MigrationL'Allemagne durcit ses frontières: la Suisse va-t-elle en souffrir?
Berlin a annoncé lundi soir la mise en place de centres de transit stricts à la frontière autrichienne. Le flux migratoire passant par la Suisse pourrait repartir à la hausse.
- par
- Anne-Charlotte Müller

Des centres de rétention seront construits à la frontière sud du pays. Leur objectif: y retenir les migrants avant leur expulsion vers leur pays d'entrée dans l'Union européenne.
L'Allemagne vient de renoncer définitivement à sa politique généreuse d'accueil des migrants. Lundi soir, la chancelière allemande, Angela Merkel (CDU), et son ministre de l'Intérieur (CSU), en conflit sur la politique migratoire, ont annoncé avoir conclu un accord qui prévoit la mise en place de plusieurs «centres de transit» à la frontière avec l'Autriche, où seraient maintenus des migrants ayant déjà demandé l'asile dans un autre pays de l'Union européenne, en attendant leur renvoi vers le pays d'entrée.
Des zones extraterritoriales
La particularité de ces centres de transit, c'est qu'ils seront placés sur des zones extraterritoriales où le droit allemand n'est pas appliqué. «Il s'agira de zones de rétention, comme dans les aéroports où les personnes pourront repartir de là où elles sont venues mais ne pourront pas entrer dans le pays», explique Denise Efionayi-Mäder, sociologue et politologue spécialiste des migrations à l'Université de Neuchâtel. D'où la différence avec les centres d'enregistrement qui existent actuellement un peu partout en Allemagne, dans lesquels les migrants ont un devoir de présence mais peuvent y entrer et sortir librement. Pour la sociologue, cette nouvelle politique envoie un signal clair de dissuasion.
«L'Allemagne veut faire passer le message qu'elle n'est pas si ouverte que cela. Ne venez pas ici, vous resterez à la frontière», relève-t-elle. Le flux migratoire va-t-il désormais être dévié en Suisse? La question est de savoir si ces centres de transit sont destinés seulement aux migrants passant par la frontière de l'Autriche ou également à ceux qui transitent par la Suisse. «Il est encore trop tôt pour le dire car le projet est pour l'instant encore un peu flou. Il me semble cependant que ces centres seront mis en place pour protéger spécialement la frontière germano-autrichienne et donc destinés plutôt aux migrants qui transiteraient par l'Autriche.»
La sociologue considère que les personnes migrantes vont de toute façon trouver des manières de détourner le problème. «Il n'est pas à exclure qu'elles décident de transiter par la Suisse pour atteindre l'Allemagne. Mais notre pays est assez dur en matière de politique d'asile. La Suisse renvoie plus facilement les migrants, et il est difficile de faire recours. En Allemagne, la procédure est facilitée grâce au financement de l'aide judiciaire», détaille Denise Efionayi-Mäder.