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skiLe halfpipe et les JO: de la séduction à la désillusion (MAGAZINE)

Par Sabine COLPART

Tignes (France), 11 mars 2016 (AFP) - Sans conteste la plus spectaculaire et la plus dangereuse des disciplines du ski freestyle, le halfpipe s'est laissé séduire par les jeux Olympiques pour se retrouver bien seul deux ans plus tard.

Marginal et pratiqué à la cool , le ski halfpipe est entré dans une autre ère en flirtant avec les jeux Olympiques en 2014 à Sotchi, avec un autre discipline, le slopestyle. Il n'y a désormais plus de place pour ceux qui ont été appelés les branleurs du ski.

Le label olympique a mis un gros coup de projecteur sur la discipline, qui consiste en une descente dans un tube enneigé et gelé de 7 m de hauteur et 180 m de long en réalisant des figures acrobatiques (tricks) tout en grabbant (attrapant) ses skis.

La pratique est devenue exigeante et le niveau technique s'est sérieusement envolé.

"Ca fait 14 ans que je fais du halfpipe et je peux dire qu'aujourd'hui le niveau est dix fois plus relevé qu'il y a 2 ans aux Jeux", remarque dans un entretien à l'AFP l'Américain David Wise, sacré premier champion olympique de la discipline à Sotchi.

A 25 ans, ce papa de deux enfants au look d'ado est l'un des tout meilleurs riders dans le monde, présent à Tignes cette semaine pour clore la saison de halfpipe avec la dernière étape du circuit professionnel SFR freestyle, sur lequel s'est greffée la Fédération internationale.

"Les jeux Olympiques ont changé notre sport et moi ça a changé carrément ma vie parce que j'ai été le champion. C'est clair que je gagne bien ma vie comme tous ceux qui sont au top mais on est peu nombreux", poursuit le skieur du Nevada, qui n'a pas attiré plus de sponsors après son sacre olympique mais dont les contrats ont été revus à la hausse.

"Pour les autres, c'est vraiment dur. L'industrie des sports extrêmes ne se porte pas bien, les sponsors partent, les droits télé baissent, il y a moins de compétitions. Et tout ça m'inquiète", dit-il.

Le Français Kevin Rolland, vainqueur du globe de cristal cette saison à Tignes, devant tout de même 15.000 personnes exaltées, a lui perdu l'un de ses gros sponsors cette année. Il a pourtant été l'un des héros du halfpipe aux Jeux avec une médaille de bronze et des audiences record.

Mais le gars de La Plagne a de la ressource et su mettre à profit son image de jeune et beau gosse pour attirer notamment une marque de cosmétique. Et s'il peut exceller sur les circuits internationaux, c'est grâce à la structure privée qu'il a créée en 2007 avec deux autres riders, Benoit Valentin et Thomas Krief, et un coach Grégory Guenet. Le coût de fonctionnement annuel est de près de 250.000 euros.

"On espérait que les Jeux nous apporteraient quelque chose et bien, pas vraiment. Pour les skieurs, ça a été même pire, la plupart d'entre eux ont perdu des sponsors après les Jeux, ça a fait l'inverse de ce qu'on pensait", souligne Guenet.

"Souvent dans le milieu du freestyle, les sponsors se rapprochent de nous parce qu'ils savent qu'il y a les Jeux. C'est un investissement sur un temps très court".

Benoit Valentin, 3e au classement général cette saison, fait le même constat mais veut croire que l'effet JO reviendra en année pré-olympique, en 2017.

"Juste avant les Jeux, les sponsors se sont imposés et après ça s'est arrêté, on a moins parlé du sport. Les grosses marques ne viennent que pour les JO pour la grosse visibilité".

Le halfpipe n'est donc pas au mieux, y compris en termes de pratiquants contrairement au slopestyle; une descente parsemée d'obstacles, plus facile et plus accessible.

"Le gros phénomène, c'est le slopestyle, c'est un terrain de jeu qui existe dans toutes les stations. On a déjà énormément de pratiquants sans que la Fédération ait à s'en occuper", relève Fabien Bertrand, directeur du ski freestyle à la Fédération française.

sc/pga/dhe

(AFP)

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