Canton du ValaisPeine pécuniaire requise contre le garde-chasse
Le ministère public reproche au garde-chasse valaisan d’avoir détenu en juillet 2018 deux aiglons sans autorisation et de les avoir maltraités. La défense espère l’acquittement.

Dénoncées par l’université de Berne, les infractions ont été poursuivies d’office par le ministère public (photo prétexte).
Le procureur a requis une peine pécuniaire de 10’500 francs avec sursis de deux ans et une amende de 2100 francs contre le garde-chasse qui comparaissait vendredi devant le tribunal de district de Sion. La défense a plaidé l'acquittement.
Le ministère public reproche à l’accusé d’avoir détenu sans autorisation deux aiglons entre le 5 et le 23 juillet 2018 et de leur avoir infligé des mauvais traitements. Le premier oiseau avait été apporté au garde-chasse par un particulier; le second avait été repéré par un forestier qui avait appelé le garde-chasse pour qu’il le récupère.
Selon Me Bastien Geiger, avocat du prévenu, les deux aiglons avaient quitté leur nid le 28 juin 2018, après avoir été dérangés par une personne effectuant une descente en rappel. Episode qui a d’ailleurs fait l’objet d’une procédure.
Le garde-chasse a détenu les aiglons dans une grande étable. «Mes supérieurs étaient au courant de la situation», a-t-il indiqué à la juge Béatrice Neyroud, précisant que «par le passé, il avait déjà recueilli des aigles».
Violation de deux lois
Pour le ministère public, le prévenu s’est rendu coupable d’infraction à la loi fédérale sur la chasse et la protection des mammifères et oiseaux sauvages (LChP) et à la loi sur la protection des animaux (LPA). D’abord, il ne disposait pas d’une autorisation pour détenir les rapaces.
Il n’avait pas non plus «les compétences» pour en prendre soin et ne disposait pas des «installations adéquates» pour les accueillir, a affirmé le procureur Jean-Pierre Greter. La surveillance par un vétérinaire connaisseur des rapaces n’a pas été assurée et l’accusé n’a pas tenu de «procès-verbal rigoureux» de cette détention, car il n’en avait «pas le temps».
«Jouer au fauconnier
En entravant les pattes des aiglons, le prévenu a fait preuve de maltraitance. En mettant en scène les rapaces, notamment en laissant son fils jouer au fauconnier et en s’en vantant via des photos postées sur les réseaux sociaux, il a, selon le ministère public, porté atteinte à leur dignité.
Les aiglons auraient dû être transportés dans une station autorisée, comme le centre de soins pour oiseaux sauvages «La Vaux-Lierre» à Etoy (VD). Selon les déclarations de son supérieur direct, le garde-chasse avait reçu l’ordre de le faire le 9 juillet déjà, a souligné le procureur.
En tant que garde-chasse qui doit faire respecter la loi aux administrés, l’accusé devait avoir «un comportement irréprochable». Le ministère public a requis une peine pécuniaire de 75 jours-amende à 140 francs avec sursis de deux ans et une amende de 2100 francs.
«Détention d’urgence»
La défense a une tout autre lecture du dossier et a plaidé l’acquittement sur toute la ligne. «Cette affaire n’aurait jamais dû exister», a lancé Me Bastien Geiger.
Selon lui, son client, cautionné par sa hiérarchie, a pris soin des rapaces dans la limite des maigres moyens en infrastructures du service valaisan de la chasse. «Il s’agissait d’une détention d’urgence qui n’était pas destinée à durer» puisque son client avait prévu de conduire les deux aiglons à la fois – l’un s’était envolé avant d’être retrouvé – dans un centre de soins dès qu’ils auraient repris des forces.
Aiglons envolés
En ce qui concerne l’autorisation pour détenir ce type d’oiseaux, «le canton est compétent. On peut donc partir du principe que mon client l’avait», a estimé Me Geiger.
Les deux aiglons se sont envolés le 23 juillet 2018. Depuis, selon Me Geiger, des témoins disent les avoir vus notamment sur les hauts de Chandolin, sans entraves, puisque son client leur en posait aux pattes uniquement lors du nourrissage.
La défense a également réfuté toute atteinte à la dignité des animaux, soulignant que son client «n’exhibait pas» les aiglons. Selon elle, le ministère public a fait une mauvaise interprétation des photos diffusées. Me Geiger a encore souligné que le bureau valaisan de protection des animaux et le vétérinaire cantonal ont estimé «qu’aucune loi n’avait été violée».
L’affaire a été dénoncée par l’université de Berne via le professeur Raphaël Arlettaz. Les infractions ont été poursuivies d’office par le ministère public. Le verdict tombera ultérieurement.