CyclismeLa route lui sera hostile
Hué lors de la présentation des coureurs, Chris Froome part aujourd'hui à la conquête d'un cinquième Tour de France. Son adversaire No 1 sera le public lui-même.
- par
- Stéphane Combe ,
- envoyé spécial à La Roche-sur-Yon

Chris Froome est au centre de toutes les attentions, et pas vraiment pour de bonnes raisons.
Chris Froome n'a toujours pas donné le moindre coup de pédale, et encore moins vu Paris en jaune. Personne ne sait encore s'il a récupéré de ses efforts du Giro, il y a moins de six semaines. Son combat, pourtant, est bel et bien lancé. Il s'agira à n'en pas douter du plus grand. Le Britannique le reconnaît lui-même: «ça va être le plus grand défi de ma vie.» Rien que ça. Alors certes, il parlait déjà du «Tour le plus difficile de (sa) carrière» au lendemain de son quatrième sacre, l'an dernier. Il a aussi ressorti la formule au terme du Giro, qui fut «la plus grande bataille de (sa) vie». Mais cette fois, on veut bien le croire.
Ce n'est plus du sport
Car il ne s'agit clairement plus de sport. Avant même le départ, l'homme a fait l'objet d'insultes, de gestes, de menaces jeudi soir. Evidemment, il n'a fait comme de si de rien n'était. Comme si les «escroc!», «sale tricheur!», «go home!» proférés par la foule ne l'atteignaient pas. C'est peut-être ça, le signal le plus inquiétant. Il n'y avait aucune raison pour le public de jeter des tomates au triple vainqueur sortant, lors d'une cérémonie où régnait une atmosphère sereine; où les chouchous nationaux Bardet, Barguil ou Démare accaparaient les yeux des minots vendéens. Mais qu'en sera-t-il tout à l'heure, sur l'Île de Noirmoutier? Et quid des cols archi-bondés?
«L'esprit aiguisé» des Français
«Blanchi ou pas, l'opinion publique est faite», explique Richard Chassot, qui pense au passage qu'il lui sera «trop difficile d'enchaîner et de gagner deux Grands Tours.» Ce rejet, Chris Froome l'attendait forcément. Alors il a crié son amour pour la France devant la presse. Il est allé jusqu'à publier hier une tribune destiné au public du Tour, via «Le Monde». Pour s'expliquer, attendrir… ou limiter les dégâts. Intitulée «Je ne déshonorerai jamais le maillot jaune», la missive se veut adressée aux Français, «des personnes justes, à l'esprit aiguisé». Trop tard, sans doute, pour faire glisser les détracteurs de son côté.
«Le public du Tour est un public bienveillant», avait rassuré le directeur du Tour de France, Christian Prudhomme, en début de semaine. Sur les 29'000 personnes du services d'ordre du Tour, combien seront là pour Froome? «Si on focalise trop sur lui, on passera à côté d'autres menaces», explique le commandant Gabriel Lothe dans «La Dépêche». Il ajoute: «Quand vous sécurisez un stade, une fois que vous tenez sept ou huit points de passage obligés, vous tenez l'enceinte. Sur 200 kilomètres linéaires, la difficulté c'est de tenir des milliers de points potentiels».
Débarqué à pleine vitesse sur la place Napoléon, l'Anglais a vécu une première revanche de Waterloo. Il lui faudra bien tout l'appui de l'armada Sky pour reprendre désormais la main sur la route, tout en dribblant les à-côtés.