RDC: La Suisse soutient un projet pour la paix

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RDCLa Suisse soutient un projet pour la paix

La Suisse consacre 200'000 francs par an à ce projet, sur un total de 2,5 millions, pour promouvoir la paix dans la région des Grands Lacs.

Abandonnés par l'Etat, les villageois tentent de se défendre eux-mêmes.

Abandonnés par l'Etat, les villageois tentent de se défendre eux-mêmes.

AFP

Instaurer des plates-formes de dialogue entre tous les acteurs de la société pour résoudre les conflits: c'est la méthode novatrice développée depuis 2013 dans l'est de la RDC par le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) et une ONG locale. Malgré les difficultés, elle semble porter ses fruits. Au point d'intéresser d'autres Etats africains.

«Avant, quand il y avait des problèmes, on se taisait pour ne pas avoir plus de problèmes», explique une femme dans le documentaire «Tujenge Amani», diffusé mardi au Centre de presse du palais fédéral.

Groupes de milice

Quelque 70 groupes armés sévissent à l'époque au Sud-Kivu, à l'est de la République démocratique du Congo (RDC), dont les Hutus des Forces démocratiques pour la libération du Rwanda (FDLR), venus en RDC après le génocide dans leur pays en 1994. Les abondantes ressources naturelles de la région (or, coltan, diamants, etc.) sont utilisées pour financer ces groupes, qui rançonnent et brutalisent la population.

Abandonnés par l'Etat, les villageois tentent de se défendre eux-mêmes. Des jeunes s'organisent en groupes de milice: les Raïa Mutomboki. Ces derniers parviennent fin 2012 à éloigner la plupart des groupes armés. Mais ils commencent alors à terroriser les communautés qu'ils étaient censés protéger.

«Tujenge Amani»

C'est alors qu'une ONG locale, l'Action pour la Paix et la Concorde (APC), imagine une nouvelle voie pour tenter de sortir de la violence, avec Katharina Vögeli, responsable de la politique de paix du DFAE à l'ambassade de Suisse à Kinshasa. C'est le début du projet «Tujenge Amani» (Construisons la paix).

Son principe: utiliser des gens respectés par la communauté - chefs locaux, «mamans», jeunes, opérateurs économiques, mais aussi un commandant régional de l'armée «très bien» selon les initiants - pour qu'ils aident les différents protagonistes à dépasser le conflit par le dialogue et la résilience. «Il s'agit de comprendre l'autre, de déconstruire l'image de l'ennemi», explique dans le film Déogratias Buuma, cofondateur du projet.

Lancé en 2013, celui-ci compte un autre protagoniste essentiel: Aimedo Kalangiro, à l'époque chef dans les Raïa Mutomboki. Approché, il sensibilise ses supérieurs. Un dialogue aboutit à la signature d'un engagement par les Raïa Mutomboki sur la nécessité d'arrêter la violence.

Des résultats, mais

Les résultats sont tangibles. Sur quelque 5000 membres des Raïa Mutomboki, 1540 se sont démobilisés, dont un tiers pour suivre un programme de réinsertion de l'armée, et 463 armes ont été recueillies en échange d'argent.

Des problèmes demeurent toutefois. Ainsi, les camps de réinsertion de l'armée sont à l'autre bout du pays et connaissent des problèmes de logistique - les participants sont laissés sans nourriture ni couvertures -, à tel point que certains retournent dans la milice.

Plus fondamentalement, le manque de perspectives économiques pousse toujours des jeunes à rejoindre les Raïa Mutomboki. La situation politique reste très difficile au niveau national et les richesses du Kivu continuent de susciter les convoitises.

«Mais le solde est positif», relève Katharina Vögeli, qui parle d'«un travail de longue haleine». «Il faudrait inclure un volet socio-économique, dont nous discutons avec la Mission de l'ONU en RDC (Monusco)».

Le projet suscite l'intérêt

Seul bailleur du projet, la Suisse y consacre 200'000 francs par an, sur un total de 2,5 millions pour promouvoir la paix dans la région des Grands Lacs. A terme, des transferts de compétences aux acteurs locaux sont prévus, mais la Suisse maintiendra «un certain suivi».

Entre-temps, des rumeurs sur les résultats positifs du projet sont parvenues dans la capitale. Intéressés, «des gens du gouvernement congolais m'ont approchée, mais aussi de Centrafrique, du Sud-Soudan et du Niger», déclare Katharina Vögeli.

La Suisse ne peut pas financer des projets similaires dans tous les endroits, souligne-t-elle. Il faudrait trouver d'autres bailleurs. C'est la raison du documentaire «Tujenge Amani» et de l'évaluation du projet par un groupe d'experts indépendants, qui rendra son rapport début 2018.

(ats)

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