Séquestration: Home-jackée en plein après-midi

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SéquestrationHome-jackée en plein après-midi

Quatre Kosovars répondront de leurs actes dès mardi devant la Cour criminelle de Nyon (VD). Une Russe a craint pour sa vie à Mont-sur-Rolle en avril 2016.

par
Evelyne Emeri
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Tatiana* était parvenue à défaire ses liens et à fuir par la fenêtre. Les malfrats avaient quitté les lieux à la hâte, arrachant une porte latérale de leur van, «emprunté» dans un garage. *Prénom d'emprunt

Tatiana* était parvenue à défaire ses liens et à fuir par la fenêtre. Les malfrats avaient quitté les lieux à la hâte, arrachant une porte latérale de leur van, «emprunté» dans un garage. *Prénom d'emprunt

Jean-Guy Python
Maxime Schmid

«J'ai cru qu'ils allaient me tuer.» Lorsque nous avions rencontré Tatiana* après son agression dans l'appartement qu'elle occupait régulièrement dans le village vaudois, elle était encore tétanisée. Et répétait en boucle cette phrase glaçante. Cette quinquagénaire russe avait accepté de raconter son calvaire.

Ils cherchaient des armes

Un home-jacking en plein jour, minutieusement échafaudé par quatre hommes de l'Est aguerris et dont les casiers judiciaires sont tous chargés. Lorsque la sonnerie de sa porte avait retenti, elle ne s'était doutée de rien. Pas même qu'elle aurait d'abord dû entendre celle de l'interphone, qui permet de pénétrer dans l'immeuble.

Ce vendredi 29 avril 2016, elle est seule. Il est 16 h 30. Elle attend un photographe. Elle pense aussi à un voisin. C'est ainsi qu'elle ouvre naturellement. Elle restera pétrifiée. Face à elle, un jeune inconnu braque un revolver de calibre 32 – non munitionné – dans sa direction. Il la projette à l'intérieur et lui met une main sur la bouche pour l'empêcher de crier. Embusqués dans le hall, deux autres de ses comparses s'engouffrent dans le domicile. Le quatrième brigand est dans le parking souterrain de la PPE, dans lequel ils sont parvenus à entrer en déjouant le système de sécurité. Il attend dans un fourgon «emprunté» dans le garage de son père. L'utilitaire d'un client, en fait.

La Moscovite, elle, est conduite dans une chambre. Les complices exigent de l'argent. La malheureuse n'a que 200 francs en cash, ce qui les fâche. Elle sera ensuite entravée sur son lit, assise, ligotée aux poignets et aux genoux, puis encore attachée, par la taille, au cadre du lit avec des vêtements et une ceinture, trouvés sur place. Les individus n'ont de cesse de lui intimer de baisser la tête. Ils opèrent à visage découvert.

Pendant que Tatiana est enfermée dans la pièce, ils fouillent l'habitation. Visiblement, ils savent qu'il y a un coffre-fort à armes. Ils le trouveront, dissimulé et fixé dans une armoire, et parviendront à le desceller. Architecte, le propriétaire des lieux, en déplacement au Maroc au moment des faits, est un chasseur. La ressortissante russe, qui a insisté pour que ses liens aux mains soient détendus, parvient à se libérer. Elle profite du bruit fait par les malfaiteurs pour sauter par la fenêtre et arrête sur la route un motard qui appellera les secours. Le déploiement policier est immédiatement mis en place.

Elle fuit, ils sont interpellés

Les quatre Kosovars, âgés aujourd'hui de 25 à 37 ans, filent précipitamment, percutent un mur du parking souterrain, la barrière, la porte, arrachent la porte latérale de «leur» camionnette et évitent de justesse une passante. Sur l'autoroute direction Genève, ils aperçoivent une patrouille. Ils se rangent sur la bande d'arrêt d'urgence près du centre commercial de Chavannes-de-Bogis et prennent la fuite à pied. Trois sont interpellés peu après, le quatrième le lendemain. Depuis, ils sont en détention préventive.

Accusé principalement de brigandage qualifié (vol avec violence et menace sur la vie) et de séquestration, le quatuor a commis d'autres délits. À l'Hôpital de Nyon notamment, ils ont dérobé des porte-monnaie, des clés de véhicule et des véhicules, des cartes bancaires et d'identité, des permis de conduire et d'immatriculation. Dans la région genevoise, ils ont aussi pillé du matériel dans plusieurs voitures. Dès mardi 9 h, les prévenus feront face à huit plaignants, dont Tatiana, la principale victime. Cinq avocats seront dans la salle d'audience de Nyon, présidée par Daniel Stoll.

*Prénom d'emprunt

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