Etoile montante du blues«J'ai appris à jouer en écoutant la radio»
Gary Clark Junior, artiste de 31 ans dont Eric Clapton est fan, sort «The Story Of Sonny Boy Slim». Rencontre.
- par
- Caroline Piccinin

Gary Clark Junior a eu la «lourde» tâche le jeudi 23 juillet dernier d'ouvrir la Grande Scène du Paléo devant deux monstres et habitués: Ben Harper et Johnny Hallyday.
Un concert lumineux et ancré dans les racines d'un blues teinté de rock garage, devant un public passablement clairsemé mais visiblement unanime, à entendre les «qui est ce type» et autres «ils vendent son disque à la boutique»? Chez lui, aux Etats-Unis, il jouit d'une reconnaissance de ses pairs et a déjà collaboré avec bon nombre d'artistes. Parmi eux, Alicia Keys, les Foo Fighters, Sheryl Crow et les Rolling Stones. Pourtant, dans nos contrées européennes il demeure pour l'heure un artiste «en devenir». Ce qui ne lui pose aucun problème, comme il nous le racontait dans sa loge, avant son concert. «J'accepte tout ça sans difficulté. Le fait d'être une découverte ici, ça me permet de voyager à travers le monde pour faire entendre ma musique.»
Un parcours autodidacte
Né dans une famille de musiciens, «certains enseignent la musique, d'autres en jouent, d'autres dansent, d'autres chantent, chez nous, la musique est un art de vivre», le petit Gary attrape sa première guitare vers l'âge de 12 ans. «J'ai appris en écoutant la radio. Je voulais à tout prix reproduire ce que j'entendais, je devenais dingue si je ne trouvais pas la bonne note tout de suite. Je regardais aussi beaucoup de vidéos de concerts de blues», confie l'artiste, qui possède toujours cette première guitare, une Ibanez RX20. «Mais, bon, je ne joue plus trop avec, elle prend la poussière quelque part» (rires), avant de nous confesser qu'il possède une bonne cinquantaine de guitares en tout genre, des Gibson, des Fender et des Epiphone.
Plus tard, vers ses 15 ans, le natif d'Austin, au Texas, se fait remarquer par Clifford Antone, propriétaire de l'Antone's Nightclub, où se sont produits certains des noms les plus connus du blues, dont Stevie Ray Vaughan, Buddy Guy et Jimmy Reed. Très vite, il s'impose comme une étoile montante et devient presque résident des lieux. On est au début des années 2000, mais c'est dix ans plus tard que le garçon – Sonny Boy Slim, comme le surnomme sa maman – se fait vraiment remarquer à l'occasion du Crossroad Guitar Festival, organisé par Eric Clapton.
Une lettre d'un de ses maîtres
Suite à l'événement, il se passe quelque chose de dingue. Clapton lui fait parvenir une lettre pour le remercier de lui avoir redonné l'envie de jouer. «Je lui ai immédiatement répondu. Vous imaginez le compliment venant d'une légende comme lui? ça m'a insufflé de la force et de l'inspiration», explique Gary Clark Junior, visiblement toujours aussi ému à propos de ce moment de sa vie. «Quand un tel musicien vous dit quelque chose comme ça, c'est forcément surréaliste, mais c'est trop bon.» Dans ses références, il citera aussi d'autres grands, dont Albert King. «C'est mon guitar hero en ce moment, parce que ça change de temps à autre! Si vous ne le connaissez pas, sachez que c'est un bluesman qui a influencé des gens comme Stevie Ray Vaughan et beaucoup de joueurs de guitare, avoue-t-il, plein de lucidité. Comme tous les guitaristes, je souhaite avoir mon propre style, mais tout le monde puise des influences chez les autres, chez ses héros. Vous ne pouvez pas réinventer la roue, vous mettez juste le truc à votre sauce avec tout votre cœur.» C'est que son nom est souvent associé à celui d'un autre, Jimi Hendrix, «quand on est comparé à ce genre de noms, ça veut au moins dire qu'on produit un truc», s'en amuse-t-il.
Un surnom pour cet album
Ce nouveau disque, «The Story Of Sonny Boy Slim», il en est très fier. «C'est le meilleur album que j'aie fait jusqu'à maintenant. J'ai adoré le faire, jouer de presque tous les instruments, et je me réjouis que les gens le découvrent. Ma sœur joue aussi dessus», pour la touche famille qui lui est chère. Quant au processus créatif, Gary explique: «Je ne note rien, mon écriture est vraiment terrifiante (rires), alors, parfois, j'enregistre des trucs sur mon téléphone, je chante et je vois ce que ça donne. Si ça me revient en tête, je bosse dessus pour en faire quelque chose, sinon je laisse tomber. C'est que ce n'était pas fait pour moi.»
Et, à l'écoute de cet album, on peut vous garantir que ce qui est «fait» pour Gary Clark Junior sera bon pour vos oreilles.