Erythréen sprayéLe Parquet veut condamner les deux policiers
Le Ministère public a requis vendredi 20 jours- amende avec sursis à l'encontre des deux policiers lausannois accusés d'abus d'autorité et de lésions corporelles.

L'Erythréen au coeur de l'affaire.
Le Ministère public a requis vendredi 20 jours- amende avec sursis à l'encontre des deux policiers lausannois accusés d'abus d'autorité et de lésions corporelles. Il estime «entièrement établi» que les agents ont abandonné un jeune Erythréen près des bois de Sauvabelin et lui ont administré une dose de spray au poivre.
Le procureur général du canton de Vaud a requis une «courte» peine pécuniaire avec sursis, relativisant une affaire jugée pour la troisième fois et qui remonte à la nuit du Nouvel An 2006. La culpabilité des deux agents, à la carrière irréprochable, est «légère», a estimé Eric Cottier, compte tenu des circonstances.
«Une tête à claques»
«Ces actes ont été commis sur quelqu'un qui l'a cherché, une tête à claques, un enquiquineur qui a tout fait pour agacer et provoquer la police. Ces faits sont pénalement répréhensibles, mais je comprends qu'on ait pu péter les plombs», a expliqué le procureur devant le Tribunal du Nord vaudois, à Yverdon-les-Bains.
Le Parquet ne voit pas de raison d'aggraver la sanction parce que des policiers assermentés ont menti. «Ils ont le droit de ne pas avouer. Ils ne doivent pas payer pour leur système de défense même si c'est un mauvais choix», a ajouté Eric Cottier, qui espère que la carrière des deux hommes ne pâtira pas d'une condamnation pénale.
Le procureur espère qu'on approche de l'épilogue définitif de cette affaire qui a jeté à tort le discrédit sur tout le corps de police de Lausanne. Il a rappelé que la marge de manoeuvre du tribunal yverdonnois était étroite et qu'il ne pouvait pas s'écarter de ce qui avait été admis, même implicitement, dans l'arrêt du Tribunal fédéral (TF) sur cette affaire.
Pour le TF, il apparaissait «arbitraire» d'écarter les témoignages des trois policiers ou anciens policiers qui accréditent la version du plaignant. «Rien ne vient causer la moindre lézarde dans le mur de ces témoignages», a estimé Eric Cottier. En revanche, les propos des policiers impliqués «sentent la version mise au point», a-t-il ajouté.
Nuit agitée
Les variations dans le témoignage de la victime sont compréhensibles, après une nuit agitée où il avait bu. On ne peut pas s'attendre à des souvenirs «précis et inamovibles», a relevé le procureur. «Dès le 2 janvier, à son retour en foyer, il a parlé d'un sprayage par la police».
Pour le procureur général, l'abandon du jeune homme près des bois de Sauvabelin a bel et bien eu lieu. A ses yeux, cette pratique de l'éloignement des perturbateurs loin du centre-ville, qui peut se justifier dans certains cas de figure, devrait être cadrée par une base légale qui fixe des limites.
En l'espèce, il s'agissait d'une mesure punitive qui tombe sous le coup d'un article du code pénal, celui sur l'abus d'autorité. Les policiers ont cherché, au moins partiellement, à nuire, a déclaré M. Cottier qui a requis 20 jours-amende avec sursis à 80 francs pour un policier, à 100 francs pour l'autre.
Me Aline Bonard, avocate du plaignant, a reconnu que les faits reprochés sont d'une gravité modérée, mais que l'aspect dérangeant est le silence des policiers. Elle a insisté sur le fait que le plaignant a changé depuis l'époque des faits. «Il a compris. Ce n'est plus la petite frappe qu'il a été», a-t-elle déclaré.
Le procès se poursuit avec les plaidoiries de la défense. La lecture du dispositif est prévue dans la foulée.