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FranceLa justice dira si le parfumeur Guerlain est raciste

Le tribunal correctionnel de Paris dira jeudi si Jean-Paul Guerlain, le célèbre nez du parfumeur français, doit être condamné pour injure raciale à la suite de propos sur les "nègres" qui avaient soulevé indignation et appel au boycott de la marque de luxe.

Interrogé sur la création du parfum Samsara sur la chaîne France 2 le 15 octobre 2010, le descendant du fondateur de la célèbre maison Guerlain avait répondu: "Pour une fois, je me suis mis à travailler comme un nègre. Je ne sais pas si les nègres ont toujours tellement travaillé, mais enfin..."

Les réactions n'avaient pas tardé. D'abord sur Twitter où étaient dénoncés des "relents de racisme colonial" chez M. Guerlain, "le parfumeur... qui pue".

L'ancien "nez" de Guerlain avait alors présenté ses excuses, évoquant un "dérapage hors de propos", sans parvenir à étouffer la controverse.

Des manifestations avaient été organisées devant la boutique-emblème de la marque sur les Champs-Elysées, des appels au boycott s'étaient multipliés en France mais aussi aux Etats-Unis. Plusieurs organisations de lutte contre le racisme (SOS racisme, Mrap...) avaient porté plainte pour "injures raciales".

"La première partie de ma phrase est une phrase que j'ai entendue toute ma jeunesse quand je travaillais dans le jardin de mon grand-père. Je suis d'une autre génération", s'était justifié lors de l'audience du 2 février M. Guerlain, appuyé sur deux béquilles. C'était "une expression courante à l'époque".

"Quant à l'autre phrase, c'est une imbécillité de ma part, j'ai voulu faire rigoler la journaliste et je le regrette", avait poursuivi le parfumeur de 75 ans.

"Je présente toutes mes excuses à la communauté noire pour cette imbécillité", avait répété à plusieurs reprises celui que l'on connaissait plus jusqu'ici pour avoir lancé une quarantaine de parfums aux inoubliables fragrances, de Vétiver à Habit rouge, en passant par Samsara ou Jardins de Bagatelle.

"Je suis tout sauf raciste", avait encore martelé M. Guerlain, racontant ses premières rencontres avec les Noirs américains qui, à la Libération, "m'ont fait découvrir le chewing-gum et le Coca-Cola".

"Je n'ai pas de raison de douter de la sincérité de ces regrets", lui avait répondu le procureur Alexandre Auber. Mais, il est incontestable que ces propos, "injurieux et racistes", ont constitué "un trouble à l'ordre public".

Il avait regretté que Jean-Paul Guerlain ait "enfermé la personne noire dans deux stéréotypes dégradants, contradictoires en apparence" : l'image de l'esclave noir exploité jusqu'à la mort et le cliché "condescendant, méprisant du fainéant pittoresque, du noir tire-au-flanc par nature".

Il avait requis contre M. Guerlain une amende qui tienne compte de ses revenus, "de 7.500 euros au moins".

Depuis ce procès, une nouvelle affaire est venue égratigner la réputation de Jean-Paul Guerlain: une plainte a en effet été déposée fin février contre le parfumeur après des propos "à caractère raciste" qu'il aurait prononcés envers des employés antillais d'Eurostar à la gare du Nord à Paris qui étaient en train d'aider le parfumeur, qui était en fauteuil roulant.

Les trois agents auraient affirmé à la police avoir entendu de la bouche de Jean-Paul Guerlain, très énervé : "La France est un pays de merde, c'est une boîte de merde et en plus on est servi que par des immigrés". Des propos que conteste l'intéressé.

Retraité depuis 2002 après 47 ans passés dans l'entreprise familiale, Jean-Paul Guerlain est resté, jusqu'en octobre 2010, consultant auprès du "nez" de la maison, Thierry Wasser. Mais l'entreprise a cessé toute collaboration quelques jours après ses propos sur les "nègres".

(AFP)

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