Libre circulationLes immigrés contribuent largement à la croissance de l'emploi
Selon un rapport mandaté par le Secrétariat d'Etat à l'Economie (SECO), la libre circulation mise avec l'UE a eu des effets bénéfiques sur l'emploi en Suisse.
La libre circulation avec l'Union européenne a largement contribué à la forte croissance de l'emploi en Suisse. Depuis 2002, le nombre d'actifs a progressé de 624'000 personnes. Près de la moitié étaient des immigrés et des frontaliers. Leur arrivée n'a pas eu d'impact notable sur le chômage, selon un communiquédu Secrétariat d'Etat à l'Economie (SECO).
Le 10e rapport de l'Observatoire sur la libre circulation des personnes présenté mercredi à la presse confirme l'effet positif de l'accord bilatéral en vigueur depuis 2002. Cela n'a pas empêché le peuple d'accepter le 9 février l'initiative contre l'immigration de masse.
Pas décisif le 9 février
Pour la secrétaire d'Etat à l'économie Marie-Gabrielle Ineichen, le vote s'explique par des raisons multiples et une forte composante émotionnelle. «L'effet de la libre circulation sur l'économie n'a pas vraiment joué le rôle qu'il aurait dû.» L'accord reste toutefois valable tant que l'initiative n'aura pas été mise en oeuvre.
L'an dernier, l'immigration nette des pays membres de l'UE a atteint le chiffre record depuis 2002 de 66'200 personnes. Contrairement aux années 1980 et 1990, la majorité d'entre elles (plus de 60%) sont venues pour travailler.
Il s'agit essentiellement d'une main d'oeuvre spécialisée, puisqu'au deuxième trimestre 2013, 58% des actifs venus de la zone UE disposaient d'un diplôme d'enseignement supérieur. Seuls 14% n'avaient pas continué leur formation après l'école obligatoire.
En dépit de la forte immigration, le chômage est resté constant depuis les années 1990. Selon des études empiriques, la main-d'oeuvre qualifiée étrangère a bien complété le personnel indigène, a commenté Boris Zürcher, chef de la Direction du travail du SECO. Les problèmes de concurrence pour la population résidente sont restés modérés et limités à certains groupes de personnes.
Etude sur les frontaliers
L'emploi de frontaliers a toutefois fortement augmenté au Tessin, à Genève et dans le canton de Vaud et leur pose des défis particuliers. L'Université de la Suisse italienne remettra d'ici la fin de l'année une étude sur les conséquences de la libre circulation sur le marché de l'emploi au Tessin.
La situation varie aussi selon les branches. Alors que le chômage dans l'industrie est revenu l'an dernier dans la moyenne après la récession de 2009, celui de l'hôtellerie a grimpé l'an passé à 6%. Le taux est nettement plus faible dans la construction, mais il augmente depuis 2011 et se rapprochait en 2013 de 4%.
Selon l'Observatoire, la libre circulation n'a pas tiré les salaires vers le bas. Les salaires réels ont augmenté depuis 2002 de 0,7% par an au lieu de 0,2% dans les années 1990. Les travailleurs qualifiés en ont un tout petit moins profité. Les bas revenus n'ont en revanche pas subi d'érosion grâce aux mesures d'accompagnement.
Abus quotidiens
L'Union syndicale suisse ne croit pas à ce bilan rose. «Les problèmes d'abus sont quotidiens», a expliqué son économiste en chef Daniel Lampart. De nombreux cas de sous-enchère salariale ont été constatés dans la construction, l'horticulture, le commerce de détail, le nettoyage ou l'hôtellerie-restauration.
Or, quiconque travaille en Suisse doit toucher un salaire suisse et bénéficier des conditions de travail suisses. C'est le principe des mesures d'accompagnement et elles doivent être renforcées. Les citoyens ont soutenu l'initiative de l'UDC parce qu'ils craignent pour leur emploi et leurs salaires, a assuré M.Lampart.
Pour un marché flexible
Il existe certaines défaillances administratives, a admis Roland Müller, directeur de l'Union patronale suisse (UPS). Mais le succès exceptionnel de l'économie repose sur la flexibilité du marché de l'emploi. Pas question d'introduire des perfectionnements excessifs dans l'extension des conventions collectives de travail.
L'UPS soutient les efforts du Conseil fédéral pour exploiter davantage la main d'oeuvre indigène. L'immigration ne pourra toutefois pas être remplacée, a averti M.Müller.
Les assurances sociales en profitent. Sans les cotisations des ressortissants de l'UE, les comptes de l'AVS auraient présenté un déficit de 1,7 milliard de francs dès 2009. Le problème du vieillissement de la population n'est pas résolu, a reconnu M.Zürcher, mais le temps gagné est précieux pour la réforme de la prévoyance vieillesse.