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Rapport social 2012Les contacts entre générations sont rares

En dehors de la famille, les contacts entre générations sont d'une «rareté préoccupante», selon le «Rapport social 2012». De plus, les jeunes se sentent plus discriminés que les aînés.

Image d'illustration.

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Keystone

Les générations s'entendent plutôt bien en Suisse mais ne cohabitent pas vraiment. Les jeunes se sentent plus discriminés que les aînés constate le «Rapport social 2012» qui souligne qu'en dehors de la famille les contacts entre générations sont d'une «rareté préoccupante».

Les générations sont un miroir des mutations sociales, a résumé le sociologue Peter Farago, directeur du Centre de compétences suisse en sciences sociales FORS à Lausanne. Il s'est exprimé mardi à Berne lors de la présentation du Rapport social.

Avec le vieillissement de la population, la société s'étend pour la première fois dans l'histoire sur trois à quatre générations, a déclaré Pasqualina Perrig-Chiello, psychologue de l'Université de Berne. Ce qui n'est pas sans effet sur notre quotidien. Il y a un siècle, l'espérance de vie était de 47 ans en Suisse, a-t-elle rappelé.

Dépenses sociales

Une des surprises est le fait que les jeunes se sentent plus discriminés que les aînés, a dit M. Farago. Presque la moitié des personnes de moins de 30 ans disent être confrontées à des préjugés ou être traitées injustement, dans la vie professionnelle surtout. Elles ont le sentiment par exemple qu'en raison de leur âge on leur refuse des emplois.

Les dépenses sociales indiquent également une discrimination de la jeune génération: 45% de ces dépenses étatiques vont en faveur des aînés - un record au niveau européen, selon le rapport - contre 5% en faveur des jeunes (allocations pour enfants, notamment). Les auteurs considèrent que la Suisse «est bien plus frileuse» que l'Allemagne ou la Suède.

La politique intéresse

Une autre opinion préconçue sur les jeunes est contredite. Les 18- 25 ans manifestent en moyenne davantage d'intérêt pour la politique que ceux du même âge il y a 20 ans voire il y a 40 ans, a souligné la géographe Céline Schmid Botkine, rédactrice du rapport.

Les jeunes s'engagent toutefois de façon différente que les aînés, plutôt de manière ponctuelle et sur une courte durée. Ce qui conduit la géographe à supposer que les plus jeunes seront davantage intéressés par la politique quand ils auront 65 ans que les sexagénaires d'aujourd'hui.

Chacun de son côté

Le rapport met aussi en lumière qu'en dehors de la famille, les contacts entre générations sont d'une «rareté préoccupante». Ainsi, plus de 80% des 15-44 ans ne travaillent jamais avec des personnes de plus de 70 ans, ni dans la vie professionnelle, ni dans des activités bénévoles.

Cette distance entre les générations pourrait constituer une raison à l'origine des craintes diffuses des aînés face à la jeunesse, avance cette recherche. Environ 45% des personnes âgées suisses craignent que les jeunes mettent en péril l'ordre public du pays.

Entraide familiale

Au sein de la famille, sans surprise, les liens d'entraide sont le plus souvent forts. Les générations se serrent les coudes en cas de coups durs. En outre, des biens sont offerts ou hérités, des cautions et des prêts sont accordés.

Le rapport relativise toutefois ce tableau positif car la solidarité peut accentuer les inégalités sociales. Il n'ignore pas non plus que des conflits peuvent surgir dans une famille ayant pour conséquence des soutiens plus ou moins forcés, voire extorqués.

Société «traditionnaliste»

En Suisse, comme ailleurs, les générations ont des modes de vie spécifiques marqués par leur époque. Tout autant que la formation, l'appartenance à une génération conditionne les habitudes alimentaires, la consommation de médias, les préférences culturelles et comportements en matière de sports, affirment les auteurs.

Le «Rapport social» est publié tous les quatre ans depuis 2000. Il analyse cette fois sur 330 pages une série d'enquêtes récentes. Ce puzzle de données donne «un portrait de la Suisse qui atteste d'une société traditionnaliste», a dit à l'ats Céline Schmid Botkine.

L'environnement: un paradoxe générationnel

Le «Rapport social 2012» pointe un paradoxe générationnel au sujet de l'environnement. Les jeunes disent se soucier des risques écologiques mais accomplissent bien moins de gestes écologistes que les aînés qui pensent pourtant souvent que beaucoup de ces risques sont exagérés.

Les générations plus âgées sont plutôt d'avis que la société accorde une trop grande importance aux questions environnementales par rapport aux problèmes économiques, comme l'emploi, indique le rapport. Dans la pratique, les seniors adoptent malgré tout des comportements «écophiles» indépendamment de leur conscience écologique.

En clair, les seniors ont des habitudes de consommation économe qui à l'origine n'ont rien à voir avec l'écologie. Ils sont davantage enclins à diminuer leur consommation d'énergie, à renoncer aux appareils énergivores, voire à restreindre leurs déplacements en voiture car ils ont moins besoin de se déplacer.

Chez les jeunes, c'est plutôt l'inverse. Ils estiment que les menaces pour l'environnement ne sont pas exagérées. Mais lorsqu'il s'agit de passer de la parole aux actes, ils hésitent à s'imposer des restrictions dans leur consommation d'eau, d'énergie ou de transport automobile.

Le rapport mentionne que les choix de consommation des adolescents et jeunes adultes sont fortement inspirés par leur génération. Un renoncement à consommer pourrait donc signifier une exclusion sociale.

Un point sur lequel toutes les générations se rejoignent: le tri des déchets. Il est pratiqué régulièrement par plus de 90% des personnes interrogées, selon un sondage cité dans le rapport. L'explication est relativement simple: le tri des déchets est plus ou moins imposé par le biais de la taxe poubelle.

(ats)

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