Votations cantonalesL'unité neuchâteloise à l'épreuve des urnes
Le dimanche 24 septembre sera marqué par une triple votation cantonale, qui pourrait être imprégnée de tensions régionalistes.

Le dernier week-end de septembre sera chaud pour les Neuchâtelois, et pas seulement en raison des libations festives de leur célèbre Fête des vendanges. Le dimanche 24 sera marqué par une triple votation cantonale, qui pourrait une fois de plus être imprégnée de tensions régionalistes.
Les citoyens se prononceront sur une réforme des institutions, sur un nouvel Hôtel judiciaire et sur le report de l'harmonisation de la fiscalité des frontaliers. Aux yeux du Conseil d'Etat, c'est le canton dans son ensemble qui est en jeu: il doit se moderniser, réunir ses habitants et conjuguer les forces de ses régions.
Mais pour une partie de la population, ce scrutin risque d'être ressenti comme un couteau dans la plaie sans cesse ravivée des conflits locaux. Car chacun des objets est susceptible de faire jouer des motifs d'identité ou de rivalité.
Le premier objet: parce qu'il consiste à effacer les districts en tant que circonscriptions électorales. Le deuxième: parce qu'il implique une centralisation judiciaire dans le Haut du canton alors qu'une centralisation hospitalière dans le Bas vient d'être rejetée. Et le troisième: parce qu'il demande un geste de solidarité pour quelques communes, dont La Chaux-de-Fonds et Le Locle.
Après l'échec essuyé en février dernier lors de la votation sur la répartition hospitalière, ce sera donc un nouveau test pour la politique d'unité «Un canton, un espace» prônée par le gouvernement.
L'adieu aux districts
La réforme institutionnelle supprimerait les 6 circonscriptions électorales (districts de Boudry, La Chaux-de-Fonds, Le Locle, Neuchâtel, Val-de-Ruz, Val-de-Travers). Chaque citoyen pourrait ainsi choisir ses représentants au Grand Conseil parmi les candidats de tout le territoire cantonal, à partir de 2021.
Le nombre de députés au parlement cantonal baisserait de 115 à 100. Il n'y aurait plus d'apparentements entre les partis politiques, et le quorum (minimum de voix que ces derniers doivent obtenir) passerait de 10% à 3%.
Les avantages selon le Conseil d'Etat: une efficacité parlementaire accrue, un choix plus large offert aux électeurs et une plus grande légitimité pour les députés. Toutefois, la réforme n'a pas fait l'unanimité lors de son adoption par le Grand Conseil.
Elle n'a passé la rampe qu'après avoir été retravaillée en commission, afin qu'un nombre minimal de sièges soit garanti pour les quatre régions: Littoral, Montagnes, Val-de-Ruz, Val-de-Travers. Et les députés n'ont donné leur feu vert que par 61 voix contre 47, l'opposition venant principalement du groupe popvertsol et de l'UDC.
Le gouvernement affirme que les districts n'ont plus d'utilité. Mais les opposants craignent une surreprésentation de certaines régions au sein du parlement grâce à la taille de leur bassin démographique. Et il est possible qu'une partie de la population reste attachée aux districts comme ancrage d'une identité locale.
L'adieu à la vétusté
S'agissant du nouvel Hôtel judiciaire, un seul site moderne à La Chaux-de-Fonds abriterait le Tribunal de première instance et le Ministère public. Les locaux actuels, dispersés sur huit sites, sont étroits, vétustes et mal sécurisés. La nécessité d'héberger plus dignement les autorités de la justice est largement reconnue.
Le référendum contre ce projet a pourtant récolté près de 9000 signatures. Il a été lancé surtout par des avocats et des politiques du Bas du canton. Ceux-ci réfutent tout esprit de revanche sur le Haut.
Leur principale critique est liée au coût de cette construction: près de 50 millions de francs, alors que le canton a mal à ses finances. Les opposants estiment aussi qu'il n'est guère adéquat de regrouper sous le même toit les juges et les procureurs.
Douloureuse solidarité
Le troisième objet du scrutin est une mesure temporaire: retarder une nouvelle fois l'harmonisation prévue de l'impôt des frontaliers. Cette harmonisation doit corriger une distorsion qui a profité pendant des années aux communes industrielles qui comptent le plus de travailleurs frontaliers.
Mais si elle était appliquée maintenant, ce serait le pire moment pour ces communes qui souffrent déjà de la mauvaise conjoncture, plaide le Conseil d'Etat. Reste que pour toutes les autres communes, qui devraient patienter avant de bénéficier de ce rééquilibrage, la pilule risque d'être difficile à avaler.