Soutien militaireL'Egypte ne veut pas céder à la pression américaine
Le ministre des Affaires étrangère a violemment critiqué la décision américaine de cesser de livrer des armes lourdes à l'Egypte.
Après des mois d'atermoiements, les Etats-Unis ont officiellement gelé mercredi une partie de leur aide militaire à l'Egypte en représailles à la répression visant les partisans du président déchu Mohamed Morsi. Des hélicoptères d'attaque, des chasseurs et des missiles ne seront plus livrés par Washington.
Le «recalibrage» de l'aide américaine passe par l'arrêt de la fourniture d'équipements lourds et de son assistance financière au gouvernement égyptien «en attendant des progrès crédibles vers un gouvernement civil démocratiquement élu», a indiqué la porte-parole du département d'Etat américain, Jennifer Psaki.
L'aide américaine au Caire s'élève chaque année à 1,55 milliard de dollars (1,4 milliard de francs), dont 1,3 milliard de dollars (1,17 milliard de francs) sont consacrés directement à l'armée égyptienne.
Parmi les matériels qui ne seront plus livrés au Caire, des hélicoptères Apache, des chasseurs F-16, des missiles Harpoon ou encore des pièces de chars d'assaut A1/M1 Abrams, ont précisé des responsables américains. Ce gel n'a toutefois pas vocation à être permanent, ont-ils ajouté, sans donner de chiffres précis sur le montant de l'aide gelée. Ils se sont contentés de souligner que ces armements valaient «des centaines de millions de dollars».
«Mauvaise décision»
«C'est une mauvaise décision», a jugé le porte-parole du ministère des Affaires étrangères égyptien, Badr Abdelatty. «L'Egypte ne cédera pas à la pression américaine et continuera son chemin vers la démocratie, tel qu'il est prévu par la feuille de route», a-t-il assuré, évoquant le processus défini par l'armée, qui doit conduire à des élections libres.
Dans un communiqué diffusé un peu plus tard, il ajoute que l'attitude des Etats-Unis «pose de graves questions sur leur volonté d'apporter une aide stratégique stable à la sécurité de l'Egypte». Le journal Tahrir, opposé aux islamistes, titre quant à lui «Que l'aide américaine aille au diable».
Lutte contre le terrorisme
Les Etats-Unis n'ont jamais qualifié le renversement de Mohamed Morsi de «coup d'Etat», mais ils ont condamné une répression «lamentable» et réclamé la levée de l'état d'urgence ainsi que des élections démocratiques en 2014.
Ils continueront cependant à aider «à sécuriser les frontières de l'Egypte», à lutter contre le terrorisme et à assurer la sécurité sur le Sinaï, a relevé Jennifer Psaki. Washington poursuivra aussi ses livraisons «de pièces pour des équipements d'origine américaine, comme ses formations militaires ou éducatives», a-t-elle assuré.
Depuis la destitution du président Mohamed Morsi le 3 juillet et la répression qui a suivi, l'administration du président Barack Obama était sous pression pour réduire l'aide versée chaque année au Caire. A la mi-août, Washington avait déjà annulé des exercices militaires conjoints avec l'Egypte et reporté la livraison de quatre avions de combat F-16 à l'armée égyptienne.
Gage sur l'avenir
Jouant l'apaisement, le secrétaire d'Etat américain, John Kerry, a assuré que le gel partiel de l'aide ne revenait pas à une suspension des liens bilatéraux. «Cela n'a rien à voir avec une rupture de notre relation ou de notre détermination sincère à aider le gouvernement», a-t-il déclaré à la presse à son arrivée en Malaisie.
Le département d'Etat a pris soin de souligner que les Etats-Unis «ont décidé de poursuivre leurs relations avec le gouvernement égyptien, tout en recalibrant l'aide à l'Egypte pour servir au mieux nos intérêts», ajoutant que «le partenariat entre les Etats-Unis et l'Egypte sera plus fort quand l'Egypte sera représentée par un gouvernement civil, élu démocratiquement.»
Les Etats-Unis ont fourni des milliards de dollars d'aide à l'Egypte depuis que le pays a signé en 1979 l'accord de paix avec Israël, un moyen de s'assurer pour Washington un accès prioritaire au canal de Suez et la coopération égyptienne à la lutte contre le terrorisme.