient au bénéfice d'une imposition forfaitaire.
Dans le canton de Zurich, où l'imposition à la dépense a été supprimée en 2010, la moitié des 200 bénéficiaires a déménagé. Avec la nouvelle taxation de ceux qui sont restés, les pertes ont été presque compensées.
En 2008, les forfaits représentaient 32 millions de francs d'impôts. En 2010, ceux qui sont restés ont payé environ 30 millions. Mais il y a eu des ajustements entre Confédération, canton et communes, explique Roger Keller, porte-parole du département des finances du canton de Zurich.
Au profit de la Côte d'Or
Les communes de la Côte d'Or zurichoise en ont vraisemblablement profité. Roger Keller cite l'exemple d'un contribuable imposé normalement à Zurich qui déménage dans une luxueuse villa d'Herrliberg désertée par un riche étranger sur le départ. La commune encaisse si ça se trouve plus ou le même montant d'impôts.
En revanche, le canton de Zurich perd lui un contribuable qui quitte son territoire. Pour compenser, il faudrait qu'un autre arrive d'un autre canton ou de l'étranger. Si les grosses fortunes quittent carrément la Suisse, cela affecte aussi la Confédération.
Appenzell Rhodes-Extérieures et Schaffhouse ont également aboli l'impôt forfaitaire en 2013. Dans le premier, cinq bénéficiaires sont partis et quatorze sont restés. Pour le deuxième, aucun chiffre n'était disponible.