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Avion détourné à GenèveLe pirate de l'air affirme avoir préparé son coup

Un avion d'Ethiopian Airlines s'est posé lundi matin sur le tarmac de Cointrin après avoir été détourné. Le pirate, qui était le copilote du vol, a été arrêté après être descendu sur le tarmac à l'aide d'une corde.

par
ats / afp
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Le copilote est jugé au Tribunal pénal fédéral depuis le 21 avril 2016. Son avocat plaide l'acquittement. (22 avril 2016)

Le copilote est jugé au Tribunal pénal fédéral depuis le 21 avril 2016. Son avocat plaide l'acquittement. (22 avril 2016)

Keystone
Le copilote éthiopien est jugé le jeudi 21 avril 2016 au Tribunal pénal fédéral de Bellinzone. (27 février 2016)

Le copilote éthiopien est jugé le jeudi 21 avril 2016 au Tribunal pénal fédéral de Bellinzone. (27 février 2016)

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La Suisse refuse d'extrader le pirate de l'air. Il purgera sa peine en Suisse. (9 mai 2014)

La Suisse refuse d'extrader le pirate de l'air. Il purgera sa peine en Suisse. (9 mai 2014)

Keystone

Le pirate de l'air qui a détourné le vol d'Ethiopian Airlines Addis AbebaRome sur Genève lundi à l'aube était le copilote de l'avion. Cet Ethiopien de 30 ans s'est immédiatement rendu à la police genevoise. Il a expliqué vouloir déposer une demande d'asile politique en Suisse.

Le copilote avait prémédité son geste. Il a profité que le pilote parte aux toilettes pour s'enfermer dans le cockpit et prendre le contrôle de l'appareil, a indiqué Eric Grandjean, porte-parole de la police genevoise, lundi matin devant les médias à Genève Aéroport (GA). Il n'était pas armé, et la vie des 202 passagers et membres d'équipage n'a pas été mise en danger.

Le Boeing 757-300 a quitté la capitale éthiopienne peu après minuit et devait atterrir à Rome à 04h40. Selon les premiers éléments de l'enquête, le copilote a annoncé dans un premier temps vouloir faire le plein de kérosène à Genève, où l'aéroport n'ouvre qu'à 06h00. Puis, via le transpondeur, il a annoncé au contrôle aérien italien que l'avion était détourné.

Escorte militaire

Informé, Skyguide a immédiatement alerté les autorités aéroportuaires et la police genevoise. Le plan d'urgence a été activé. «L'avion était alors en train de survoler le sud de l'Italie. La demande du pirate de l'air, qui n'était pas encore identifié comme étant le copilote, a d'abord été refusée», a expliqué Xavier Wohlschlag, directeur des opérations à GA.

Mais le Boeing a poursuivi sa route, escorté par deux avions de chasse de l'armée italienne. Il se trouvait vers 05h00 au dessus du Mont-Blanc, puis il a tourné plusieurs fois sur la région. Pendant longtemps, il n'était pas clair si l'avion avait un problème technique ou s'il s'agissait véritablement d'un détournement. Et ce n'est que vers 05h30 que les autorités ont été sûres qu'il allait atterrir à Genève.

Le copilote s'était engagé dans un étonnant dialogue avec le contrôleur aérien de l'aéroport sur sa demande d'asile politique. «Nous attendons toujours pour l'asile», lance par radio le copilote. «Kilo 001 le vent est calme, nous attendons, je n'ai pas la réponse mais on me dit que c'est en bonne voie», répond le contrôleur, selon le relevé des images radar et des conversations radio de la tour de Genève Cointrin qui ont été mis en ligne.

Seul pirate à bord

L'avion d'Ethiopian Airlines s'est finalement posé à 06h02 sur la piste principale de l'aéroport et s'est immobilisé à l'écart, a précisé M. Grandjean. Le copilote a ouvert la fenêtre du cockpit et est descendu de l'appareil au moyen de la corde d'urgence, «à la surprise de tout le monde», a commenté M. Wohlschlag. Aucune négociation n'a été nécessaire.

A 06h10, l'homme a ainsi annoncé être «le seul pirate à bord». «J'ai préparé mon coup et je demande l'asile politique en Suisse», a-t-il indiqué à la police, selon M. Grandjean. Cet Ethiopien, qui se dit menacé dans son pays, risque jusqu'à 20 ans de prison pour prise d'otage, le détournement d'avion n'existant pas dans le code pénal suisse, a fait savoir le procureur général de Genève Olivier Jornot.

Il reviendra à la Confédération de statuer sur sa demande d'asile. «Ce monsieur ne part pas avec de bonnes chances», a commenté le conseiller d'Etat Pierre Maudet, en charge du Département de la sécurité et de l'économie.

Passagers fouillés

En vertu de la loi fédérale sur l'aviation, le Ministère public de la Confédération (MPC) a été averti à 07h30. Le copilote est entre les mains de la police judiciaire genevoise et doit être auditionné dans l'après-midi. Mais l'enquête sera prise en charge par le MPC. Le procureur Carlo Buletti est arrivé à Genève en fin de matinée.

Quant à l'avion, il est sous séquestre jusqu'à la fin des investigations judiciaires. Entouré de dizaines de troupes d'élite, il a commencé à être évacué à 07h25. Les passagers ont quitté l'appareil dans le calme un à un par l'unique porte ouverte. Ils ont été fouillés une première fois puis à nouveau dans le terminal, où une prise en charge sanitaire, psychologique et consulaire leur a été proposée.

La police procède aux auditions des éventuels témoins. Depuis les événements du 11 septembre 2001, les portes des cockpits sont blindées, et il n'est pas possible de l'ouvrir depuis la cabine, a précisé M. Wohlschlag.

Vols annulés

GA est resté fermé jusqu'à 08h05 pour les décollages et 08h45 pour les atterrissages. De nombreux vols ont été annulés, a fait savoir son directeur général Robert Deillon. La situation devait se rétablir dans l'après-midi, mais l'ambiance était calme dans le terminal.

Pour sa part, M. Maudet a salué l'action coordonnée des groupes d'intervention. «La situation est bien entraînée», a-t-il relevé. L'état-major cantonal de crise a été mobilisé. Quelque 200 personnes ont été engagées.

Le précédent détournement d'avion à Genève date de 1987 et avait fait un mort et trente blessés. Hussein Harriri, un Libanais de 21 ans avait détourné un DC10 d'Air Afrique effectuant la liaison Brazzaville-Bangui-Rome-Paris. En manque de carburant, l'avion s'était posé à Genève. Le pirate, membre du Hezbollah, a été condamné à 17 ans de réclusion en Suisse, et après plusieurs évasions suivies d'arrestations Hussein Hariri a regagné le Liban en 2004.

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