Berne: Le Conseil fédéral forcé de proposer une perte fiscale

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BerneLe Conseil fédéral forcé de proposer une perte fiscale

Parce que la loi l'y oblige, le Gouvernement a soumis un projet d'exonération des bénéfices des ventes de biens agricoles. Au Parlement de trancher.

Image d'archives, Keystone

Les bénéfices issus de la vente de bâtiments et de terrains agricoles ou sylvicoles devraient être exonérés de l'impôt fédéral direct (IFD). Le Conseil fédéral a proposé vendredi au Parlement de revenir à la situation d'avant 2011, qui avait pourtant été jugée inéquitable par le Tribunal fédéral. Un projet dont le coût avoisine les 400 millions de francs par an, rien que pour la Confédération.

En proposant cette réforme vendredi, le gouvernement se contente d'appliquer la loi qui exige de lui de réaliser les motions du Parlement. Car lui-même ne soutient pas ce projet, tant pour des raisons constitutionnelles que budgétaires, écrit-il vendredi.

Alors que les autorités examinent un programme d'économies, ce retour en arrière en matière de fiscalité agricole coûterait 200 millions de francs d'IFD par an à la Confédération à moyen, voire à long terme, estime le gouvernement.

Deux fois 200 millions

Cette baisse des recettes de l'impôt fédéral direct serait en partie supportée par les cantons, précise le Conseil fédéral qui rappelle que ces derniers touchent une part de l'IFD. Dans neuf cantons, il ne faut pas s'attendre à des conséquences financières considérables. Pour les autres, il n'est pas possible de quantifier l'augmentation ou la diminution des recettes en raison de différents facteurs.

A l'échelle de la Suisse, il faudra toutefois s'attendre à une baisse du produit de ces impôts, souligne le gouvernement. En plus des 200 millions de l'IFD, les pertes pour l'AVS, l'AI et l'APG peuvent également s'élever, à moyen ou à long terme, à quelque 200 millions de francs par an. Des conséquences financières que le gouvernement juge «considérables».

Vote serré attendu

Si la loi impose au gouvernement de réaliser ce retour à l'imposition privilégiée des réserves de terrain à bâtir en zone agricole, elle donne au Parlement l'ultime responsabilité de décider. Mais la composition du législatif n'est plus la même que lors de l'adoption de la motion.

Rien n'est donc joué, sachant que la motion de Leo Müller (PDC/LU) n'avait passé le cap du National que par 95 voix contre 86 en automne 2013. Et pas plus tard que lors de la procédure de consultation, le PLR et la gauche se sont dressés contre le retour de ce privilège.

Les partisans du projet, les agriculteurs bien sûr, soutenus par le PDC et l'UDC, estiment que la modification de la pratique voulue par le TF a fortement alourdi les charges financières grevant les gains immobiliers réalisés par les agriculteurs. A leurs yeux, cette charge a pris des proportions insupportables dans certains cas.

Egalité pas respectée

Les adversaires du projet, outre l'aspect budgétaire, invoquent, comme le Conseil fédéral, des arguments constitutionnels. Ils doutent notamment que le projet respecte le principe de l'imposition d'après la capacité économique et qu'il assure l'égalité de traitement par rapport aux autres travailleurs indépendants.

Les bénéfices tirés de la vente d'immeubles agricoles ou sylvicoles étaient exonérés de l'IFD jusqu'à la décision de principe du TF, en 2011, consistant à limiter ce traitement privilégié aux seuls immeubles soumis à la loi fédérale sur le droit foncier rural. Les bénéfices tirés de la vente des réserves de terrain à bâtir d'une exploitation agricole sont donc pleinement imposables.

(ats)

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