Dix ansL'Expo.02 continue de faire parler d'elle
Eloges, griefs, boulettes et autres vérités: retour sur l'Expo. 02 qui continue de susciter la polémique chez les politiques et anciens visiteurs dix ans plus tard. Extraits.
Expo.02 a beaucoup fait parler. Les commentaires de personnalités politiques, de cadres de l'exposition nationale ou de visiteurs lambda n'ont rien perdu de leur sel malgré les années. Florilège de propos.
«Le budget sera respecté (...) Il n'y aura pas d'ajout au budget que nous vous présentons maintenant», assure le conseiller fédéral Jean-Pascal Delamuraz en 1996, plaidant devant le Parlement pour une contribution unique de 130 millions à l'Exposition nationale 2001. Au final, la Confédération va y engloutir un milliard de francs tous crédits et frais compris.
«J'étais conseiller national quand nous avons voté, sans grande discussion et sans véritable esprit critique, le crédit initial». Le conseiller fédéral Pascal Couchepin (octobre 2002).
Le projet de l'expo manque de capoter en 1999 mais le Conseil fédéral continue l'aventure. Pascal Couchepin explique en octobre 2002 que le message des Sept Sages pouvait se résumer ainsi: «Au diable l'avarice, nous voulons l'Expo (...) Le Parlement a soutenu le gouvernement et je lui suis reconnaissant d'avoir adopté cette attitude volontariste».
«Cette somme, vous l'avez entendu, 900 millions de francs, c'est la part de l'Etat (...) ça me paraît tout à fait soutenable. Je vous rappelle que chaque année, sans discussion, dans cette salle, on vote des crédits supérieurs pour l'armement». Dick Marty (mars 2002 au Conseil des Etats). Antichambre de la mort «Il est trop tard pour faire d'autres économies». Nelly Wenger, directrice générale d'Expo.02 (novembre 2001).
«Je me dis que la Suisse est curieuse: il faut qu'un projet soit dans l'antichambre de la mort pour que l'on s'en occupe vraiment». Nelly Wenger, dans son livre «Je vous invite».
«Je n'irai pas les supplier pour autant. On a le droit de ne pas être enthousiaste». Nelly Wenger, réagissant le 19 avril 2002 à la «retenue» des Genevois envers Expo.02.
«Aucune créativité»
«Le moule est archaïque et l'offre de pensée dérisoire par rapport aux technologies contemporaines. L'Expo est une kermesse du 19e siècle transposée au 21e siècle, un Disneyland appliqué à l'univers de Guillaume Tell». Bernard Comment, écrivain jurassien installé à Paris (avril 2002).
«Une telle manifestation ne peut engendrer qu'une prostitution artistique. Aucune créativité et aucune critique ne sont possibles dans un tel contexte. C'est une manifestation d'autosatisfaction indécente». Michel Thévoz, ancien conservateur de la Collection de l'Art brut à Lausanne (avril 2002).
L'ours se redresse
«Nous n'avons pas de roi, pas de président fixe et nous ne faisons pas la guerre. C'est pourquoi nous avons occasionnellement besoin d'une manifestation qui fonde notre identité». Franz Steinegger, président du comité directeur d'Expo.02 (septembre 2002).
«La plupart du temps, l'ours marche à quatre pattes, mais de temps en temps il se redresse pour voir où il est». Pour les Suisses, les expositions nationales ont la même fonction, estime l'anthropologue canadien Jeremy Narby, établi à Porrentruy (JU). «Eviter l'Irlande du Nord, le Québec et la Belgique en faisant une communion tous les 35 ans, voilà qui n'est pas inutile!» (octobre 2002).
«La joie sur leurs visages (des visiteurs) me dit qu'avec le temps, ils seront tous imprégnés de cet esprit propre à l'Exposition nationale. En Russie, nous appelons cela l'effet cornichon au sel. Conservé dans l'eau salée, le cornichon est imprégné lentement mais sûrement par le sel. C'est la même chose avec l'idée de l'Expo», analyse le musicien russe Andrej Padalko en septembre 2002.
Machine optique
«On a voulu une Expo écologiquement correcte, politiquement correcte, syndicalement correcte, mais au final, on a beau faire des campagnes de marketing, c'est le visiteur qui décide.» Daniel Rossellat sur la fréquentation de ses Events, le 06 août 2002.
L'Expo est une machine optique qui permet de voir le pays autrement, analyse le sociologue Bernard Crettaz en septembre 2002. Ce «voir autrement» est à son paroxysme dans le nuage de l'arteplage d'Yverdon, qui nous apprend «la relativité de tout point de vue».
Exorciser cette aventure
«Comment faire moins que prévu, avec une année de retard et encore plus d'argent?». Dépêche «analyse» de l'ats (octobre 2002).
«Beaucoup de gens ont oublié l'Expo une fois celle-ci terminée. C'est comme s'il fallait exorciser cette aventure», Yvette Jaggi, alors présidente de Pro Helvetia. «L'Expo était éphémère pour des motivations écologiques notamment; mais les Suisses préfèrent le solide aux choses qui ne durent pas» (mai 2003).