Hockey sur glace: Les joueurs simulent pour de vrai

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Hockey sur glaceLes joueurs simulent pour de vrai

Cette saison, douze professionnels de National League ont été amendés pour avoir simulé une faute.

par
Simon Meier
De nombreux joueurs sont amendés pour simulation (ici Johann Morant en mars 2017).

De nombreux joueurs sont amendés pour simulation (ici Johann Morant en mars 2017).

Capture d'écran SIHF

On savait le phénomène vastement répandu sur les terrains de football et dans les chambres à coucher: la simulation. Voilà maintenant que la fourbe opère une percée sur les patinoires helvétiques. Depuis lundi, avec l'annonce des amendes infligées au Biennois Dominik Diem et au Zougois Sven Senteler, on recense douze cas sanctionnés dans la catégorie «plongeon et embellissement» cette saison en National League. Si l'on compare aux chiffres de l'exercice précédent (quatre cas au total), le bond est spectaculaire.

Les hockeyeurs, incarnation présupposée de la chevalerie, sont-ils par un méchant coup du sort subitement devenus des couards et des truqueurs? Non, ils l'étaient déjà avant. «Oooh oui! J'ai bien connu ça, déjà comme joueur (ndlr: entre 1975 et 1994), rigole le Canadien Larry Huras. Ceux qui trichaient, je les tapais deux fois plus fort la fois d'après. Comme coach, je n'ai jamais encouragé un joueur en ce sens; il m'est arrivé au contraire d'en repérer et de leur dire d'arrêter. Normalement, il y a un code qui dit – par exemple – que si tu ne bouges plus, c'est que tu es vraiment mal. Peut-être que les hockeyeurs regardent trop le foot…»

«La zone grise est immense»

Les vices du ballon rond comme prétexte aux dérives du puck? Mauvais signe. Signal d'alarme? À entendre Goran Bezina, défenseur de GE Servette, non. «Avec douze cas sur je ne sais pas combien de matches (ndlr: 251), on parle quand même d'un truc assez rare, accessoire, estime le Montheysan. Mais c'est bien que la ligue intervienne pour remettre les coupables en place – personne n'a envie de payer d'amende. Et puis, ces choses-là font vite le tour, dans le milieu. Or personne n'a envie de trimbaler une étiquette de tricheur.»

La conscience morale et la peur du ridicule en guise de garde-fou, il n'est pas interdit d'y croire; ou d'en douter. Selon Bezina, il n'y aurait que «trois ou quatre» experts simulateurs en première division suisse. «Ce genre de trucs doit se régler à l'interne, explique l'ex-international Gil Montandon. Un jour, avec Berne, j'ai mis une brossée pas possible à un coéquipier qui venait de tomber comme une larve, alors qu'il avait à peine été effleuré. Déjà que les arbitres ne sont pas terribles… Si en plus ils doivent se demander si le joueur est honnête, ils vont être perdus, les pauvres.»

Les «zèbres» ne sont pas perdus (lire le témoignage de Didier Massy). Mais comme tout le monde, ils s'interrogent à propos d'un phénomène rude à cerner, impossible à éradiquer. «La Ligue a raison de vouloir intervenir, mais le problème, pour sanctionner, c'est que la zone grise est immense. Or pour punir quelqu'un, il faut que le délit soit vraiment flagrant», note Larry Huras.

Fustigé ou… remercié

L'éventail des sanctions se cantonne pour l'instant aux amendes (entre 800 et 2000 francs, selon les cas) et à d'éventuelles suspensions (si récidive). Si Goran Bezina juge l'arsenal suffisamment dissuasif, Gil Montandon croit qu'il «ne sert à rien». «Les simulateurs, il faut leur mettre cinq minutes de pénalité, histoire de sanctionner l'équipe, appuie-t-il. Parce que la pire des punitions, pour un gars qui a simulé, c'est de se faire fusiller du regard par ses 25 coéquipiers quand il revient dans le vestiaire.»

Oui. Mais il arrive aussi que celui qui a volé la pénalité décisive en prolongation soit chaleureusement félicité par le groupe. Dans une discipline où on glisse et patine par définition, où on se rentre dedans par nature, compliqué de trier le vrai du faux. Le maladroit du malhonnête. Le guerrier du simulateur.

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