Suisse: Le commerce de détail a bien résisté mais devrait ralentir

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SuisseLe commerce de détail a bien résisté mais devrait ralentir

La croissance dans le secteur en 2020 a été bien supérieure à celle de 2019. Mais l’année prochaine, cette tendance devrait fléchir, selon les spécialistes.

La croissance en 2020 est à mettre au crédit notamment des entreprises actives dans les denrées alimentaires. 

La croissance en 2020 est à mettre au crédit notamment des entreprises actives dans les denrées alimentaires.

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Le commerce de détail devrait terminer l’année sur une croissance du chiffre d’affaires bien supérieure à celle de 2019. Mais cette tendance positive risque de perdre de l’élan en 2021, une fois que la pandémie de coronavirus sera davantage maîtrisée et que les achats dans les pays limitrophes auront complètement repris.

«Il ne faut pas oublier qu’en 2020, les frontières ont été fermées pendant plusieurs semaines d’affilée au printemps. Durant la première vague surtout, les Suisses ont principalement fait leurs achats à domicile, mais avec les incertitudes au niveau de l’emploi, le prix sera un facteur important», fait remarquer Karine Szegedi, la responsable du secteur de la consommation en Suisse du cabinet Deloitte.

8 milliards de marchandises à l’étranger

En 2019, les Suisses ont acheté pour 8 milliards de francs de marchandises dans les magasins outre-frontière, selon les calculs des économistes de Credit Suisse.

De janvier à septembre, les ventes du commerce de détail helvétique ont crû de 6,6% sur un an, grâce au segment des biens de première nécessité et au bond des achats en ligne, selon le baromètre de l’institut de sondage Gfk. En 2019, sur la même période, la hausse n’avait été que de 0,1%.

Cette croissance est à mettre au crédit notamment des entreprises actives dans les denrées alimentaires (+10,3% contre +0,1% en 2019) tandis que le segment non-alimentaires a quasiment stagné (-0,1% contre -0,5% en 2019), détaille Gfk. Même les firmes actives dans l’habillement, durement touchées par les deux mois de fermetures au printemps, ont remonté la pente, revenant en septembre en territoire positif.

Achats sur internet

Face aux mesures de semi-confinement imposées ce printemps et la deuxième vague du Covid-19, nombre de consommateurs se sont tournés vers les achats sur la toile. «Certains commerces ont atteint en quelques mois les objectifs de vente en ligne qu’ils s’étaient fixés pour les prochains 3 à 5 ans», explique Mme Szegedi. Selon elle, une large partie des clients devrait continuer à consommer en ligne après la crise sanitaire, les habitudes s’installant dans la durée si l’expérience a été positive.

L’experte s’attend cependant à voir la croissance de l’e-commerce ralentir l’année prochaine: «la forte accélération de cet été ne devrait pas se reproduire, une fois que la pandémie sera mieux contrôlée». Deloitte met également en exergue qu’il est difficile de chiffrer avec précision la contribution des ventes en ligne au commerce de détail en général. «Historiquement, elle était entre 5 et 10%, mais les chiffres ont augmenté jusqu’à 50% cet été», estime la responsable.

Incertitudes sur l’emploi

Outre le tourisme d’achat, les craintes des consommateurs de perdre leur emploi en raison des conséquences économiques de la crise sanitaire pourraient également peser sur l’évolution du commerce de détail l’année prochaine.

Dans une récente étude menée par Deloitte dans 13 pays, 29% des personnes interrogées avaient peur de perdre leur travail à cause de la crise, 20% dépensaient plus qu’ils ne gagnaient et 40% s’inquiétaient pour leur épargne.

Les consommateurs continueront à acheter les produits de premières nécessité, mais comptent réaliser des économies sur l’habillement, les restaurants et en particulier les voyages.

Le Secrétariat d’Etat à l’économie (Seco) anticipe un taux de chômage moyen de 3,2% en 2020 et de 3,3% en 2021, si la situation épidémiologique s’améliore progressivement à partir du printemps prochain, grâce notamment à la distribution à large échelle de vaccins contre le Covid-19.

«Au niveau de l’emploi, nous ne sommes pas très optimistes pour les magasins dans les centres-villes et les centres commerciaux. Ces dernières années, nous avons pu constater une baisse globale de fréquentation et des emplois perdus dans la vente au détail. Avec la progression de l’e-commerce, plus d’emplois ont été créés afin de gérer les flux physiques des biens envoyés, notamment à la Poste ou chez Digitec par exemple», illustre Mme Szegedi.

La seconde main en vogue

Des tendances, apparues bien avant la crise sanitaire, devraient en outre se renforcer au cours des prochains mois, à savoir, la popularité des magasins éphémères et des produits de seconde main et l’importance de l’omnicanal.

«La flexibilité des magasins éphémères représente un avantage de taille pour les détaillants en ces temps d’incertitudes pour s’adapter rapidement à des changements de paradigme», explique l’experte-comptable, membre de la direction de Deloitte Suisse.

Par ailleurs, l’attrait pour les articles d’occasion devrait aussi gagner du terrain, les questions d’achat responsable et d’impact écologique ayant gagné en importance chez les consommateurs durant la pandémie.

Naguère proposés essentiellement dans les brocantes, les produits de seconde main ont aussi trouvé leur place dans les grands magasins Jelmoli et Manor cette année.

(ATS/NXP)

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