GolfLe plus beau «come-back» de l'histoire du sport?
Tiger Woods, vainqueur du Masters onze ans après, a-t-il fait plus fort que Mohamed Ali, Roger Federer ou Monica Seles? À vous de voter.
- par
- Mathieu Aeschmann

Pour Stephen Curry, il n'y a pas de doute. En remportant dimanche le Masters d'Augusta, Tiger Woods a signé le «plus grand come-back de l'histoire du sport». Porté par l'émotion autant que par la grandeur conjuguée du personnage et de sa performance, le grand public semble valider. Après tout, même Barack Obama a salué ce quinzième titre du Grand Chelem comme un «testament d'excellence, de courage et de détermination».
Si l'hommage et les superlatifs sont amplement mérités, Tiger Woods a-t-il, selon vous, signé la «chèvre de toutes les renaissances», le plus grand come-back de l'histoire du sport? Nous vous proposons de voter, à partir d'une sélection forcément subjective, qui prend en compte la notoriété du champion, le prestige du titre reconquis et les épreuves surmontées pour y parvenir.
TIGER WOODS – AUGUSTA 2019
Pour mesurer la portée de l'exploit de Tiger Woods (15e Grand Chelem, onze ans après le dernier), il faut remonter au 25 novembre 2009, le jour où sa vie bascule des pages sportives vers celles des faits divers. Relations adultérines, accident de voiture, l'image du «sportif idéal» s'efface d'un coup pour laisser apparaître celle d'une star insomniaque, sous l'emprise du jeu et des plaisirs de la chair. Un an après son dernier sacre Majeur (US 2008), «le Tigre» est contraint à des excuses publiques devant des millions d'Américains. Une détresse psychologique à laquelle viendra vite s'ajouter celle d'un corps à bout de forces. Entre 2014 et 2017, Woods subit en effet quatre opérations au dos dont la dernière, une arthrodèse, fusionne ses vertèbres L5 et S1. Avant d'espérer rejouer, il doit réapprendre à marcher et se libérer de son addiction aux médicaments. «J'ai eu des sérieux doutes, avouait-il dimanche la veste verte sur les épaules. Mes enfants ont vu à quel point le golf a endommagé le corps de leur père. Je pouvais à peine marcher, même pas m'asseoir ni m'allonger. Mon corps n'est plus ce qu'il est mais j'ai toujours des bonnes mains.» Dimanche, Augusta a donc célébré la victoire de ces mains en or mais aussi d'une force mentale hors du commun. Combien d'athlètes ont en effet su se relever de plusieurs humiliations publiques et d'un corps en lambeau?
ROGER FEDERER – MELBOURNE 2017
Le merveilleux été australien 2017 de Roger Federer fut maintes fois conté. Mais peu importe par quel bout en empoigne ce récit, il subsiste toujours une part d'irrationnel. Le Bâlois sortait de six mois sans tournoi. Il confessait un genou convalescent, un classement en berne, des repères à reconstruire. Et pourtant, a-t-il seulement mieux joué au tennis que lors de cet Open d'Australie en apesanteur? Berdych estourbi, Nishikori et Wawrinka dégoûtés au bout de combats épiques, il ne manquait plus qu'une finale de légende pour boucler le blockbuster. Or retrouver et battre Rafael Nadal – l'adversaire ultime – en cinq sets pour accrocher ce 18e titre du Grand Chelem qui s'était refusé à lui si longtemps, aucun scénario ne peut régater pareil alignement des planètes. Alors certes, «RF» ne s'était remis «que» de complications suite à une arthroscopie du ménisque. Mais pour tout le reste, son come-back est une référence absolue.
MOHAMED ALI – KINSHASA 1974
Quatre ans de suspension, trois de plus pour se frayer un passage vers le «combat du siècle parmi les combats du siècle», il est parfois difficile pour l'amateur de sport du XXIe siècle de bien comprendre ce que Mohamed Ali a surmonté avant de retrouver George Foreman, le 30 octobre 1974 à Kinshasa. De plus, il est impossible de rendre hommage en quelques lignes à l'immense «Rumble in the Jungle». Le monde en a fait des films, écrit des livres. Tout juste faut-il imaginer la grâce d'Ali absorbant la puissance de Foreman avant de la retourner contre lui dès la huitième reprise. Porté par le peuple zaïrois - «Ali bomaye» («Ali tue-le») – Mohamed Ali reconquiert ce soir de légende la ceinture des lourds qui lui avait été retirée à cause de son refus de servir au Vietnam. Iconique.
MICHAEL PHELPS – RIO 2016
S'il y avait un titre de «spécialiste du come-back», Michael Phelps serait injouable. C'est le lot des sports olympiques, ils autorisent à leurs plus grands serviteurs la possibilité de prendre un peu de recul pour mieux réapparaître. Phelps en a-t-il abusé? C'est une théorie. Souvenez-vous des cinq mois «à ne rien faire, littéralement» puis de l'épisode de la pipe de cannabis post-Pékin (2009). Cinq ans plus tard, l'Américain refait pourtant le coup de «coucou, je sors de ma retraite». Il replonge dans les bassins mais se fait arrêter en état d'ivresse au volant ce qui le prive de six mois de compétition sur la route de Rio. Grave? Pas du tout. Le 11 août 2016, il surfe sur le 200 m 4 nages ce qui fait de lui le premier sportif à remporter quatre médailles d'or de suite dans la même épreuve. Michael Phelps quittera le Brésil avec une 28e breloque olympique autour du cou. Record absolu.
MONICA SELES – MELBOURNE 1996
Serena Williams chasserait-elle le record de titres du Grand Chelem de Margaret Court (24) si Monica Seles avait pu continuer à être elle-même? On a le droit d'en douter. Le 30 avril 1993, lorsque Günter Parche pénètre sur le central de Hambourg et poignarde la No 1 mondiale, la Yougoslave n'a en effet que 19 ans et déjà huit titres du Grand Chelem à son palmarès. Sa course aux records qui lui semblait promise se transforme d'un coup en une course pour vaincre les troubles psychologiques nées de l'agression. Alors quand l'Américaine – elle a pris la citoyenneté en 1994 – remporte un Open d'Australie décimé par les surprises contre Anke Huber en janvier 1996, c'est tout le tennis mondial qui verse une larme de compassion. Plus qu'un neuvième titre Majeur, Monica Seles vient de gagner la plus belle des victoires sur elle-même. Elle ne pourra plus jamais tout à fait régater avec les meilleures.