ProcèsLa victime veut être informée de la date de sortie de son agresseur
Une Lausannoise agressée en janvier 2017 et qui craint des représailles fera usage d'un droit fédéral peu utilisé.
- par
- Laurent Grabet

Mia, ici avec son avocate lors du procès de son agresseur, tente depuis de se reconstruire grâce au sport, au sevrage d'alcool et à la sophrologie.
Malgré la récente condamnation à 2 ans et demi de prison ferme de Pierre*, le multirécidiviste de 39 ans qui l'avait agressée à son domicile le vendredi 13 janvier 2017, Mia* vit dans la peur. «Peur que cet homme violent me retrouve pour se venger à sa sortie et simplement peur de le recroiser dans la rue un jour», nous expliquait hier la trentenaire lausannoise.
Pour mémoire, cette victime avait insisté pour ne pas être directement confrontée à son agresseur lors du procès. Le Tribunal correctionnel de Lausanne avait jugé ce dernier coupable de contraintes sexuelles et de lésions corporelles. «Nous n'avons pas fait appel de sa condamnation», nous révélait d'ailleurs hier sa défenderesse, Me Marianne Fabarez-Vogt.
Être informée ou oublier?
Pour juguler les angoisses de Mia, Me Véronique Fontana, l'avocate de la jeune femme, est sur le point d'utiliser la loi fédérale sur le droit de la victime à être informée. Cette loi avait entraîné l'ajout de l'article 92a au Code pénal. Rentré en vigueur au 1er janvier 2016 et assez peu utilisé depuis, ce texte permet à une victime, à un témoin ou à un tiers, «dans la mesure où ceux-ci ont un intérêt digne de protection», d'être mis au courant à l'avance ou le plus tôt possible du lieu de détention d'un condamné, de sa date de sortie, de ses éventuelles remises de peines, permissions, de sa mise en liberté conditionnelle ou même de ses fuites. Ce droit doit être verbalisé aux concernés par les policiers ou le procureur lors de leur première audition. Le hic est que c'est rarement le cas.
Pour exercer ce droit, la victime doit faire une demande écrite à l'Office d'exécution des peines de son canton, qui, dans la majorité des cas, accédera à sa demande. Les rares fois où il ne le fait pas, c'est «uniquement si un intérêt prépondérant du condamné le justifie». «C'est-à-dire lorsqu'il juge que la personne informée pourrait utiliser abusivement les informations dont elle dispose pour nuire à l'agresseur, par exemple en l'empêchant de trouver un logement ou un travail à sa sortie de prison», décode Me Fontana.
Mia ne semble pas être dans un tel état d'esprit et sa demande devrait être acceptée. «Être informée me rassure, mais en même temps, c'est à double tranchant car cela pourrait aussi rendre plus difficile l'oubli de toute cette histoire», précise la jeune femme. Si elle changeait d'avis, elle pourrait à tout moment revenir sur son choix initial et préférer ne plus rien savoir du triste sire dont elle avait croisé la route pour le pire, un jour de beuverie, il y a un peu plus d'une année.