Football«Le problème, c'est le quatrième arbitre»
Entraîneur de la Suisse M19, Claude Ryf n'est pas tendre avec le règlement qui permet aux directeurs de jeu d'envoyer les coaches en tribune pour un oui ou pour un non.
- par
- Renaud Tchoumy

Le 21 juillet dernier, lors de Bâle-Lucerne (2-2), l'entraîneur bâlois Heiko Vogel (de dos) se faisait expulser par l'arbitre Alain Bieri (à dr.), sous les yeux du quatrième arbitre Lukas Fähndrich (à g.).
Renvoyé du terrain à deux reprises depuis le début de la saison – toujours à Thoune, la première fois par Nikolaj Hänni, la seconde par Adrien Jaccottet –, Bernard Challandes est la grande victime du nouveau règlement qui permet aux arbitres de sanctionner le comportement trop véhément des entraîneurs. Egalement prié d'aller s'asseoir en tribune, le 21 juillet contre Lucerne, l'entraîneur bâlois Heiko Vogel est lui aussi passé par la case «expulsion». Sélectionneur de l'équipe de Suisse des M19, ancien entraîneur d'Yverdon, de Young Boys et de NE Xamax (notamment), Claude Ryf est remonté contre cette nouvelle réglementation. Et il vise une personne en particulier: le quatrième arbitre.
Entraîneur ou funambule?
«Le rôle de cette personne pose problème, lance d'emblée l'ancien latéral international. Il devient un point de référence très proche de nous et peut manifester sa désapprobation. Il n'est qu'à quelques mètres voire quelques centimètres de nous, et peut intervenir dès qu'on est un peu excité. D'accord, un entraîneur doit être un exemple, et il y a des choses qu'il n'a pas le droit de dire ni de faire devant son banc. Mais, avec cette nouvelle réglementation, notre métier s'apparente à du funambulisme.» De fait, c'est la notion de passion qui en prend un sacré coup.
Bernard Challandes peut d'ailleurs en témoigner. «Bernard a toujours été théâtral, plaide Ryf. Au contraire d'un Laurent Roussey, par exemple. Mais tous deux sont à 160 pulsations par minute, c'est juste la manière de l'exprimer qui diffère. Alors ça m'énerve de voir un type tout près, qui peut, à tête reposée, juger un entraîneur en train de bouillonner. Lorsqu'un chirurgien est en pleine opération, il n'a personne dans les pattes. Nous, si. Il faudrait que ces quatrièmes arbitres aient vécu ce que l'on vit pour qu'ils comprennent. Quelque part, on devrait les envoyer dans un restaurant à midi, quand il faut servir 80 couverts d'un coup, pour qu'ils se rendent véritablement compte de ce qu'est un coup de feu.»
La solution? Claude Ryf ne va pas jusqu'à exiger que l'on supprime le quatrième arbitre. «Mais, quelque part, il y avait moins de problèmes quand il n'y avait que trois arbitres, lâche-t-il tout de même. Ce quatrième officiel nous bouffe notre espace, alors qu'il devrait se faire le plus discret possible. Car les coaches resteront toujours ce qu'ils sont, au plus profond d'eux-mêmes. On est tous plus ou moins démonstratifs. Mais je suis convaincu qu'on s'éteindrait tout seul en dix ou quinze secondes. tandis que, là, on se fait réprimander dès qu'on met un pied devant l'autre. Je le répète: il faudrait que ces messieurs soient passés par notre place. Mais ce n'est pas le cas. Et, plutôt qu'échanger des idées au moment d'adopter une position commune, on donne des ordres d'un côté, et on doit s'y conformer de l'autre.»
Le débat est loin d'être terminé.