Affaire CarPostalLes administrateurs ont discuté des bénéfices
Un procès-verbal daté de 2013 montre que le conseil d'administration de La Poste savait que les astuces comptables chez CarPostal pouvaient se révéler délicates.
Le conseil d'administration de La Poste était au courant des bénéfices problématiques de CarPostal, affirme le «Blick» jeudi. Le journal alémanique s'appuie sur un procès-verbal daté de 2013. La Poste précise que les irrégularités comptables avaient commencé bien avant.
«La question est de savoir si on ne peut pas simplement déplacer les bénéfices, sachant que le domaine des transports publics les interdit. PA (ndlr. abréviation de Postauto) et F (ndlr. abréviation pour le département des finances) étudient la possibilité, bien que ce ne soit pas facile à mettre en oeuvre», indique l'extrait de ce document daté du 26 juin 2013.
Pour le journal, il est clair qu'à partir de 2013, le conseil d'administration de la Poste savait que les astuces comptables pouvaient s'avérer délicates, d'où la formulation technique du procès-verbal. A l'époque, l'organe était dirigé par Peter Hasler.
Interrogée par Keystone-ATS, la porte-parole de La Poste, Léa Wertheimer répond que ce document est connu depuis longtemps. Il est mentionné dans le rapport d'enquête externe du cabinet d'avocats Kellerhals Carrard.
La Poste ne peut pas se prononcer sur son organe de contrôle, a-t-elle poursuivi. Il revient au Département fédéral des communications (DETEC) de se prononcer en tant que propriétaire.
Depuis les années 1990
L'enquête Kellerhals Carrard porte sur les activités de CarPostal à partir de 2007 pour des raisons de prescription. Les experts avaient cependant indiqué que les manipulations comptables remontaient sans doute aux années 1990, selon un rapport de la commission de gestion du Conseil des Etats, l'organe de surveillance parlementaire. Une enquête interne menée par la Poste n'a permis de remonter que jusqu'en 2004.
L'Office fédéral de la police (Fedpol) mène une procédure pénale administrative contre six anciens cadres de la Poste suisse. Il s'agit de l'ancien chef de CarPostal, Daniel Landolf, son ancien responsable des finances et l'ancien chef des finances de La Poste, Pascal Koradi.
Il y a également trois anciens membres de la direction de CarPostal Suisse, dont André Burri, alors qu'il était responsable du marché régional Ouest de CarPostal jusqu'en 2014. Les deux autres sont le responsable du marché régional Est ainsi que l'ancien chef du marché Suisse. Ils sont soupçonnés de fraude aux subventions.
La Poste examine l'éventualité d'une procédure civile contre MM. Landolf ou Koradi, a indiqué la porte-parole Léa Wertheimer. Toutefois, la procédure pénale de Fedpol a la priorité. La Poste ne peut donc pas poursuivre ses propres investigations internes.
Entièrement réorganisé
Le scandale des fraudes aux subventions a éclaté en février 2018. L'affaire a conduit à une série de départs, dont la démission de la directrice générale de La Poste Susanne Ruoff en juin 2018. Tous les membres du conseil d'administration de CarPostal ont été révoqués et la division a été réorganisée.
Sur le plan financier, CarPostal a remboursé environ 205 millions de francs suisses de subventions indues à la Confédération, aux cantons et aux communes.
Le Conseil fédéral promet un rapport
Interpellé par le Parlement, le Conseil fédéral s'est dit prêt jeudi à rendre un rapport global sur cette affaire. Ce bilan devra notamment indiquer «les conséquences financières pour la Confédération et certains éléments de la procédure pénale administrative qui donneront lieu à des mesures supplémentaires.»
Le gouvernement ne veut toutefois pas d'une enquête externe relative à la surveillance exercée par l'Office fédéral des transports (OFT) sur CarPostal entre 2007 et 2015. Elle n'apporterait pas de nouvelles conclusions.
Mais le Conseil fédéral est prêt à examiner la répartition des compétences de surveillance dans le secteur du transport régional des voyageurs, ainsi que les bénéfices dans ce secteur lorsqu'il est subventionné. Il prévoit de le faire dans le cadre de la réforme du transport régional de voyageurs.