BerneL'argent étranger bienvenu dans la politique suisse ?
En commission, une majorité d'élus estime qu'il ne faut pas interdire les fonds étrangers qui financent des campagnes politiques en Suisse. Un coup de canif dans la transparence.
- par
- Eric Felley

La référendum contre la loi sur les jeux d'argent avait bénéficié d'un soutien important de sociétés étrangères impliquées dans le jeu. Une pratique qui divise à Berne.
Bon nombre de conseillers nationaux préfèrent ne pas savoir d'où vient l'argent... Ou en tout cas, ils n'aimeraient pas que cela se sache. C'est la raison invoquée par une majorité de la Commission de Institutions politiques (CIP) pour ne pas suivre une proposition du conseiller aux Etats Jean-René Fournier (PDC/VS).
Celui-ci a déposé une initiative parlementaire pour interdire l'intrusion d'intérêts financiers dans la vie démocratique helvétique. L'argent étranger ne devrait plus aider au financement de la récolte de signatures pour un référendum ou une initiative. Il ne devrait pas non plus financer une campagne de votation.
Indépendance du pays ?
Pour sa proposition, le Valaisan prend l'exemple du référendum contre la loi fédérale sur les jeux d'argent en 2017, qui avait pu aboutir grâce en partie à des fonds provenant de sociétés de jeux à l'étranger à hauteur d'un demi-million de francs pour la récolte de signatures. «Une telle ingérence de la part de groupes étrangers dans la démocratie directe suisse, constate-t-il, intervenant au nom d'intérêts propres purement financiers, est inadmissible et intolérable, notamment du point de vue de l'indépendance et de la crédibilité des institutions politiques qui font la force de notre pays.»
Une très courte majorité
Malgré ce principe, qui semble bien ancré dans l'air du temps, la CIP a rejeté vendredi cette initiative par 14 voix contre 10. Bien que se déclarant favorable à la transparence, «elle ne souhaite par réglementer la question de la provenance de l'argent.» Par contre, la CIP estime qu'il y a lieu de «prendre des mesures» dans le domaine de la transparence du financement des partis politiques ainsi que des campagnes électorales et des campagnes de vote, mais de très peu par 12 voix contre 11 et une abstention. Une courte voix, mais pour Lisa Mazzone (Verts/GE), c'est déjà un progrès: «Jusqu'à présent le Parlement n'a jamais voulu entrer en matière sur des questions de transparence. Le fait qu'une réflexion soit en cours est favorable».
Initiative pendante
Cette réflexion devrait aboutir à un contre-projet à l' initiative populaire fédérale déposée par les Verts en 2017. Elle demande «le montant et l'origine de toutes les libéralités en argent ou en nature d'une valeur supérieure à 10 000 francs» doivent être transparents quant à leur origine. Origine étrangère également, bien entendu.