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PolémiqueL'art ne tenait qu'à un fil et les opposants se déchaînent

Une des sangles qui soutenait l'étalon empaillé ayant cédé, l'exposition dans un abribus genevois a été interrompue... Momentanément.

Sébastien Jost
par
Sébastien Jost
Christian Bonzon/Lematin

Coup du sort ou rebondissement artistique? L'œuvre, exposée dans un ancien abribus de Plainpalais, à Genève, transformé en galerie d'art, a été victime d'un incident tôt hier matin. Une des deux sangles qui maintenaient le cheval en l'air a cédé. L'étalon s'est donc retrouvé la croupe posée sur le sol et uniquement retenu par le cou. Saisissant au départ, voire dérangeant pour certains, «Cheval de bataille», nom de l'installation, est devenu encore plus impressionnant. D'autant qu'un sabot s'est détaché du corps de l'animal.

Réactions épidermiques

Contactée hier, Maya Bösch, l'artiste qui a créé la pièce en collaboration avec Régis Golay, affirme que c'est un accident. «Ce n'est pas voulu, explique-t-elle. C'est un problème technique et c'est très ennuyeux.» En collaboration avec Zabriskie Point, le collectif qui gère l'endroit, l'espace a été bâché et l'exposition arrêtée momentanément. Ceci permettra peut-être à chacun de souffler, tant l'œuvre a suscité des réactions épidermiques. «Dégueulasse», «choquant», «abject». Sur le site du «Matin», des dizaines de commentaires, souvent très virulents, s'en sont pris à l'objet. Des e-mails agressifs ont également été reçus par les artistes. D'un autre côté, un certain nombre de nos lecteurs jugent l'œuvre et la poésie tragique qu'elle véhicule intéressantes. Dans toute cette agitation, la Ville s'apprête à rencontrer les artistes et le collectif Zabriskie Point. Et hier, Régis Golay précisait sur le site de la Tribune de Genève que «cet événement n'est pas de l'art, c'est juste un cadrage, un geste spontané, éphémère».

Utilisé au théâtre

Devant la levée de boucliers provoquée par l'utilisation d'un animal mort, Maya Bösch rassure les amoureux des bêtes. L'étalon n'a bien entendu pas été tué spécifiquement pour cette exposition. Avant de faire ruer dans les brancards, le cheval était utilisé comme élément scénographique dans des pièces de théâtre.

Le romancier et philosophe Jean Romain, également député au Grand Conseil genevois et membre de la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport, estime que les autorités n'ont pas à intervenir dans le débat sur l'œuvre. Une œuvre qu'il juge avec sévérité. «L'art contemporain ne recherche plus le beau, ni le profond, ni le sensé, ni quoi que ce soit de cet ordre, souligne Jean Romain. Mais il tente de faire croire qu'il se démarque, qu'il transgresse. Or en matière de transgression on ne peut plus choquer que les jobards.» Et les défenseurs des animaux.

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