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Enregistrements de MerahLes familles sont scandalisées, TF1 se justifie

La diffusion par TF1 des discussions entre le tueur Mohamed Merah et la police française qui l'assiégeait a suscité la colère des familles des victimes. La chaîne, elle, parle d'«informations importantes».

Un impact de balle retrouvé sur un pare-brise au bas de l'immeuble où a péri Mohammed Merah à Toulouse, le 22 mars dernier.

Un impact de balle retrouvé sur un pare-brise au bas de l'immeuble où a péri Mohammed Merah à Toulouse, le 22 mars dernier.

AFP

TF1 a diffusé dimanche ces extraits où l'on entend expliquer ses crimes d'un ton posé ce Franco-Algérien, qui a abattu entre le 11 et le 19 mars dans le sud-ouest de la France trois militaires d'origine maghrébine et quatre personnes de confession juive, dont trois enfants.

Ces extraits datés des 21 et 22 mars contenaient "des informations très importantes sur la façon dont les hommes du Raid (police d'élite) ont négocié" durant le siège de son appartement à Toulouse qui a duré 32 heures, a justifié lundi la directrice de l'information du groupe TF1, Catherine Nayl.

"Je pense que ce document prouve que jusqu'au bout (...), les négociateurs ont essayé d'arrêter Mohamed Merah, et de l'arrêter vivant", a-t-elle poursuivi. "On comprend dans ce document aussi que Mohamed Merah, avec un sang-froid et une détermination absolue (...), s'est construit un personnage".

"Nous sommes des journalistes, notre travail, c'est d'informer", a expliqué Catherine Nayl, au lendemain de la diffusion qui a provoqué l'indignation des proches des victimes de Merah. Ceux-ci sont désormais prêts à saisir la justice pour empêcher toute nouvelle diffusion.

Les menaces du CSA

Le Conseil supérieur de l'Audiovisuel (CSA) a annoncé qu'il procéderait mardi à l'audition des dirigeants de TF1, puis ceux de BFMTV et I-télé, qui ont rediffusé des extraits de l'enregistrement.

Le président du CSA, Michel Boyon, s'est dit "profondément choqué". "S'il y a matière pour le CSA à intervenir, notamment par la voie de sanctions, nous le ferons, sans hésiter", a-t-il prévenu.

Chargé de la régulation du secteur audiovisuel, le CSA peut relever les manquements des chaînes. Toutefois les éventuelles sanctions qu'il prononce relèvent en général de la simple mise en garde ou en mise en demeure, les deux premiers niveaux de sanctions dont il dispose.

Liens avec Al-Qaida

Dans ces enregistrement Merah affirme être prêt à poursuivre dans sa folie meurtrière, assure être en liens avec Al-Qaida et le grand banditisme et explique comment il a trompé la vigilance des services de renseignements qui le surveillaient.

Dans son édition datée de mardi, le quotidien Le Monde publie de son côté une retranscription des enregistrements.

"Scandalisés", les proches des victimes de Mohamed Merah vont saisir la justice en urgence pour obtenir l'interdiction de toute diffusion des enregistrements de ces conversations, ont annoncé lundi leurs avocats.

"Les victimes sont scandalisées d'apprendre le contenu de ces négociations à la télévision. A ce rythme, ce sont les vidéos des tueries qui se retrouveront sur la toile et l'atteinte sera alors irrémédiable", a dit l'un d'eux Me Samia Maktouf. Merah avait filmé ses crimes avec une petite caméra portable, et ces vidéos ont été saisies par la justice.

Insupportable pour les familles

"Entendre cet assassin plastronner est insupportable pour les familles", a souligné le président du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) Richard Prasquier.

"On comprend parfaitement le choc et la violence pour les familles des victimes d'entendre la voix de celui qui a assassiné un des leurs", a expliqué Catherine Nayl. Cependant, a-t-elle estimé, le document diffusé dimanche a été fait d'une façon "absolument pas sensationnaliste".

La justice a décidé d'ouvrir une enquête préliminaire pour violation du secret de l'instruction. La police des polices a été chargée de mener une enquête administrative et une enquête pénale sur la diffusion de ces enregistrements.

Mohamed Merah avait finalement été abattu le 22 mars par une unité d'intervention de la police, lors de l'assaut de son appartement. Cette affaire avait mis en lumière les lacunes du contre-espionnage français, critiqué pour n'avoir pas pris au sérieux un homme qui s'était rendu notamment au Pakistan et en Afghanistan.

La justice saisie

Lundi vers 18h30, les policiers de l'IGPN se sont rendus au siège de Elephant & Cie, la société qui produit l'émission "Sept à Huit" de TF1, pour tenter de mettre la main sur les enregistrements, ont indiqué des sources concordantes, confirmant une information du point.fr.

"Il n'y a pas eu de perquisition", a déclaré à l'AFP une source judiciaire. "L'IGPN a sollicité la remise volontaire des enregistrements de conversations utilisés pour la réalisation du reportage, mais Elephant & Cie a refusé de les donner aux policiers", a-t-on ajouté de même source.

Frédéric Boisset, un des rédacteurs en chef de "Sept à Huit", a toutefois indiqué qu'une copie du reportage avait été remise aux agents. "Le matériel qu'on nous a demandé n'existe plus. Mais on a remis une copie du reportage à la police", a-t-il déclaré à l'AFP.

Des extraits circulaient lundi sur plusieurs sites internet de partage vidéo tels que YouTube, malgré les efforts de TF1 pour éviter qu'ils se disséminent sur la Toile.

TF1, BFMTV et iTélé entendus

(AFP)

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