Technologie: l’EPFL parvient à déployer des électrodes dans le cerveau

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TechnologieL’EPFL parvient à déployer des électrodes dans le cerveau

Cette méthode, la moins invasive possible, permet de faire passer par un trou de 2 cm un réseau plus large, ce qui pourrait servir pour des patients épileptiques.

Michel Pralong
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Michel Pralong
Ici, le trou dans le crâne est fortement agrandi pour voir le dispositif déployé, mais la taille qu’il fait réellement dans le crâne a le diamètre du petit cercle au centre.

Ici, le trou dans le crâne est fortement agrandi pour voir le dispositif déployé, mais la taille qu’il fait réellement dans le crâne a le diamètre du petit cercle au centre.

EPFL Alain Herzog

Quand un neurochirurgien a demandé à l’équipe de Stéphanie Lacour, spécialisée dans les électrodes flexibles, d’en développer des aussi peu invasives que possible, insérables dans un crâne humain, elle a imaginé une élégante solution. C’est pourtant un défi d’insérer un large maillage d’électrodes corticales à travers un petit trou percé dans le crâne. Il faut déployer le dispositif dans l’espace d’environ un millimètre entre le crâne et la surface du cerveau, sans endommager ce dernier.

«Les neurotechnologies minimalement invasives constituent des approches cruciales pour offrir des thérapies personnalisées et efficaces, explique Stéphanie Lacour, professeure à l’institut Neuro X de l’EPFL. Nous avons dû développer un réseau d’électrodes miniaturisé, capable de se plier, de passer à travers un petit trou avant de se déployer sur une surface plate au-dessus du cortex. Nous avons combiné des concepts de la robotique et de la bioélectronique souple.» Cette technologie pourrait fournir une solution minimalement invasive pour des patients épileptiques.

Utiliser le plus de surface possible

Chaque aspect de cette nouvelle électrode, de la forme en spirale des bras à leur extension au-dessus de fragiles tissus cérébraux, a mis à contribution l’inventivité des ingénieurs. Leur premier prototype consiste en un réseau d’électrodes qui passe à travers un trou d’un diamètre de deux centimètres mais qui, une fois déplié, s’étend sur un diamètre de quatre centimètres. Il compte six bras en spirale qui maximisent la surface occupée par le réseau d’électrodes et, donc, le nombre d’électrodes en contact avec le cortex. Des bras en ligne droite entraîneraient une distribution inégale et une moindre surface de contact avec le cerveau.

Le premier prototype, à gauche, laissait trop de place perdue,

Le premier prototype, à gauche, laissait trop de place perdue,

Alain Herzog/EPFL

Comme une sorte de papillon en spirale, enserré dans sa chrysalide avant la métamorphose, le réseau d’électrodes est soigneusement replié dans un tube cylindrique (l’applicateur) prêt à se déployer à travers un petit trou dans le crâne.

Inspiré des racines des arbres

Grâce à un mécanisme inspiré de la robotique souple, les bras en spirale se déploient les uns après les autres au-dessus des fragiles tissus cérébraux. «La beauté de ce mécanisme, c’est que nous pouvons déployer une électrode de taille arbitraire en maintenant une compression à la fois constante et minimale sur le cerveau», explique Sukho Song, premier auteur de l’étude publiée dans «Science Robotics». «La communauté de la robotique souple a montré beaucoup d’intérêt pour ce mécanisme», parce qu’il s’inspire de la croissance des racines des arbres, qui ne connaît pas de limite.

Le réseau d’électrodes ressemble à un gant en caoutchouc. Des électrodes flexibles sont réparties sur chaque côté des doigts en spirale. Le gant est retourné sur lui-même et plié dans le cylindre applicateur. Pendant le dépliement au-dessus du cerveau, un liquide est injecté dans chaque bras, l’un après l’autre, et les retourne du bon côté. Les électrodes sont réparties par évaporation d’or flexible sur un substrat ultra-malléable de matériau élastomère.

Pour l’heure, le dispositif a été testé avec succès sur un porc nain. Neurosoft Bioelectronics, un spin-off du laboratoire d’interfaces bioélectroniques souples de l’EPFL, va préparer cette neurotechnologie souple en vue d’un transfert vers des applications cliniques. Le spin-off a récemment reçu 2.5 millions de francs suisses de la part d’Innosuisse.

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