MétéoLe froid, ils aiment ça à la Brévine
La vallée revendique un statut de Sibérie de la Suisse qui profite au tourisme. Hier pourtant, à cause de la bise, il n'y faisait pas plus froid qu'ailleurs…
- par
- Vincent Donzé
La Brevine, le 26 fevrier 2018.Une prise de vue au drone de patineurs sur le Lac des Taillères.Photo Maxime Schmid / Le Matin
Le village de la Brevine.
Agnès et Frédéric Guillaud: «Si le froid conserve, nous sommes en train de gagner du temps… À Paris, la pluie a fait gonfler la Seine et, à La Brévine, le froid polaire donne une belle lumière. Nous pouvons loger dans le chalet d'un cousin. Nous qui aimons la nature, nous marcherons jusqu'à être congelés, ce qui n'arrivera pas de sitôt avec notre équipement. Et tant pis si le manque ne neige nous empêche de faire de la raquette.»
Un dépanneur qui tracte un automobiliste soleurois. Cette vision, hier, n'a étonné personne à La Brévine (1046 m). La faute du froid: –10 degrés à midi, selon l'affichage bien visible sur un mur de l'Hôtel de Ville. Au Caf-Restaurant L'Isba, un ouvrier portugais prend sa pause. «On est habitué, et par ce froid on ne travaille qu'à l'intérieur», précise-t-il.
Les inconditionnels de la fricasse sont surtout sur le lac des Taillères, transformé en patinoire. Dans la vallée, tout un secteur fait son beurre avec le froid, même si à l'épicerie du village la glace vanille-fraise est en action.
Attirés par les records
«Les gens sont attirés par les records», relève Jean-Maurice Gasser, président de la commune, en vacances de neige à Villars-sur-Ollon (VD). La cramine, c'est un handicap qui s'est transformé en atout. Une opération marketing qui «marche super», selon le président. Pour preuve, la 7e Fête du froid a réuni 4000 personnes, le 3 février dernier, autour du lac des Taillères, dans une commune de 630 habitants. «On a eu la chance d'avoir froid», explique très sérieusement Jean-Maurice Gasser. La réputation de la commune lui a valu l'émission «Échappées belles», diffusée récemment sur France 5.
La température effective prévaut pour les statistiques, mais pour les villageois, c'est plutôt la température ressentie qui compte. «On la mesure avec un thermomètre mouillé. Ce ressenti est de –31 degrés avec une bise à 55 km/h», affirmait hier le météorologue retraité Michel-Alain Jeanneret (72 ans), au Locle.
Réputation usurpée?
«L'air est brassé, mais à La Brévine la température baissera quand la bise sera tombée après une nuit claire», prévient Michel-Alain Jeanneret. Chez MeteoNews, Frédéric Glassey acquiesce: «Aucun record en vue à La Brévine tant que la bise sera présente.» De là à chatouiller le record officiel de 1987 de –41,8 degrés, il y a un pas que La Brévine n'a pas franchi depuis des lustres. Sa réputation n'est-elle pas usurpée? «Non! Disons plutôt que la Sibérie de la Suisse était partout ce lundi, à La Brévine pas plus qu'ailleurs», corrige Frédéric Glassey.
«Dans la vague actuelle, le froid reste glacial tout au long de la journée», analyse encore le météorologue. Ce sont les températures moyennes qui seront extrêmes ces prochains jours, et pas forcément un pic de froid en début de journée suivi d'un redoux l'après-midi, comme lors des nuits records.
Quand la température ressentie est glaciale partout, La Brévine ne sort pas du lot. Sauf qu'à La Brévine, le froid, ils aiment ça!