InternetIls volent la vie de vos bébés
Depuis quelques mois, une nouvelle tendance a vu le jour sur les réseaux sociaux. Voler une photo de bébé et imaginer une histoire, parfois anodine, parfois glauque, avec.
- par
- Fabien Feissli

De nombreux comptes arborent ces photos de bébés volées.
Imaginez l'horreur. La photo de votre bébé au parc, dans son bain ou en train de dormir, postée sur les réseaux sociaux par un autre. Un autre qui raconte une histoire fausse, parfois avec des allusions sexuelles, concernant cette photo. C'est le principe du «baby role-playing», nouvelle tendance sur le réseau social spécialisé dans les images: Instagram. Elle a fait réagir de nombreuses mères anglo-saxonnes ces derniers mois. Une pétition en ligne a été lancée, certaines pages ont été fermées, mais le phénomène continue dans des groupes privés.
«On est assez inquiets par rapport à ce problème. C'est complètement aberrant», souligne René Longet, responsable du bureau romand de Pro Juventute. Pour lui, ce comportement est inadéquat. «Ce n'est ni éthique ni légal. Et c'est absurde. A quoi ça sert?» s'interroge-t-il. René Longet fustige les utilisateurs qui participent à cette mode. «Ces gens n'ont aucun bon sens. Les enfants ne sont pas à disposition. C'est une intrusion massive et inacceptable dans la vie privée d'autrui!»
Le responsable de Pro Juventute met en garde. «Comme pour le sexting, la Suisse n'est pas à l'abri. Si des cas helvétiques ne sont pas encore connus, cela ne veut pas dire qu'ils n'existent pas.» Pour éviter tout problème, il invite à la réflexion. «Il ne faut pas que les parents se culpabilisent, mais ils doivent distinguer le fait de prendre une photo et de la diffuser. Il faut être conscients que les images numériques sont très faciles à voler sur Internet.»
Le Web, un miroir sociologique
Stéphane Koch, spécialiste en sécurité de l'information, met en garde face au côté émotionnel du partage d'une photo. «On a cette possibilité, on a envie de cliquer, mais il faut essayer de se protéger. Par exemple, en créant des albums privés.» Tout en regrettant que peu de gens soient éduqués à l'utilisation des nouvelles technologies, l'expert rappelle que ce n'est pas Internet qui crée le problème. «Le Web est un miroir sociologique qui rend visible les traumatismes des gens. Quand ils se sentent protégés par leur écran, ils ont un comportement qu'ils n'auraient pas en pleine rue.»
De son côté, Me Sébastien Fanti, avocat spécialisé dans les nouvelles technologies, souligne que les droits d'auteur et le droit à l'image existent aussi sur les réseaux sociaux. «On ne peut pas voler une photo comme ça. Et toutes les autres dispositions légales s'appliquent également. Notamment la diffamation.»