Refroidissements: Gare aux bonbons bourrés d'antibiotiques

Avec la fin de l'été et la chute des températures, les virus sont de retour. Et, alors que nous sommes déjà nombreux à tousser, crachoter, bref, à souffrir de la gorge, un comité d'experts monte au front pour sensibiliser la population à la présence d'antibiotiques, qui passent généralement inaperçus, dans les pastilles destinées à soulager les douleurs dans la trachée. Et qui, en prime, sont souvent inutiles.

«Trois Suisses sur quatre ignorent qu'un bon nombre de ces comprimés contiennent des antibiotiques», explique Yves Platel, pharmacien à Zurich et membre de ce comité baptisé NEXT (Nouvelle stratégie d'experts pour le traitement des maux de gorge), en relevant encore: «Cette méconnaissance interpelle d'autant plus que 77% des Suisses sont fondamentalement critiques à l'égard des antibiotiques et que 86% d'entre eux jugent leur emploi dans les comprimés contre les maux de gorge inopportuns.»

Bref, alors qu'elles ne voient pas les antibactériens d'un bon œil, nombre de personnes en ingèrent régulièrement à leur insu. Et surtout, sans en avoir besoin, car la majorité des affections de la gorge sont d'origine virale.

Alors, à quoi bon mettre des tueurs de bactéries dans ces bonbons thérapeutiques? «C'est historique! Ces produits sont fabriqués selon les mêmes formules depuis toujours, et à l'époque on pensait sans doute que la présence d'un antibiotique local les rendait plus efficaces», avance Pierre-Alain Rey, responsable de la pharmacie de Chailly, à Lausanne. «Aujourd'hui, on a conscience qu'il y a des problèmes de résistance aux antibiotiques et qu'il faut réduire leur consommation, mais il est difficile de lutter contre le marketing dont certains médicaments font l'objet», ajoute-t-il.

Un vrai problème? Thomas Bläsi, pharmacien à Genève, relativise. «Lorsqu'on souffre d'une affection buccale, il n'est pas exclu qu'il y ait une bactérie qui traîne. Par conséquent, un comprimé avec un antibio peut empêcher qu'elle ne descende plus bas. Evidemment, il ne faut pas en abuser, mais ces produits sont juste assez mauvais pour que l'on n'ait pas envie d'en manger comme de simples bonbons.»

Reste que pour les experts, pharmaciens et médecins du groupement NEXT, il est important que les professionnels de la santé se mobilisent pour une meilleure information aux clients. «Les conseils donnés en cas de maux de gorge sont importants. La pharmacie n'est pas un supermarché mais un centre de compétence», souligne Yves Platel. De fait, il existe certains comprimés contre les maux de gorge sans antibiotiques, fait remarquer Pierre-Alain Rey: «Il suffit parfois de sucer un simple bonbon, à l'eucalyptus ou à la sauge par exemple, pour se soulager.»