FranceJean-Marie Le Pen affronte le FN au tribunal
Le cofondateur du parti tente d'en faire annuler son exclusion et demande sa réintégration.

Jean-Marie Le Pen, photographié le 28 septembre 2016.
Selon son entourage, Jean-Marie Le Pen, 88 ans, sera présent à l'audience du tribunal de grande instance de Nanterre.
Il avait été suspendu du FN en mai 2015 puis exclu le 20 août de la même année par le bureau exécutif, instance suprême du parti, après une série de provocations guère nouvelles sur le fond à propos de la Shoah et du maréchal Pétain, jugées pénalisantes pour la stratégie de «dédiabolisation» menée par sa fille.
A trois reprises, l'été dernier, la justice avait donné raison à Jean-Marie Le Pen face au parti qu'il a longtemps incarné. D'abord en annulant sa suspension puis, à deux reprises, en suspendant le congrès par correspondance censé supprimer son statut de président d'honneur.
Pour ce quatrième round judiciaire, Jean-Marie Le Pen demande au tribunal d'annuler son exclusion, «entachée d'irrégularités de forme et de fond», et d'ordonner sa «réintégration parmi les membres» du parti, selon l'assignation consultée par l'AFP.
En outre, lui qui s'estime président d'honneur «à vie» du FN demande à la justice de dire «en tout état de cause» que son exclusion en tant que membre ne saurait le priver de ce titre et des prérogatives qui y sont attachées, et de lui permettre notamment de siéger à nouveau au sein des instances dirigeantes du parti.
2 millions d'euros en réparation
Dénonçant «un grand nombre de voies de fait», il réclame enfin au Front national, qu'il a cofondé en 1972, deux millions d'euros (presque 2,2 millions de francs) en réparation d'un «très grave préjudice» porté à sa fonction de président d'honneur, mais aussi «à sa dignité, son honneur, sa notoriété et son action politique».
Pense-t-il pouvoir convaincre les juges? «Je n'oserais m'avancer», a ironisé Jean-Marie Le Pen mercredi lors d'un dîner avec ses soutiens en Seine-et-Marne, allusion à sa relation souvent houleuse avec la justice française: «Chat échaudé craint l'eau froide».
Dans l'attente de son hypothétique réintégration au FN, Jean-Marie Le Pen fait durer le suspense sur son éventuel soutien à sa fille et au parti qu'il a présidé pendant près de 40 ans pour la présidentielle et les législatives de 2017.
«Pour l'instant, non», il ne soutiendra pas sa fille à la présidentielle, même s'il pourrait s'y «résigner». «Je le dis et le redis à Marine, si vous ne faites pas l'unité du FN (...), vous perdrez la bataille politique. Cette défaite sera irrémédiable», a aussi lancé le «Menhir» mercredi soir.
Ca fait mal au cœur
«Voyez ça comme une main tendue envers une autre main qui, pour l'instant, ne se tend pas», résume un proche. «Il essaie de fédérer un courant qui fera défaut à Marine Le Pen» s'il n'est pas réintégré, «il veut simplement que son courant soit représenté au sein du FN, et pour cela il faut qu'il y soit».
«Son attitude pourrait sembler dissidente», poursuit ce proche, qui file la métaphore marine, «mais en réalité», loin d'être «un pirate», Jean-Marie Le Pen est «un corsaire, qui travaille pour la Couronne».
«On espère tous que Marine Le Pen vienne vers lui», a confirmé mercredi sa femme, Jany Le Pen.
«J'espère qu'il sera réintégré. Ça fait mal au coeur», a commenté pour sa part Marie d'Herbais, ex-amie de Marine Le Pen et présentatrice du blog vidéo hebdomadaire de Jean-Marie Le Pen.
Mais côté FN, le sort du vieux chef semble scellé. Le parti attend la décision de justice. L'objectif est ensuite «que la décision politique», exclure «Le Pen» du parti, finisse par être «appliquée» quoique décide le tribunal, selon un dirigeant.
Marine Le Pen adressera-t-elle tout de même un message à son père pendant la présidentielle? «Zéro chance sur cent», assure le même dirigeant.